C'est un ancien séminariste qui sera traité par le pape Pie IX de blasphémateur européen après la publication de son livre La Vie de Jésus. C'est un philologue, un historien, un philosophe. C'est « le plus grand orientaliste du XIXe siècle et l'intellectuel de référence après la mort de Victor Hugo » selon Henry Laurens.
C'est pour toutes ces raisons, et bien d'autres encore, qu'une réunion de professeurs dirigée par Henry Laurens a voulu rendre hommage à la pensée de celui qu'Anatole France a présenté comme « l'un des plus vastes génies de son temps », à l'occasion du 150e anniversaire de sa leçon inaugurale au Collège de France. Pour ce faire, ils ont organisé un colloque de nature historique dont les travaux sont publiés dans un ouvrage, Ernest Renan. La science, la religion, la République, qui ne manque pas de replacer la pensée de l'auteur dans son contexte et de présenter l'étendue de son héritage dans une perspective critique.
« Ernest Renan est un pur orientaliste, au sens où Edward Saïd le définit. C'est-à-dire qu'il a une vision essentialiste, une lecture littéraliste du texte coranique, et des jugements à l'emporte-pièce », explique Henry Laurens. Il est d'ailleurs assez étonnant de voir à quel point les discours d'Ernest Renan et ceux de Hassan al-Banna, le fondateur des Frères musulmans, se rejoignent sur leurs visions de l'islam. « Les orientalistes du XIXe siècle et les islamistes parlent le même langage », précise pour sa part M. Laurens. Cela explique peut-être dans une certaine mesure comment les deux se sont influencés et ont contribué à élargir la frontière entre le monde musulman et l'Europe.
A.S.
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