Le grand chancelier de l’ordre de Malte lance un message d’espoir depuis Beyrouth

Reconnu au Liban pour son association caritative qui s'occupe des plus démunis, l'ordre de Malte (ODM) est bien plus qu'une fondation humanitaire. Véritable État entretenant des relations diplomatiques dans plus de cent pays, il s'agit du seul ordre à être à la fois religieux et souverain, fort d'une structure hiérarchique similaire à celle d'un État géographique et caractérisée par les valeurs de la noblesse conservées depuis le Moyen Âge. Et hier, Albrecht Freiter von Boeselager, grand chancelier de l'ordre, soit l'équivalent du Premier ministre ou encore du ministre des Affaires étrangères de l'ordre, était de passage à Beyrouth afin d'assister à un événement pastoral relatif à l'institution.

« Ce n'est pas toujours que j'assiste aux cérémonies de vœux solennels, mais il nous importe de faire acte de présence au Liban en cette période difficile, a confié le grand chancelier, rencontré par L'Orient-Le Jour. Notre relation avec ce pays est assez spéciale en effet ; nous sommes nés dans cette terre sainte et nous y sommes attachés. En cette période, nous sommes préoccupés, surtout en ce qui concerne les minorités persécutées. »
« Les problèmes du Moyen-Orient intéressent assez l'Occident, à l'exception de pays où les conflits locaux prennent le dessus, et il nous importe d'être présents dans les zones de conflit où notre mission devient davantage d'actualité », a-t-il ajouté, assurant toutefois ne pas avoir peur. « Nous voyons toujours le Liban comme étant un modèle de coexistence, a-t-il dit. Les Libanais ont vécu de nombreuses guerres, mais aujourd'hui, ils se rapprochent les uns des autres face au danger. Le pays reste un symbole d'espoir. »
Aujourd'hui, l'ordre de Malte tente de venir en aide aux personnes affectées par la crise syrienne. Récemment, une unité médicale mobile a été mise en place à Wadi Khaled. D'autres ont été placées en Turquie à la lisière de la Syrie. « Nous nous devons de donner une voix aux plus pauvres. Nous ne différencions pas entre Syriens et Libanais et tous peuvent profiter de notre assistance, a expliqué le grand chancelier. Pour l'instant, il est encore trop dangereux de pouvoir pénétrer de façon permanente en territoire syrien et nous espérons que cela sera possible bientôt car la crise touche beaucoup de secteurs, notamment le secteur éducatif pour les enfants. »

Une diplomatie humanitaire puissante
« Malgré cela, l'ordre de Malte reste aujourd'hui présent dans de nombreuses zones de conflit où il est parfois le seul capable à être sur le terrain, a poursuivi le grand chancelier. Les sociétés, les gens et les États ont confiance en notre ordre dont l'action est basée sur la foi. Ils savent que nous n'intervenons pas dans leurs conflits et notre agenda est connu de tous. Notre diplomatie humanitaire nous a permis par exemple d'être les seuls à pouvoir être présents à l'est du Congo. Par ailleurs, à chaque région du monde ses challenges et ses défis, surtout que les lois régissant les droits de l'homme et établies après les guerres mondiales ne sont plus un garde-fou », a déploré M. von Boeselager, qui a visité hier le centre de soins de paralysie cérébrale à Bhannès, régi par l'association libanaise de l'ordre. « Plus de 85 associations de l'ODM sont présentes dans le monde, a-t-il noté. Et celle du Liban se distingue particulièrement par son programme visant à recevoir des jeunes d'Europe pour passer des vacances auprès de personnes handicapées. »

« Nous sommes là depuis plus de trente ans, a indiqué pour sa part le président de l'association, Marwan Sehnaoui. L'association est très présente au Liban, du nord au sud. Ce qui a commencé par un simple soutien aux plus pauvres et aux minorités persécutées a rapidement atteint de nombreux autres domaines. À travers nos unités médicales, nos centres pour le 3e âge, nos centres d'accueil et 200 000 actes médicaux en moyenne par an, nous essayons de créer des espaces où les hommes peuvent vivre en dignité et dans l'amour. En ayant pour seul intérêt celui de l'homme, loin des intérêts personnels et politiques, l'ordre de Malte croit vraiment pouvoir réaliser un projet de civilisation basé sur le respect de l'Autre, la dignité et l'amour, qui est plus fort que tout. »
Et de conclure : « Nous ne pouvons avoir peur car nous avons la foi. En Orient, nous avons l'espoir. Quand je vois dans notre centre sociomédical de Siddiquine, au Liban-Sud, des infirmières voilées et portant la croix au cou, je ne peux que garder l'espoir. »