« Vous nous demandez de l'aide et vous le faites de manière pressante, mais vous n'êtes même pas capables de vous aider vous-mêmes! » C'est plus ou moins en ces termes sans concessions qu'un diplomate occidental s'est récemment adressé à un ministre du cru, exprimant par là un état d'esprit de plus en plus répandu dans les chancelleries à l'égard de la façon dont la classe politique libanaise, ou du moins une partie d'entre elle, gère le dossier de l'élection présidentielle.
Ce que ce diplomate s'efforçait de traduire en réalité, c'est un sentiment de frustration grandissante face à l'espèce de fatalité qui paraît envelopper cette échéance aux yeux des Libanais, sous le prétexte qu'elle est nécessairement tributaire de considérations régionales, voire internationales.
Quand bien même ce serait le cas, souligne-t-on dans certains milieux diplomatiques, il y a un moment où les blocages extérieurs devraient contraindre les protagonistes libanais à prendre le taureau par les cornes et s'atteler à la tâche consistant à « libaniser » leur scrutin présidentiel, s'ils tiennent à avoir un président de sitôt.
Or pour qui répète jour après jour que la stabilité politique au Liban est une « ligne rouge » et une priorité internationale, comme l'a rappelé encore hier à Beyrouth l'émissaire des Nations unies pour la Syrie, Staffan de Mistura, réclamer des efforts afin de libaniser la présidentielle ne relève plus du simple exercice de style diplomatique, mais d'une suite dans les idées : sans chef de l'État, dans le contexte régional actuel, le Liban ne peut qu'être dangereusement fragilisé, à l'heure où il a réellement besoin de toutes ses ressources pour pouvoir faire face aux défis qui se posent à lui, notamment sur le plan sécuritaire.
À côté des événements qui se déroulent dans la partie septentrionale de la Békaa, les tentatives désormais quotidiennes d'embraser le Liban-Nord sur une base confessionnelle et sectaire, de dresser la rue sunnite contre l'armée libanaise et d'inciter les chrétiens à un affrontement avec les sunnites sont les plus graves de ces défis.
Et sur le plan politique, ce qui rend encore plus pressant le besoin d'élire un président, c'est le constat de l'état d'impuissance quasi totale dans laquelle se trouve le gouvernement. La coordination entre les principales composantes du cabinet a beau se poursuivre à un rythme soutenu, elle ne sert plus apparemment qu'à le maintenir sur pied. En revanche, pour ce qui est de prendre des décisions importantes, il faudra repasser une autre fois. Chaque séance du Conseil des ministres devient l'occasion de déballages en tout genre, y compris entre ministres relevant du même camp, comme on l'a vu jeudi avec l'altercation qui a opposé le ministre des Affaires étrangères, Gebran Bassil, à celui des Travaux publics, le berryste Ghazi Zeaïter, sur fond de répartition des crédits des TP sur les régions.
Certes, la nature des cabinets de coalition à la libanaise est traditionnellement propice à de tels blocages, qu'il y ait un président de la République ou pas. Il reste qu'en l'absence de ce dernier, cette défaillance chronique est singulièrement aggravée par le fait que les prérogatives du chef de l'État sont réparties sur tous les ministres.
Mais pourquoi cette exigence de libanisation de l'échéance présidentielle devient-elle soudain si pressante ? Il se trouve que non seulement les tentatives menées par les Occidentaux auprès des acteurs régionaux, et en particulier de l'Iran, pour les amener à « faciliter » le déroulement de l'élection présidentielle au Liban ont échoué, mais aussi qu'après avoir frisé l'embellie, les rapports entre Riyad et Téhéran connaissent une escalade à l'heure actuelle. Sans parler du « froid » qui, au plan international, caractérise ces temps-ci les relations entre les États-Unis et la Russie.
Localement, des protagonistes de tous bords paraissent conscients du besoin d'un retour aux sources libanaises, mais sont contraints d'avancer très lentement. Outre les leaders chrétiens du 14 Mars, c'est le cas du chef du courant du Futur, Saad Hariri, qui a tenté de mettre au point avec le patriarche maronite, lors de leur entrevue à Rome, un cadre pour la présidentielle, fondé sur la notion de président acceptable par toutes les parties.
C'est aussi le cas du président de la Chambre, Nabih Berry, qui leur a fait écho de Genève en évoquant la nécessité d'un candidat de compromis.
Et c'est enfin le cas du chef du PSP, Walid Joumblatt, qui a poursuivi hier sa quête prospective d'une ouverture quelconque en se rendant à Maarab, chez le leader des FL, Samir Geagea.
Restent le général Michel Aoun et le Hezbollah. Le premier paraît ne pas encore avoir tiré les leçons du positionnement des autres acteurs, et notamment celui de M. Hariri, lui retirant toute perspective de candidature « consensuelle ». Quant au Hezb, il donne ces jours-ci des signaux contradictoires, à l'image des propos tenus par son « numéro deux », cheikh Naïm Kassem. Jeudi, avec Staffan de Mistura, cheikh Kassem avait évoqué rien de moins que la nécessité de « concessions douloureuses » de la part de toutes les parties au conflit en Syrie en vue d'une solution politique. Et hier, le même Naïm Kassem se montrait sceptique quant à la possibilité de solutions aux problèmes de la région « avant des années »...
Et au sujet de la présidentielle, il est arrivé dernièrement à Mohammad Raad, le chef du bloc parlementaire du Hezbollah, de se prononcer pour un « candidat consensuel » en sortant de chez Walid Joumblatt.
Si c'est dans le sens que donne M. Joumblatt à ce terme, ce n'est donc plus dans celui du général... Dont acte ?
Lire aussi
Qui a peur de l'EI ?, l’éditorial de Issa Goraeib
Naïm Qassem et les 7 boules de cristal, le billet de Ziyad Makhoul
Selon un rapport diplomatique, débat en Occident sur les sources de financement de l'EI, le décryptage de Scarlett Haddad
commentaires (6)
CEUX QUI ONT LE POUVOIR DANS NOTRE MALHEUREUX PAYS SONT LES MERCENAIRES IRANIENS, SAOUDIENS ET ISRAELIENS. LES MERCENAIRES IRANIENS NE SE CACHENT PLUS DEPUIS LONGTEMPS TOUT LE MONDE LES CONNAIT ET EUX MÊME L'AFFICHENT FIÈREMENT. HASSAN NASRALLAH, NABIH BERRY ET MICHEL AOUN. DU CÔTÉ SAOUDIEN, C'EST LA FAMILLE HARIRI QUI FAIT LA NAVETTE ALLER RETOUR ENTRE L'ARABIE SAOUDITE ET PARIS ROME POUR ENFIN FILER DES ORDRES BIDON PAR TÉLÉPHONE AUX PETITS TROUPEAUX QUI S'APPELLE LE 14 MARS. PUIS ISRAEL, LE GRAND GAGNANT, IL EST REPRÉSENTÉ PAR QUI ? PAR QUEL MERCENAIRE ? QUI FAIT LE PLUS DES DÉGATS AU PAYS ? VU L'HISTORIQUE DE CHACUN DE NOS HOMMES POLITIQUE QUI BLOQUENT LE PAYS, JE NE VOIS QU'UNE PERSONNE. C'EST L'ÉLU JOUMBLATT QUI JOUE CE RÔLE DIABOLIQUE.
Gebran Eid
15 h 01, le 18 octobre 2014