Pour des causes à caractère urbanistique, social ou encore légal, la Coalition civile contre l'axe Hikmeh-Turk (ou route Fouad Boutros) a réitéré mardi les arguments de son refus d'un tel projet, en présence de dizaines d'habitants et membres de la société civile.La conférence de presse s'est déroulée dans un lieu hautement symbolique à Mar Mikhaël, le jardin de la résidence Tobbagi, un espace vert devenu rarissime dans la capitale, attenant à une des maisons traditionnelles les plus belles qui devraient disparaître en cas de construction de la route. Le débat a été conclu par les recommandations d'abandonner définitivement le projet, de faire participer la population locale à la recherche de solutions, de privilégier le développement des transports en commun comme alternative à la construction de nouvelles routes, et d'instaurer une meilleure coordination au sein de la société civile.
Dans le débat animé par Mohammad Ayoub, directeur exécutif de Nahnoo, l'urbaniste Jihad Kiamé s'est exprimé au nom de nombre de ses collègues qui refusent le projet, et qui viennent de lancer une pétition pour montrer que le projet ne sert pas l'objectif pour lequel il a été conçu. « Beyrouth n'a pas besoin de nouvelles routes », a-t-il estimé. Il a dénoncé la tendance du conseil municipal de Beyrouth et du Conseil du développement et de la reconstruction (CDR) à faire revivre des projets anciens qui tournent autour de l'utilisation des voitures. Rappelons que l'axe Hikmeh-Turk est un projet datant des années 50, visant à relier le secteur de la Sagesse à celui de Charles Hélou, sur la côte. Soulignant sa conviction que cette route « ne règle en aucun cas le problème de trafic tout en détruisant le quartier par lequel elle passe », Jihad Kiamé a appelé à « moderniser notre vision de la ville en la rendant plus souple ».
Un autre urbaniste, Antoine Atallah, a présenté le site Internet de la campagne : www.stopthehighway.wordpress.com. Un tel site, selon lui, renforce la transparence par le partage de données et d'études, permettant ainsi à la population de rester informée sur des projets qui affectent son quotidien.
Abordant les aspects social, économique et légal, Raja Noujaim, coordinateur de la campagne, a rappelé que la lutte, qui a commencé depuis un an et demi environ, est menée sur trois fronts : celui de pousser les parties concernées à élaborer une étude d'impact environnemental du projet (pari réussi puisque celle-ci est en préparation), celui de faire parvenir à la justice « les données exactes sur le dossier des expropriations en relation avec le projet », et, enfin, celui de révéler le « vrai coût de construction » – selon lui, « les autorités ont beau affirmer que le budget est de 75 millions de dollars, il ne peut être inférieur à 195 ou 250 millions de dollars si tous les paramètres sont pris en compte ».
D'un point de vue légal, Raja Noujaim révèle que la coalition a intenté un procès auprès de la Cour de cassation et de l'Inspection centrale contre le conseil municipal de Beyrouth et le CDR « parce que ceux-ci insistent à poursuivre les procédures d'expropriation avant d'avoir obtenu l'aval du ministère de l'Environnement ». Il a rappelé que de nombreux ayants droit ont porté plainte auprès du Conseil d'État en vue de demander l'annulation du décret des expropriations. Sur la question du trafic, il a assuré que les alternatives existent, que les études ont été faites et qu'elles seront livrées, en temps dû, au ministère de l'Environnement.
Liban - Infrastructures
Le niet des urbanistes et des militants à la route Fouad Boutros
Le projet d'axe routier continue de susciter une vive opposition de la part de ceux qui lui préfèrent une alternative qui préserverait le cachet et l'harmonie du quartier.
OLJ / le 28 août 2014 à 00h52