La banque Pictet a publié ses premiers résultats semestriels ce matin. Elle sera suivie jeudi par la banque Lombard Odier. Photo Valentin Flauraud/Bloomberg
À Genève, les banques Pictet et Lombard Odier, spécialisées dans la gestion de fortune comme toutes les banques privées en Suisse, cotées en Bourse ou non, vont publier leurs premiers résultats semestriels cette semaine, rapporte l'AFP.
La banque Pictet a ouvert le bal ce matin, elle sera suivie jeudi par la banque Lombard Odier.
« Tous les chiffres qui seront publiés sont importants, même si ces banques ne sont pas cotées », a déclaré à l'AFP Andreas Venditti, analyste bancaire auprès de la banque Vontobel à Zurich.
Les obligations de publication ne sont pas les mêmes pour une banque lorsqu'elle est cotée en Bourse ou non. Pour une banque non cotée, il y a moins d'obligations. Ainsi, ces banques ne sont pas obligées de publier les rémunérations de leurs dirigeants. En revanche, elles devront publier leur total de bilan, ainsi que leurs bénéfices ou pertes semestriels. Elles publieront aussi leurs avoirs sous gestion et le ratio des fonds propres, ainsi que celui des liquidités à court terme.
Le montant des nouveaux fonds sous gestion, c'est-à-dire les nouveaux capitaux que les banques auront réussi à capter de la part de nouveaux ou d'anciens clients, sera publié au moment des comptes annuels, a indiqué la banque Pictet.
La révolution des banques privées suisses a commencé en février 2013, avec l'annonce par deux d'entre elles parmi les plus prestigieuses, Pictet et Lombard Odier, de l'abandon de leur statut juridique vieux de plus de 200 ans, pour devenir des sociétés anonymes, en commandite par actions.
Cette forme de société existe déjà en France dans des sociétés comme Hermès, Michelin ou Lagardère, et permet de verrouiller le capital en cas d'OPA.
Leur ancien statut de société de personnes leur permettait de se faire appeler « banquiers privés », une appellation éminemment prestigieuse dans le monde bancaire suisse.
Les banquiers privés sont en effet considérés comme responsables sur leur fortune personnelle pour leur gestion professionnelle. Ils sont par principe très riches, pour pouvoir supporter une telle responsabilité.
Le changement de statut, qui limite considérablement leur responsabilité, s'explique par les scandales récents, comme l'affaire Madoff, qui ont montré que l'activité de banquier privé n'est pas sans risque.
Le liquidateur américain de l'affaire Madoff a en effet réclamé 150 millions de francs suisses (125 millions d'euros) à Pictet.
Le statut de banquier privé était cependant confortable pour les responsables de ces établissements, car il n'y avait aucune obligation de publier des résultats.
Pour le professeur de droit suisse Luc Thévenoz, de l'université de Genève, le changement de statut assure une meilleure protection aux banquiers, mais « le prix à payer est celui de la transparence, les banques étant obligées de publier leurs comptes ».
Le changement de statut est entré en vigueur le 1er janvier 2014. Quelques jours plus tard, les banques concernées ont commencé à distiller des informations au compte-gouttes. Elles ont d'abord annoncé l'arrivée de personnalités extérieures à la banque dans les conseils d'administration. Elles ont ensuite dévoilé leurs fonds propres, une obligation liée à leur inscription au registre du commerce.
La publication des résultats semestriels est ainsi une étape supplémentaire dans cette opération « transparence ». La prochaine sera la publication des premiers résultats annuels, en janvier-février 2015.
Depuis ce changement de statut, il n'y a plus que 7 banques en Suisse se réclamant du statut de « banquiers privés », soit Baumann & Cie, Bordier & Cie, E. Gutzwiller & Cie, Gonet & Cie, Mourgue d'Algue & Cie, Rahn & Bodmer & Co et Reichmuth 1 & Co.