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À La Une - conflit

Maliki accuse les Kurdes d'héberger des jihadistes et creuse les divisions en Irak

L'armée découvre 53 cadavres dans le centre du pays.

Des chiites irakiens qui se sont portés volontaires pour combattre, auprès de l'armée, les jihadistes de l'EI, le 9 juillet 2014 à Bagdad. AFP PHOTO/AHMAD AL-RUBAYE

Le Premier ministre irakien Nouri al-Maliki a accentué les divisions minant son pays en accusant mercredi les Kurdes d'abriter des jihadistes, ignorant les appels pressants à l'unité pour faire face à l'offensive des insurgés qui a précipité l'Irak au bord du gouffre.

M. Maliki, un chiite au pouvoir 2006, prête ainsi le flanc aux critiques pointant sa politique confessionnelle et court le risque de compromettre le troisième mandat auquel il tient. Si le soutien kurde n'est pas nécessaire pour former un gouvernement, il n'en est pas moins essentiel pour former un front uni face aux jihadistes de l'Etat islamique (EI, Daech) qui se sont emparés de larges pans du territoire à la faveur d'une vaste offensive lancée le 9 juin.

"Nous ne pouvons pas rester silencieux devant le fait qu'Erbil (la capitale du Kurdistan) est devenue un quartier général pour l'EI, pour le parti Baas (de l'ancien président sunnite Saddam Hussein), pour el-Qaëda et pour des opérations terroristes", a dit M. Maliki dans son allocution télévisée hebdomadaire.
Les insurgés "vont être défaits, de même que leurs hôtes parce qu'ils ont échoué à fournir un exemple de partenariat démocratique", a mis en garde M. Maliki dont les forces peinent à reprendre du terrain face aux insurgés après leur débandade initiale.

 

(Lire aussi : L'indépendance du Kurdistan irakien, un parcours semé d'embûches)

 

M. Maliki a fustigé dans ce contexte l'initiative du président du Kurdistan irakien, Massoud Barzani, qui envisage un référendum sur l'indépendance de sa région, augmentant le risque de partition du pays.

 

Blocage politique
Un mois jour pour jour après le début de l'offensive jihadiste qui a fait des centaines de morts, poussé des centaines de milliers d'Irakiens à fuir et permis à l'EI de proclamer un "califat" sur une zone à cheval entre la Syrie et l'Irak, les politiciens restent dans l'incapacité de faire front commun.

Bien avant l'attaque jihadiste, l'Irak était plongé dans une crise politique cumulée à une escalade des violences meurtrières depuis plus d'un an, M. Maliki étant accusé par ses détracteurs d'accaparer le pouvoir, de corruption et de marginaliser la minorité sunnite.

Gouvernement et Parlement étaient paralysés par cette crise, et en raison des profondes divisions, le nouveau Parlement issu des législatives du 30 avril ne parvient toujours pas à enclencher le processus de formation d'un gouvernement appelé par la communauté internationale et les dirigeants religieux irakiens à rassembler toutes les forces politiques.

Les déclarations de M. Maliki ne faciliteront pas la tâche du Parlement, qui doit se réunir dimanche après une première séance stérile levée dans le désordre et les insultes le 1er juillet. Le bloc de M. Maliki est sorti en tête des législatives du 30 avril et ce dernier a affirmé qu'il ne renoncerait "jamais" à un 3e mandat.

Le poste de Premier ministre, le plus important des institutions, revient selon une règle non écrite à un chiite, tandis que les sunnites ont la présidence du Parlement et les Kurdes celle de la République.
Les divisions confessionnelles font craindre un retour aux atrocités du conflit de 2006-2007 entre chiites et sunnites qui a fait des dizaines de milliers de morts.

 

(Lire aussi : En Irak, Maliki affaibli mais bien accroché)

 

53 cadavres découverts
Mercredi, les corps de 53 hommes, ligotés et exécutés ont été découverts dans des vergers au sud de Hilla (centre). Selon un employé de la morgue, les corps portaient des impacts de balles dans la tête ou dans la poitrine et les décès remontent à au moins une semaine.

Même si la province de Babylone, dont Hilla est le chef-lieu, a été le théâtre de combats entre jihadistes et forces irakiennes, la zone où les cadavres ont été retrouvés n'avait pas connu de violences ces derniers temps.

Malgré l'aide des États-Unis, de la Russie et des milices chiites, l'armée tente toujours sans grand succès de reconquérir les régions prises par les jihadistes, notamment celle de Tikrit, fief de Saddam Hussein.
Alors que l'EI s'approche de Bagdad, neuf soldats ont péri dans des combats avec des jihadistes au nord de Baqouba (60 km au nord de la capitale).

Plus au nord, aux environs de Kirkouk, ville pétrolière contrôlée par les forces kurdes, des insurgés ont orchestré une démonstration de force en paradant dans des dizaines de véhicules, dont certains pris à l'armée, arborant armes et drapeaux aux couleurs de l'EI, selon des témoins.

 

(Lire aussi:Le prêche du « calife » à Mossoul montre sa force et « le niveau de confiance au sein de son organisation »)



Les responsables chrétiens en appellent à l'Europe
En outre, les insurgés ont pris le contrôle d'un ancien dépôt d'armes chimiques en Irak datant de l'époque de Saddam Hussein, chassé en 2003 par l'invasion américaine, selon une lettre du gouvernement irakien à l'ONU. Le département d’État américain avait annoncé en juin que les jihadistes s'étaient emparés de cette ancienne usine, mais Washington avait estimé qu'ils ne seraient pas en mesure de produire des armes chimiques opérationnelles, en raison de la vétusté et de l'ancienneté des produits pouvant encore s'y trouver.

 

(Dossier : Pour combattre Daech, il faut lutter contre les régimes autoritaires qui alimentent la rhétorique de ce groupe)

 

Dans ce contexte de violences, les principaux responsables chrétiens d'Irak ont appelé mercredi à Bruxelles l'Union européenne à s'engager pour éviter "une guerre civile" qui menacerait les chrétiens, "une minorité très fragile". "Les Européens ont un devoir moral vis-à-vis de l'Irak", a déclaré le patriarche de l’Église chaldéenne en Irak, Louis Sako, devant la presse. "Nous attendons qu'ils s'engagent pour sauver ce qui peut être sauvé", en aidant "à trouver une solution politique" à la crise et à "éviter qu'elle ne s'aggrave en guerre civile", a ajouté Mgr Sako.

Mgr Sako s'est déclaré "très inquiet" de la situation des chrétiens qui continuent à fuir les zones conquises par les insurgés jihadistes dans le nord. "Pour le moment, les chrétiens n'ont pas été pris pour cibles en tant que groupe" par l’État islamique en Irak et au Levant (EIIL), a-t-il souligné, mais "il faut attendre de voir l'évolution de la situation".

 

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