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Culture - Exposition

Des mots (arabes) pour le dessiner

Le signe V de la victoire accueille le visiteur d'Alt City*. Un signe composé en toutes lettres calligraphiques arabes par Everitte Barbee.

« Wadjda » : « Les filles par ici ne montent pas à bicyclette. »

De la poésie, mais aussi de la politique et de la religion. Les calligraphies d'Everitte Barbee sont à l'image de Beyrouth, ville dans laquelle il s'est installé il y a un peu plus de trois ans. Un mélange de culture pop, de slogans politiques, de religion, d'Orient et d'Occident. Everitte Barbee est un jeune Américain de 25 ans. Né à Nashville, dans le Tennessee, il vit au Liban depuis qu'il a achevé ses études universitaires en langue arabe et en affaires internationales à l'Université d'Édimbourg. Fasciné par la beauté et l'élancement des lettres de la calligraphie arabe, il s'est initié à cet art à Damas, où il se trouvait dans le cadre d'un échange universitaire. De retour en Écosse, il n'a pas arrêté ses exercices d'entraînement. Arrivé à Beyrouth, il poursuit son apprentissage de la langue et de son nouveau dada, la calligraphie arabe. Parmi les différents styles de cet art vieux de 1 400 ans, il privilégie le Diwani Jali. Le Diwani est une écriture développée au XVe siècle, fortement cursive (à l'excès diraient certains), et dont les lettres sont dénuées de points et liées inhabituellement ensemble. C'est le style d'écriture utilisée par le divan, l'administration ottomane.
Élaboré à partir de ce style et durant la même époque, le Diwani Jali est caractérisé par des ornements abondants et des procédés décoratifs variés qui n'ont pas nécessairement de valeur orthographique. L'ensemble se présente comme une masse solide et structurée, formant des rectangles droits ou légèrement courbes, ou bien d'autres configurations géométriques.
Everitte Barbee compose, telle une mosaïque puzzle, des figures diverses à partir de mots, de phrases, de poèmes, de versets du Coran. Les noms sont écrits en utilisant un dérivé du Diwani Jali, un style lyrique et souple. Les mots devenus des formes font des spirales, partent en volutes, s'organisent en carrés, losanges, rectangles. Mais ils « dessinent » également des silhouettes, des portraits, une girafe, la statue de la Liberté, des cartes géographiques... dont celle de la Palestine, formée des noms des villages existant avant l'occupation israélienne. Parmi les plus belles œuvres exposées à Alt City jusqu'à fin juillet, ce portrait d'une fille à bicyclette intitulé Girls 'round here don't ride bikes. La légende indique qu'il s'agit de « Wadjda », la petite Saoudienne du film éponyme de Haïfa al-Mansour, cette gamine qui voulait un vélo à tout prix, devenue symbole de la persévérance dans un milieu hostile.
On l'aura compris, il faut s'approcher, s'attarder, déchiffrer les lettres, pour comprendre le véritable sens de l'œuvre, au-delà de son esthétique, par ailleurs impressionnante. Le texte qui compose la girafe par exemple dit : « La Syrie a autant besoin de sanctions économiques qu'une girafe a besoin d'une infection à la gorge. » Celui du V de la victoire multiplie « american foreign policy » sur fond de mots divers comme Afganistan, arabe, communauté, Iran, Irak, islam, Mexico, étrangers, natifs, les pauvres, la vérité...
Parfois, les textes sont moins pernicieux. Pour John Travolta et Samuel L. Jackson dans une scène tirée de Pulp Fiction, le texte représente la tirade de Jackson qui récite Ezéchiel 25, verset 10 : « La marche des vertueux est semée d'obstacles qui sont les entreprises égoïstes que fait sans fin surgir l'œuvre du Malin... »
Par ailleurs, l'œuvre picturale peut se révéler carrément bénigne : les mots de la chanson With a little help from my friends composent le portrait du groupe qui l'a rendue célèbre, les Beatles. Sans arrière-pensée ni pique ironique.
Le jeune artiste, qui ne cache pas son jeu, présente ainsi son travail : « La calligraphie arabe avec une certaine arrogance, ignorance et décadence à l'américaine », écrit-il sur son blog (everitt.org).

*Hamra, rue principale, imm. Montréal, 1er étage.

De la poésie, mais aussi de la politique et de la religion. Les calligraphies d'Everitte Barbee sont à l'image de Beyrouth, ville dans laquelle il s'est installé il y a un peu plus de trois ans. Un mélange de culture pop, de slogans politiques, de religion, d'Orient et d'Occident. Everitte Barbee est un jeune Américain de 25 ans. Né à Nashville, dans le Tennessee, il vit au Liban depuis...

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