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Liban - En dents de scie

Nader Ghazal dort très bien la nuit, merci

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Depuis la seconde moitié des années 70, les Libanais le savent mieux que les autres : rien n'est plus monstrueux qu'un attentat, que ce soit une voiture piégée, une benne à ordure piégée, un bâtiment piégé, un kamikaze piégé, peu importe ; rien n'est plus monstrueux que cette faucheuse qui s'en vient faire son shopping sans prévenir, juste pour quelques secondes ; rien n'est plus monstrueux que ces microsecondes justement, cette terreur dans les yeux de celles et ceux qui se trouvent dans le périmètre visé, civils ou militaires ; rien n'est plus monstrueux, pour les survivants, que ces minutes post-explosion, on dirait des années, des décennies, cette recherche de l'autre, de l'aimé, et puis cette prise de conscience, foudroyante : j'ai survécu, mais qu'est-ce que je vais faire d'ici jusqu'au prochain attentat...; rien n'est plus monstrueux que cet arbitraire contre lequel, depuis quelques jours, les forces de sécurité libanaises, dans un stakhanovisme inédit mais bienvenu, se surmobilisent, plus ou moins efficacement.
Rien n'est plus monstrueux que tout cela, sauf ce qui se passe depuis quelques jours à Tripoli. Sacrée, pugnace et fière Tripoli. Elle aura tout connu. Le comte croisé Raymond IV de Toulouse, le sultan mamelouk Qalaoun et l'inénarrable icône palestinienne Yasser Arafat l'ont harcelée comme rarement. Les différents gouvernements libanais post-indépendance l'ont souvent oubliée. Même Oscar Niemeyer l'a, on le dit, adorée puis haïe. Les Assad et le Hezbollah ont toujours rêvé de la vampiriser. Les fondamentalistes sunnites de tous poils ne cesseront jamais de vouloir l'anschlusser. Et manipulés ou pas, Bab el-Tebbané et Jabal Mohsen se haïront sans doute pour l'éternité, pour la sale postérité.
Rien n'est plus monstrueux que ces attentats, sauf cette talibanisation galopante de la capitale du Liban-Nord. Ces grenades et ces engins explosifs jetés contre des commerces qui ont osé transgresser le jeûne du ramadan et servi de la nourriture. Cette daechisation qui risque non seulement de finir de déchristianiser la ville, mais de transformer très vite ce kaléidoscope social, culturel et communautaire en un immense Raqqa. Rien n'est plus monstrueux que tout cela, sauf la décision, honteuse, véritablement insensée, de Nader Ghazal.
Il n'y a même pas quelques jours, dans ces mêmes colonnes, l'on se demandait quelles vipères avaient bien pu piquer ce jeune président de la municipalité de Tripoli, homme de modération sur le papier, propulsé à ce poste par des hommes eux-mêmes éclairés, jusqu'à nouvel ordre. Il n'y a même pas quelques jours, l'on mettait en garde contre cette criminelle et stupide volonté d'anamorphoser le Liban en Arabie saoudite ou en Iran, cette facilité à s'essuyer les pieds sur une Constitution, une charte, quels que soient les prétextes ou les explications. En interdisant par décret municipal tout manger et tout boire durant le jeûne du ramadan, en dynamitant un des rares principes républicains libanais encore sauf, Nader Ghazal s'est fait, probablement involontairement mais le résultat est le même, le complice des attentats de ces derniers jours, qui ont blessé plusieurs commerçants et qui sont nécessairement amenés à se répéter et se répéter.
Que Nader Ghazal se rétracte et annule son décret est nécessaire. Mais pas suffisant. Un geste fort, un geste ample, un geste exemple au niveau tripolitain, mais aussi national, est indispensable et urgent. Politiquement. Éthiquement, surtout. Sachant qu'il est impossible de demander quoi que ce soit désormais aux Tripolitains, éreintés et littéralement ruinés, psychologiquement, il est indispensable et urgent que les sunnites Nagib Mikati, Mohammad Safadi, Ahmad Karamé, Mohammad Kabbara et Samir el-Jisr, le maronite Samer Saadé, le grec-orthodoxe Robert Fadel et le alaouite Badr Wannous, c'est-à-dire les huit députés de la ville, ainsi que le ministre Achraf Rifi, Omar et Fayçal Karamé, Misbah Ahdab, l'excellent mufti, cheikh Malek el-Chaar, mais aussi Mgr Ephrem Kyriakos et Mgr Georges Abou Jaoudé montent à tous les créneaux et aillent, à leur manière, avec ou sans caméras de télévision, avec ou sans selfies, soutenir chaque commerçant et chaque consommateur tripolitains, chrétiens, juifs, bouddhistes ou musulmans soient-ils.
Parce que le troisième attentat de ce genre sera réellement l'attentat de trop.

P.-S. : et pendant ce temps, au Maroc, le roi Mohammad VI prenait une décision férocement historique : empêcher tout homme de religion de se mêler de près ou de loin de politique. Splendide.

Depuis la seconde moitié des années 70, les Libanais le savent mieux que les autres : rien n'est plus monstrueux qu'un attentat, que ce soit une voiture piégée, une benne à ordure piégée, un bâtiment piégé, un kamikaze piégé, peu importe ; rien n'est plus monstrueux que cette faucheuse qui s'en vient faire son shopping sans prévenir, juste pour quelques secondes ; rien...

commentaires (4)

Quand on renversera les tiroirs de la commodînâh à pieds bots, qu’en sortira-t-il de bon ? Car, avec ces Takfiristes chïïto-sunnitiques, tout se déglingue à fond. Ils ont égaré les codes et les modes…. d’emploi. Aucun d’eux n’a de vision Saine de ce pays, et ils sont non seulement irrationnels mais pervertis. Leurs viles et vaines tentatives se caractérisent par le découragement de ce Pays. Et que ce qui reste à espérer, ce sont des pauses pour respirer un peu et des attelles pour empêcher sa dislocation. Hélas, Rien de plus ! Il en résulte que la prévision est chose aisée dans ce patelin. Hier on pouvait prophétiser, et on ne s’en est pas privé, que la phase de création de ce bled serait aussi éprouvante à vivre que celle consacrée à sa non-évolution. Now, on peut sans trop de risque, augurer que cet "avatar national" ne pourra éviter de se quereller sur tout ou sur n’importe quoi. De se chercher des poux dans les petites et/ou grosses têtes idem, de ses indigènes. Des poux confessionnels. De vrais poux. Sous l’œil impavide du fakkîh Noirci avec tout son embonpoint et de l’autre Assîr, yîîîh, anorexique qui compteront, eux, à l’aise les points. Avant même le lever de rideau, les bisbilles avaient déjà commencé avec cette mesquinerie à propos de cette opportunité d’avoir un président encore chrétien. Et maintenant, les dossards sont bien visibles sur les bikinis : musulma(e)ns(t) vs chréti(e)ns, chïïtes vs sunnites et boSSfàRiens Malsains vs chrétiens Sains…. assez Niais !

ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

12 h 51, le 05 juillet 2014

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Commentaires (4)

  • Quand on renversera les tiroirs de la commodînâh à pieds bots, qu’en sortira-t-il de bon ? Car, avec ces Takfiristes chïïto-sunnitiques, tout se déglingue à fond. Ils ont égaré les codes et les modes…. d’emploi. Aucun d’eux n’a de vision Saine de ce pays, et ils sont non seulement irrationnels mais pervertis. Leurs viles et vaines tentatives se caractérisent par le découragement de ce Pays. Et que ce qui reste à espérer, ce sont des pauses pour respirer un peu et des attelles pour empêcher sa dislocation. Hélas, Rien de plus ! Il en résulte que la prévision est chose aisée dans ce patelin. Hier on pouvait prophétiser, et on ne s’en est pas privé, que la phase de création de ce bled serait aussi éprouvante à vivre que celle consacrée à sa non-évolution. Now, on peut sans trop de risque, augurer que cet "avatar national" ne pourra éviter de se quereller sur tout ou sur n’importe quoi. De se chercher des poux dans les petites et/ou grosses têtes idem, de ses indigènes. Des poux confessionnels. De vrais poux. Sous l’œil impavide du fakkîh Noirci avec tout son embonpoint et de l’autre Assîr, yîîîh, anorexique qui compteront, eux, à l’aise les points. Avant même le lever de rideau, les bisbilles avaient déjà commencé avec cette mesquinerie à propos de cette opportunité d’avoir un président encore chrétien. Et maintenant, les dossards sont bien visibles sur les bikinis : musulma(e)ns(t) vs chréti(e)ns, chïïtes vs sunnites et boSSfàRiens Malsains vs chrétiens Sains…. assez Niais !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    12 h 51, le 05 juillet 2014

  • Avec tout le respect que je vous dois Mr Makhoul, Je trouve franchement cet article de trop et mal place en cette periode ou le feu couve sous les cendres dans un pays ou les diviseurs ne cessent de chomer ..... A quoi cela peut il servir aujourd hui de reciter encore la fameuse fable de LAFONTAINE des animaux malades de la peste et crier Tout Haut HAROT SUR LE BAUDET .....Ne tentons pas de cacher nos incompetances et tenter de trouver le BOUC EMISSAIRE , cela ne sert a rien ... Attaquons nous aux problemes de Fond ... Tentons de trouver des solutions aux problemes existants qui font partis de notre quotidien .... Le Docteur Nader Ghazal est un etre remarquable , il se retrouvait a certains moments tout seul dans la gestion d une ville blessee A mort lors des derniers evenements dans une ville qui faillit perdre sa derniere goutte de son sang .... Docteur GHazal en toute connaissance de cause voyant venir les choses a souhaite proteger sa ville de certaines mauvaises interpretations extremistes .... Il n a fait que son devoir moral , rappeler sans aucune obligation, certaines regles du VIVRE ENSEMBLE DANS LE RESPECT MUTUEL D AUTRUI .... Ne Vaut il Pas Mieux Prevenir que guerir .... Tripoli a deja eu son lot de misere .... LAISSONS LA VIVRE ...

    Menassa Antoine

    12 h 21, le 05 juillet 2014

  • Mais qu'est-ce que cette République sans Procureur général qui intervienne contre la moindre violation de la Constitution par les Nader Ghazal de tous les coins ? Le Sud, une province de la République des mollahs d'Iran où les magasins qui vendent des boissons alcoolisées sont dynamités depuis x temps et "3ala 3aynak ya tajer" ?! Le Nord, en réplique, un émirat du Califat de Daech ?! Et le centre, réduit à une arène de disputes éternelles entre des chefs chrétiens irresponsables ?! C'est cela que l'on veut que soit ce pays, "modèle de modération, de progrès et de liberté" ? Comment le peuple de ce pays peut-il supporter toute cette ....... ?

    Halim Abou Chacra

    05 h 00, le 05 juillet 2014

  • "Empêcher tout homme de religion de se mêler de près ou de loin de politique. Splendide." ! Il fallait commencer par ça, au lieu de le laisser pour la fin.

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    02 h 43, le 05 juillet 2014

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