De toutes les épices, la cannelle, dont le nom vient de canne, « tuyau », forme que prennent les « bâtons » d'écorce de cannelle en séchant, est la plus ancienne et l'une des plus répandues durant l'Antiquité. Elle figure dans les anciens écrits chinois sanskrits et égyptiens, de même que dans la Bible où elle est mentionnée plusieurs fois sous le nom de kinamon. Les marchands donnèrent à cette écorce le nom de Cina-momum, car ces deux mots signifient « bois de la Chine qui sent bon ». En effet, les Chinois, qui en faisaient grand usage, cultivaient déjà une espèce de cannelier 2 500 ans avant notre ère. Chez les Égyptiens, elle entre dans la composition des produits qui servent à l'embaumement. Des hiéroglyphes de la XVIIe dynastie (1500 avant J.-C.) racontent que la cannelle arrivait par bateau de Somalie en Égypte avec l'encens et la myrrhe. Avec les métaux précieux, les bijoux et les étoffes fines, la cannelle, considérée alors comme aussi précieuse que l'or, emprunta la Route de la soie et des épices depuis l'Inde et la Chine jusqu'en Mésopotamie, puis vers Rome et les grandes villes de la Grèce antique. En 65, dans un accès de rage, Néron tue d'un coup de pied dans le ventre sa femme Poppée, alors enceinte. Par la suite, à sa mémoire, pour chaque anniversaire de sa mort, il fait brûler toutes les réserves de cannelle de Rome.
Hérodote, en 450 avant J.-C., distinguait la « vraie » cannelle qui provenait du Sri Lanka, de la « fausse » qui provenait de Chine. Car la meilleure cannelle du monde provient en effet du Sri Lanka et a fait la richesse et en partie la notoriété de cette île ! Les Portugais furent les premiers à contourner l'Afrique et s'implantèrent au Sri Lanka qu'ils nommèrent alors Ceilão. Un siècle plus tard, ce fut au tour des Hollandais de s'emparer de l'île de Ceylan, qui y développèrent la culture de canneliers jusqu'alors sauvages. Les jardins de canneliers se multiplièrent sur l'île. Enfin, en 1796, le Sri Lanka devint province de l'Empire britannique, et l'on comptait alors pas moins de 15 000 hectares de cultures de cannelle principalement situées à l'ouest de l'île et sur sa ceinture côtière ! Seule la caste de Salagama avait le droit de cultiver et d'élaborer la cannelle, tout ceux qui osaient la cultiver (autre que cette caste) étaient punis de mort.
La cannelle de Ceylan provient du cannelier (Cinnamomum ceylanicum), petit arbre appartenant à la famille des lauriers. Ses feuilles persistantes sont ovales, d'un vert brillant, tandis que ses fleurs blanches forment de petites grappes. Mais c'est avant tout son écorce qui fait l'objet de tous les désirs : épaisse et irrégulière, c'est elle qui détient le précieux arôme. La cannelle telle que nous la connaissons provient de l'écorce interne du cannelier. On effeuille les rameaux, et une fois dépouillée de son épiderme, l'écorce est incisée et fendue sur la longueur pour en détacher une mince pellicule. Ces copeaux fragiles s'incurvent à la chaleur, s'enroulant sur eux-mêmes, et forment de fins bâtonnets. Son odeur et sa saveur sont à la fois épicées, sucrées et légèrement piquantes. Le médecin grec du premier siècle Pedanios Dioscoride, dans son traité Sur la matière médicale contenant la description de plusieurs centaines de plantes médicinales, dit : « La cannelle tonifie, active la digestion, est diurétique, est un contrepoison et un antivenin. » D'où son intérêt...
Hérodote (484-425 avant J.-C.) raconte que les marchands arabes rapportent cette histoire : des oiseaux énormes et sanguinaires bâtissent leurs nids sur des à-pics vertigineux au fin fond de l'Arabie. Ils confectionnent ces nids exclusivement avec de la cannelle qui ne pousse que sur ces falaises inaccessibles. Pour récupérer cette cannelle, le seul moyen que les commerçants arabes aient trouvé consiste à lancer des quartiers de viande de singe pour que les oiseaux insatiables les entassent dans leurs nids. Au bout de quelque temps, les nids, surchargés, s'effondrent. Les téméraires marchands ramassent le peu de cannelle tombé au pied de la falaise, au péril de leur vie, car les oiseaux, malgré le festin, veillent...
Sources principales :
srilanka-cinnamon dentelles
natureetdécouverte.com
gralon.net
