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Droits d’auteurs

Primauté de l'État et refus de tout État dans l'État, indépendance et souveraineté, liberté et démocratie, unité nationale, nécessité d'honorer l'échéance présidentielle, nécessité encore plus impérieuse d'assurer l'élection d'un président fort, et on en oublie. D'une brûlante actualité étaient les discours prononcés hier, lors de la célébration du neuvième anniversaire du 14 mars. Encore plus angoissant cependant que les thèmes purement politiques était celui, fort opportunément développé au demeurant par le député Samy Gemayel, d'une société mise en péril par les abus miliciens, dont le moindre n'est pas l'engagement actif du Hezbollah dans la guerre de Syrie.


Car c'est en réalité aux citoyens, bien davantage qu'aux leaders et partis politiques, que revient la paternité de ce 14 mars de 2005 qui vit des centaines de milliers de Libanais envahir spontanément la place publique pour dénoncer l'assassinat politique et réclamer le départ de l'occupant syrien. Ce sont les gens ordinaires qui, de leurs clameurs, ont fait ce jour-là l'évènement. Et ce sont encore eux qui, près d'une décennie plus tard, continuent de croire, bien que silencieusement, en un avenir meilleur en dépit des erreurs, paris malheureux ou concessions démesurées imputables au rassemblement qui s'est donné pour nom cette même et impérissable date.


Héroïques certes sont ces hommes politiques restés inébranlablement fidèles à leurs principes, bien qu'ouvertement visés par la main du crime, et qui, à chaque anniversaire ou presque, doivent saluer la mémoire d'un nouveau venu dans le cortège déjà long des martyrs de l'indépendance. Non moins héroïque toutefois est un peuple qui s'accroche à un semblant de normalité dans le chaos ambiant, qui est lui aussi visé par les attentats terroristes à la bombe, qui sue sang et eau pour assurer sa subsistance, qui s'acquitte docilement de l'impôt alors que les hommes en armes se livrent impunément à toutes sortes de trafics et qui assiste impuissant à l'exode de ses jeunes.


Par-delà les classiques querelles sur le partage du pouvoir, c'est bien le sort de la société libanaise qui est actuellement en jeu, et l'interminable débat sur le programme gouvernemental en est l'illustration. Ce sont en effet deux logiques parfaitement inconciliables, celle de l'État et du non-État, avec tous les effets qu'impliquent l'une et l'autre pour nous, communs des mortels, que l'on s'efforçait, hier encore, de faire cohabiter dans un même texte. La logique de l'État, c'est celle du monopole de la sécurité publique, à l'intérieur du pays comme à la frontière, à laquelle s'opposent évidemment ceux qui, au fallacieux prétexte de résistance à Israël, s'acharnent à saper les institutions. La logique de l'État, c'est un ministre de la Justice qui fait rougir de honte ses prédécesseurs en refusant de laisser dormir plus longtemps dans un tiroir le cas d'un citoyen enlevé il y a cinq ans et dont les ravisseurs sont connus. C'est ce même ministre déniant à Bachar el-Assad le droit de tracer le profil du prochain président du Liban. C'est aussi un ministre de l'Intérieur qui, au Conseil de la Ligue arabe, déplore les ingérences iraniennes dans nos affaires, quitte à se faire frileusement désavouer par les hautes autorités.


C'est au finish, et non sans de multiples réserves, qu'était adoptée hier soir une formule pseudo-magique reconnaissant aux citoyens libanais le droit de résister à l'occupation israélienne. Ce n'est là pourtant qu'un faux miracle : face à d'aussi énormes enjeux, tous les prodiges de la phraséologie ne pourront jamais faire illusion.


Issa GORAIEB

igor@lorient-lejour.com.lb

 

Primauté de l'État et refus de tout État dans l'État, indépendance et souveraineté, liberté et démocratie, unité nationale, nécessité d'honorer l'échéance présidentielle, nécessité encore plus impérieuse d'assurer l'élection d'un président fort, et on en oublie. D'une brûlante actualité étaient les discours prononcés hier, lors de la célébration du neuvième anniversaire...