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Liban - Liban

Dans les coulisses de la brigade cynophile des FSI

Tous les jours, ils sont une soixantaine d'agents de police à parcourir le territoire libanais à la recherche d'explosifs et de drogue principalement. Une tâche qu'ils effectuent en étroite collaboration avec leurs compagnons chiens.

La création d’une brigade canine suppose un engagement financier de la part des FSI, mais aussi de la part des maîtres-chiens qui doivent entretenir les niches et entraîner leur chien au quotidien.

L'aile sud de la prison de Roumieh comprend des pensionnaires pour le peu inhabituels. Dans leurs cellules, derrière les grillages, certains dorment, d'autres guettent et d'autres encore s'agitent et grognent. Leur point commun : quatre pattes et un sens de l'odorat extrêmement développé. Depuis 1997, Roumieh abrite le quartier général de la brigade cynophile des Forces de sécurité intérieure (FSI).


Un espace de 2000m² délimité par une grande cloison est entièrement consacré à l'entraînement et l'entretien des quelque cinquante-sept chiens dont disposent les agents de police afin de protéger le territoire libanais d'attentats, lutter contre le trafic de drogue et effectuer des opérations de sauvetage. Des bergers belges malinois, mais aussi quelques labradors, mettent au quotidien leur museau au travail dans la recherche d'explosifs, de stupéfiants et de personnes disparues ou en fuite.


« Nous avons un emploi du temps très chargé, explique le colonel Farès Hanna, chef et fondateur du centre cynophile des FSI. Nous effectuons en moyenne trente missions par jour, dont dix-sept de routine. Les chiens inspectent les bâtiments sensibles tels que l'administration générale des FSI, le ministère de l'Intérieur, le Palais de justice. Le vendredi, par exemple, nous faisons une tournée autour des mosquées à la recherche d'éventuelles voitures piégées. »


À l'aéroport Rafic Hariri, une petite équipe scrute soigneusement les véhicules 24 heures sur 24. Une autre patrouille est déployée dans la Békaa pour intercepter le trafic de haschisch, de cocaïne et d'héroïne. Sur la totalité, quarante chiens sont spécialisés dans la recherche d'explosifs, dix dans le décèlement de stupéfiants, quatre sont dressés au sauvetage en cas de catastrophe et trois sont utilisés pour le dépistage, la recherche de personnes en fuite ou la distinction de suspects. Neuf autres chiens sont actuellement en formation.

 

Un odorat surdéveloppé
Au centre de Roumieh, l'heure est à l'entraînement. Le colonel Hanna dissimule délicatement un échantillon de C4, une variété d'explosif plastique, au-dessus de la roue avant d'une voiture. En attendant, un des agents de police enfile à Falco, son berger belge mâle, un harnais noir. « Lorsqu'il le porte, le chien comprend qu'il n'est plus au repos mais au travail », explique-t-il. C'est alors que commence la chasse. Falco renifle tous les recoins de la voiture et ses alentours avec enthousiasme, sous les encouragements constants de son maître. « La façon dont le maître-chien s'adresse à son auxiliaire canin est déterminante, souligne le colonel. Il doit lui transmettre beaucoup d'enthousiasme pour lui donner envie de trouver l'objet recherché. La clé du dressage est dans le jeu : l'agent et le chien jouent à trouver une odeur familière. » Tout à coup, Falco s'arrête devant la roue et se met à terre sans aboyer. Un geste que le maître-chien interprète comme le signe d'une trouvaille. Falco est alors immédiatement récompensé par une balle de tennis ou un boudin à mordiller.


Mais c'est principalement dans la recherche de stupéfiants que l'unité canine des FSI se distingue sur le terrain avec plus de cinquante saisies depuis sa création. En décembre 2009, les chiens policiers ont déniché 250 kg de haschisch enterrés à un mètre de profondeur dans une ferme à Laat, dans la Békaa. Avec 225 millions de cellules olfactives, soit quarante-cinq fois plus que l'homme, les canidés ne mettent que quelques minutes à déceler une personne ou un véhicule suspect.

 

Investir dans la filiale
Aujourd'hui plus que jamais, l'escalade de violence que traverse le Liban dans son intégralité met sur la table la question du développement de la filiale cynophile dans le pays. La récente découverte par l'armée de voitures piégées à Mazraa et à Laboué, toutes deux chargées de plus de 100 kg d'explosifs, souligne le besoin d'investir dans la prévention comme arme contre l'insécurité. Contre ce qu'il appelle « le fléau terroriste », le colonel Farès Hanna préconise « la technologie la plus efficace et la plus fiable qui existe » : le flair canin. Dans cette optique, la police judiciaire se penche sur la création de nouveaux centres. En plus des deux centres permanents existants, à Roumieh et dans le Akkar, un troisième devrait voir le jour à Zahlé.
Mais, les conditions sont-elles réunies ? En France, la police nationale rappelle que, chaque année, son Centre national de formation des unités cynotechniques (CNFUC) forme une cinquantaine de chiens de recherche et environ 130 agents de police. Un chiffre que les FSI libanaises ont mis dix-sept ans à atteindre. Bien que la superficie et la population françaises soient largement supérieures à celles du Liban, le nombre d'attentats et d'enlèvements est incomparable entre les deux pays. D'où la nécessité de se donner plus de moyens de combattre le climat d'insécurité qui règne au pays du Cèdre.


Et pourtant, créer et entretenir une brigade canine n'est ni facile ni bon marché. Outre les dépenses liées au matériel et à l'armement propre aux FSI, il faut compter un budget spécifique pour les agents à quatre pattes. « Sans compter le prix d'achat d'un chien, lorsqu'un d'eux part à la retraite, ce qui correspond à 2600 dollars. 225 dollars par an et par chien sont en outre consacrés aux frais vétérinaires et environ 730 dollars à l'alimentation, explique celui qui, en 1997, a créé l'unité avec seulement huit auxiliaires canins. Cela suppose un engagement financier, de la part des FSI, mais aussi personnel, de la part des maîtres-chiens qui doivent, eux, entretenir les niches et entraîner leur chien au quotidien. »

 

Un centre d'odorologie
Le but à présent consiste à débloquer des fonds pour financer la mise en place d'un pôle scientifique à l'intérieur de la brigade. Il s'agirait de la doter d'un laboratoire d'odorologie, une technique permettant de confondre des criminels en soumettant au flair des chiens un indice ou échantillon présent sur la scène du crime. « Mais, pour cela, nous avons besoin d'un financement », soupire le colonel Farès Hanna.
La lente émergence de l'unité cynophile au Liban s'explique aussi par le regard que porte la société sur nos compagnons canins. « Ici les mentalités sont différentes de ce que l'on voit en Europe ou en Amérique. Nous avons souvent du mal à recruter des agents car beaucoup de gens n'aiment pas les chiens et ceux-ci sont souvent rejetés. » Un constat difficile à croire dans cette énorme aire de jeux que constitue l'aile sud de la prison de Roumieh.

 

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commentaires (1)

"La lente émergence de l'unité cynophile au Liban s'explique par le regard que porte la société sur ces canins. Ici les mentalités sont différentes. Nous avons du mal à recruter des agents car beaucoup de gens n'aiment pas les chiens et ceux-ci sont souvent rejetés." ! Et ils se croient en sus "supérieurs" à eux, ces Canins", ces "gens" !

ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

09 h 56, le 11 mars 2014

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Commentaires (1)

  • "La lente émergence de l'unité cynophile au Liban s'explique par le regard que porte la société sur ces canins. Ici les mentalités sont différentes. Nous avons du mal à recruter des agents car beaucoup de gens n'aiment pas les chiens et ceux-ci sont souvent rejetés." ! Et ils se croient en sus "supérieurs" à eux, ces Canins", ces "gens" !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    09 h 56, le 11 mars 2014

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