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Liban - La situation

La déclaration ministérielle rattrappée par la guerre en Syrie

La stabilité, dont le nouveau gouvernement s'est voulu le garant, a été ébranlée par une nette montée des violences aux frontières est avec la Syrie (le village de Britel visé par Daech ; Ersal essuyant les obus de l'armée syrienne).

Mais la logique affichée jusque-là par le gouvernement d'unifier les rangs face à l'ennemi commun, sioniste et takfiriste, a manqué à la septième réunion de la commission ad hoc chargée d'élaborer la déclaration ministérielle. Les échanges calmes et mesurés des ministres réunis hier pour la septième fois ont pris cette fois-ci un ton grave. Et pour cause, c'est toute la question de la résistance qui devait être débattue, à l'heure où le président de la République faisait l'annonce solennelle d'un nouveau triptyque, celui du peuple, de l'État et des valeurs, et hissait la déclaration de Baabda au rang de « constante et de fondement du pacte national ».

Le chef de l'État a ainsi voulu souligner que la déclaration de Baabda transcende les débats sémantiques, qui diluent les constantes, et les documents de nature circonstancielle, comme la déclaration ministérielle. Mais en posant la déclaration de Baabda au-delà de ce débat, il aurait en même temps veillé à ne pas en entraver le déroulement au sein de la commission chargée de la réaction du programme du gouvernement, quel qu'en soit le résultat. D'autant que les différentes parties au sein du cabinet ont décidé, vaille que vaille, de renoncer au triptyque armée-peuple-résistance. Ceci n'a pas empêché cette commission de se heurter à la question de savoir s'il faut insérer ou non, dans le document final, le terme de résistance.

(Lire aussi : Sleiman porte le coup de grâce à la rhétorique du Hezbollah)

L'on apprenait que la réunion d'hier au Grand Sérail avait été précédée d'une réunion entre les ministres du 14 Mars, dans le bureau de Boutros Harb. Il aurait été convenu de refuser catégoriquement l'insertion du terme « résistance » dans la déclaration ministérielle, à moins d'une entente sur une formule qui placerait cette résistance « sous l'autorité de l'État ».

Jusque-là, les ministres du 14 Mars avaient tenu à mettre en valeur « l'État comme référence » tout au long du débat sur la déclaration ministérielle. Ils auraient tenu à rappeler par exemple, sous le titre des politiques publiques, que les institutions étatiques détiennent une compétence exclusive en la matière. Dans le même esprit, la formule déjà convenue par la commission ministérielle par rapport à la déclaration de Baabda devait en reprendre la teneur, sans la désigner nommément, en omettant aussi l'alinéa relatif à la politique de distanciation. Il a néanmoins été prévu, en même temps, d'évoquer ce même principe dans une clause indépendante. Formule paradoxale qui devrait toutefois conforter les principes du 14 Mars sans embarrasser le 8 Mars, et précisément le Hezbollah, impliqué en Syrie.

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Mais le débat sur la résistance s'annonce plus ardu. Les ministres du 8 Mars ont défendu hier avec intransigeance l'impératif, selon eux, d'insérer explicitement le terme de « résistance » dans le document. Ils refuseraient en même temps d'accoler à ce terme l'expression « sous l'autorité de l'État ». Les ministres du 14 Mars auraient signalé en contrepartie que le refus par le 8 Mars de mentionner la référence à l'État devait justifier une mention explicite de la déclaration de Baabda dans le document. Le Premier ministre Tammam Salam serait intervenu à ce stade de la discussion pour dire que « le débat sur la déclaration de Baabda est clos ». Dans ce bras de fer à peine contenu hier, le camp du 8 Mars aurait reproché aux ministres du 14 Mars d'avoir haussé les enchères à la suite du discours du président de la République. Les ministres du 14 Mars, eux, auraient établi un lien entre la frappe israélienne lundi contre une position du Hezbollah et l'insistance de ce dernier sur la mention explicite de la résistance, aggravée par le refus de reconnaître l'État comme référence.

Il est peu probable toutefois que ce « retour au point zéro » bloque la rédaction de la déclaration ministérielle – auquel cas le cabinet Salam se limiterait à l'expédition des affaires courantes, une situation qui favoriserait l'option d'une prorogation du mandat du chef de l'État actuel. Force est de relever toutefois des positions faisant écho à ce scénario (le député Fouad el-Saad a appuyé une prorogation de deux ans du mandat de Sleiman, tandis que le ministre Sejaan Azzi a mis en garde contre un prolongement « délibéré » du débat sur la déclaration ministérielle).

La dynamique internationale qui avait provoqué l'ouverture sur le plan interne semble apparemment déclencher un processus de blocage : la visite du président de la commission parlementaire de la Sécurité nationale et des Affaires étrangères iranien au Liban aura permis de réaffirmer explicitement le renouvellement de l'appui de Téhéran à la résistance, qui mène ses combats à Yabroud, à l'heure où la Russie, dont l'image a été ternie en Ukraine, défendrait désormais une position encore plus agressive en Syrie.

« Ce gouvernement est presque mort-né », devait souligner à ce propos en soirée le coordinateur du 14 Mars Farès Souhaid à L'Orient-Le Jour. D'ailleurs, un rapport politique, élaboré par le secrétariat du 14 Mars, est en cours d'examen par les différentes parties du mouvement, y compris le Futur et Boutros Harb. Le document devrait rappeler la cohésion du 14 Mars et revenir aux constantes qui donnent la prééminence au rôle de l'État.

 
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