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Liban - Liban

À l’AUB, « la banque de papa a fait faillite »!

Des centaines d'étudiants ont manifesté hier à l'Université américaine de Beyrouth pour protester contre une nouvelle augmentation des frais universitaires.

Les étudiants pourraient réussir à annuler l’augmentation des frais. Le budget de l’an prochain n’a pas encore été finalisé et une telle augmentation requiert la signature du vice-président du conseil estudiantin. Photo Bilal Orfali

Il fut un temps où les manifestations estudiantines étaient chose courante. Pacifiques, elles faisaient partie intégrante du paysage libanais et représentaient à elles seules l'expression libre de la démocratie au pays du Cèdre, bien avant que les manifestations populaires à caractère politique ne prennent le dessus, étouffant malheureusement le mouvement estudiantin tel qu'on le connaissait et qui réussissait souvent à changer la donne au sein des institutions académiques, et parfois du pays. En 1974, c'est ce mouvement-là qui avait « occupé » l'Université américaine de Beyrouth (AUB) pendant plus de 30 jours pour dénoncer l'augmentation des frais universitaires, avant de prendre une envergure politique de lutte contre « la droite et l'impérialisme américain ». Aujourd'hui, 40 ans plus tard, une dynamique semblable paraît s'instaurer au sein des institutions universitaires.


En effet, après les protestations à la Lebanese American University (LAU) en début d'année, des centaines d'étudiants mécontents se sont regroupés hier à l'entrée principale de l'AUB pour dénoncer à leur tour une éventuelle augmentation de 6 pour cent des frais universitaires, à partir de l'année prochaine. En face du College Hall, les jeunes, mobilisés sur Facebook, ont crié haut et fort d'une même voix : « Nous ne paierons pas ! », arborant des pancartes sur lesquelles on pouvait lire « Nous ne sommes pas une machine de distribution de billets bancaires », « la banque de papa a fait faillite », ou encore « l'Université américaine de la Bourgeoisie ».
« Ils ont déjà augmenté les tarifs de 6 pour cent en début d'année, dénonce un étudiant en gestion. Allons-nous nous taire chaque année ? »
« Nous ne comprenons pas où va tout cet argent, nous avons besoin de plus de transparence », clame son camarade, affichant une pancarte sur laquelle on pouvait lire : « Afin que les hommes aient de l'argent, de l'argent en abondance », une déformation du slogan de l'AUB, « afin que les hommes aient la vie, une vie abondante ».
« Je paie déjà 20 000 dollars par an pour ma licence en psychologie, qui ne me servira pas à grand-chose en tout cas sans études supérieures, souligne une étudiante. Les frais universitaires sont devenus injustifiables ! »

 

Un accord pour trois ans
Il y a quatre ans, suite à de vives protestations, un accord avait été conclu entre les étudiants et l'administration qui avait accepté de ne pas augmenter les frais de plus de 4 pour cent pour une durée de trois ans. Au terme de cette « période de trêve », les frais avaient été augmentés de 6 pour cent au début de cette année. Et la semaine dernière, le comité des étudiants, responsable des frais universitaires, s'est réuni avec l'administration « pour découvrir que cette dernière envisageait une nouvelle augmentation de 6 pour cent l'an prochain sans avoir pris l'avis des étudiants sur la question », selon les protestataires.


Le comité des étudiants a alors réclamé « une participation directe dans la gestion des finances de l'université » et le président de l'AUB, Peter Dorman, s'est empressé de publier une lettre adressée aux étudiants dans laquelle il explique que « l'AUB a toujours offert une expérience académique exceptionnelle malgré la situation de la région, qui nous impose de nombreux défis, et les ressources limitées ». « Nous sommes aussi une université qui a souffert de sous-investissement durant les années de guerre civile et nous avons œuvré pour restaurer l'université pendant de longues années », ajoute le texte de M. Dorman.
« Ces excuses ne sont pas valables, martelait hier Lori, étudiante en architecture. Ce n'est pas notre problème si l'université était endettée ou a souffert de la guerre, et nous ne sommes pas non plus censés payer les dépenses du staff médical de l'Hôpital américain de Beyrouth ! » « Nous n'avons même pas un parking convenable », lançait, pour sa part, un étudiant en génie.


À la rue Bliss, à l'entrée de l'AUB, des étudiants de la LAU manifestent plus timidement en solidarité avec leurs camarades. D'autres étudiants de l'AUB vaquent à leurs occupations ou se précipitent vers leurs classes, malgré le fait que de nombreux professeurs ont suspendu leurs cours, peut-être en solidarité avec les jeunes. Près du groupe protestataire, Talal Nizameddine, doyen des étudiants, suit la scène avec intérêt. « Nous respectons la liberté d'expression et les moyens pacifiques de faire parvenir un message, souligne-t-il. Et nous ne pouvons rien dire à nos étudiants quand ils affirment qu'ils ne peuvent tout simplement plus payer davantage. Mais nous sommes une institution privée qui est très coûteuse et nous avons besoin de ressources pour notre immense budget. Nos principales ressources sont les frais universitaires. La situation est par ailleurs difficile et nous ne savons pas si nous continuerons à recevoir des donations comme auparavant. Une université doit prévoir, planifier, faire des réserves. Tout est ravagé par l'inflation.

L'augmentation est tôt ou tard inévitable, surtout que 50 à 70 pour cent des étudiants reçoivent des aides financières, qui ont atteint la somme de 25 millions de dollars cette année seulement. En augmentant les tarifs, nous soutirons plus d'argent de nos étudiants pour aider d'autres moins aisés. Et nous sommes aujourd'hui face à un vrai challenge : Comment satisfaire tout le monde en sauvegardant la qualité de notre éducation ? »

 

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commentaires (2)

ET CELLE DE MAMA... TRAVAILLE TOUJOURS ?

LA LIBRE EXPRESSION

16 h 20, le 01 mars 2014

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Commentaires (2)

  • ET CELLE DE MAMA... TRAVAILLE TOUJOURS ?

    LA LIBRE EXPRESSION

    16 h 20, le 01 mars 2014

  • Tout est ravagé par l'inflation résume en effet l’état du pays ou on a toujours des ministres à la place qu’ il ne faut pas pour gérer correctement le pays .

    Sabbagha Antoine

    17 h 18, le 28 février 2014

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