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Liban - Opinion

Ils n’assassinent que les meilleurs !

Il y a quarante jours exactement, Mohammad Chatah était lâchement assassiné dans ce qu'il appelait « the buble» (la bulle), ce qui restait de ce pauvre Liban en lambeaux et en chute libre dans les abysses de l'enfer de ce Moyen-Orient tourmenté.
Comment rendre hommage à cet homme d'exception ? !
Mon ami, Mohammad ! Tu n'étais pas seulement cet intellectuel « modéré » à propos duquel d'aucuns s'interrogent : "Mais pourquoi l'a-t-on assassiné ?". Réponse : « Ils savent choisir ; ils n'assassinent que les meilleurs ! »
Il est vrai que tu n'étais pas le décideur ni au sein du courant du Futur ni au sein du 14 Mars. Mais il est indéniable que tu jouais un rôle plus que principal dans l'élaboration de la décision, en raison de tes aptitudes exceptionnelles dans l'analyse objective et réaliste de la situation politique, la prévision du futur, la conception des solutions et leurs plans d'exécution.
Tu n'étais pas non plus le tacticien opportuniste ni le manœuvrier de petit acabit. Tu étais ferme sur les principes et souple dans l'application.
Tu n'étais pas avide de pouvoir, quoique tu ne refusais pas des postes qui pouvaient booster ton influence sur le cours des évènements.
Tu pratiquais la politique nationale, à l'opposé de la politique politicienne (lutte pour le pouvoir). Tu percevais le fait que le Liban était en danger existentiel ! Mais tu n'étais pas fataliste, à l'instar de certains ! C'est pourquoi ce que tu proposais ne servait que l'intérêt du Liban !
Tu excellais en théorie et en praxis. Ta vision était stratégique, mais tu savais aussi la mettre en œuvre pratiquement.
Tu étais créatif dans ce sens que tu élaborais des initiatives dont tu suivais scrupuleusement l'application.
Le réseau de relations que tu avais tissées au niveau mondial, ta crédibilité auprès des décideurs internationaux te donnaient la latitude de tenter d'infléchir les politiques des États en faveur du Liban.
Tu ne manquais pas de critiquer ouvertement des politiques internationales qui te paraissaient contraires au bon sens politique et aux intérêts du Liban. Tu proposais toujours des solutions de rechange concrètes et positives. Tu considérais, par exemple, que l'attitude de l'Occident envers l'Iran était plutôt naïve et que le véritable test pour s'assurer de l'authenticité du changement politique en Iran ne se résume pas au dossier nucléaire, mais il a trait, bien plus, à la politique régionale de ce pays, notamment dans le Golfe, en Irak, en Syrie et surtout au Liban.
Tu te plaignais de l'absence de mécanisme de prise de décision au sein du 14 Mars. Tu essayais d'y pallier en effectuant des navettes entre ses différentes composantes et en t'activant à réduire les différends internes, à défaut de pouvoir les résoudre.
Ils ne t'ont pas assassiné à cause uniquement de tes prestations dans les médias. Ils surveillaient tout : tes va-et-vient, ton téléphone, tes messages électroniques, tes e-mails... Mais, toi, tu n'avais rien à cacher. Tu étais franc, transparent, courageux, fort de la noblesse de la cause que tu défendais ! Tu as toujours refusé d'agir dans la clandestinité.
En bref, tu étais trop efficace. Tu représentais un véritable danger pour eux. Le crime étant leur ultime moyen pour imposer leur diktat, ils ont tout simplement décidé de t'éliminer !
C'est en janvier 2006 que j'avais fait ta connaissance. Saad Hariri et Fouad Siniora t'avaient désigné pour les représenter dans une négociation ultrasecrète (condition sine qua non pour qu'elle ait des chances de réussir ! ) que j'avais baptisée "Cinzano Mauve" et que j'avais initiée entre le courant du Futur et le CPL. Le but : s'entendre sur une vision globale de toutes les questions nationales et politiques en vue de colmater les brèches entre le 14 Mars et le CPL. À savoir que ce dernier avait déjà entamé ses négociations avec le Hezbollah qui déboucheront le 6 février sur ce qui sera appelé le document d'entente.
Depuis, très rapidement, nous sommes devenus des amis inséparables et des "jumeaux politiques". Notre relation personnelle et politique s'est généralisée aux membres de nos deux familles.
Il n'y avait pas que le respect mutuel dans notre relation mais aussi l'admiration mutuelle. Elle était basée sur le partage de valeurs humaines et sociales et sur la similitude de nos perceptions et approches politiques, qualifiables d'objectives, scientifiques et émanant d'une connaissance à la fois théorique et pratique.
Ce qui nous a rassemblés aussi, c'est l'amour du Liban, l'aspiration à un Liban heureux, prospère, ouvert sur le monde, libre, souverain, indépendant, démocratique, débarrassé du poids du sous-développement, de sa structure sociopolitique responsable de la contradiction entre le succès du Libanais individuellement et son échec collectivement.
J'ai toujours ressenti que notre relation était l'expression la plus véridique de ce vivre-ensemble, la base de l'existence même du Liban.
À maintes reprises, les plus belles opportunités t'ont été offertes sur un plateau d'argent. Tu as refusé de quitter ce Liban dont tu étais amoureux et dont tu es devenu le pur symbole.
Mohammad, tu ressemblais à ces érudits du Siècle des Lumières.
Tu possédais une très vaste culture qui touchait à tout : économie, politique, philosophie, physique, électronique,... tu étais capable de discourir avec précision et expertise sur n'importe quel sujet !
Tu n'étais pas un artiste. Cependant, tu appréciais l'art : la musique, la danse, le théâtre, la peinture, le cinéma, l'art culinaire...
Tu aimais la vie, ses petits et grands plaisirs. Tu la croquais à pleines dents ! Tu étais un homme heureux ! Il te suffisait de peu pour que tu sois joyeux : voyage, sortie de cinéma (avec pop-corn) suivie d'une dînette dans un gentil restaurant, excursions dans les régions du Liban, réunions entre amis autour d'une table à déjeuner ou à dîner, conversation politique et autres en assistant à un talk-show ou un documentaire sur les animaux, cartes, ping-pong, pétanque...
Tu étais amoureux de la vie! Ils te l'ont ôtée !
Quel gâchis ! Quel dommage ! Quelle perte ! Pour le Liban ! Pour le Futur ! Pour le 14 Mars ! Et surtout pour ta femme Nina, tes enfants Ranny et Omar ! Mais aussi, pour moi et pour ma femme Claude !
Mohammad, tu nous manques !

Il y a quarante jours exactement, Mohammad Chatah était lâchement assassiné dans ce qu'il appelait « the buble» (la bulle), ce qui restait de ce pauvre Liban en lambeaux et en chute libre dans les abysses de l'enfer de ce Moyen-Orient tourmenté.Comment rendre hommage à cet homme d'exception ? !Mon ami, Mohammad ! Tu n'étais pas seulement cet intellectuel « modéré » à...

commentaires (2)

IL 3ANZÉ IL JIRBÉNÉ BROÛTE L'ÉLITE DES POUSSES...

LA LIBRE EXPRESSION

16 h 56, le 07 février 2014

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Commentaires (2)

  • IL 3ANZÉ IL JIRBÉNÉ BROÛTE L'ÉLITE DES POUSSES...

    LA LIBRE EXPRESSION

    16 h 56, le 07 février 2014

  • C'est sûr qu'"ils" choisissent et "assassinent les meilleurs", qui dérangent le plus leurs plans. Mais M Hindi s'abstient de dire pour quel motif spécifique ils ont assassiné le ministre Mohammad Chatah.

    Halim Abou Chacra

    06 h 13, le 07 février 2014

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