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Liban - Sécurité

Affaire Maged : réticences libanaises à la participation d’enquêteurs étrangers

L'Iran a décidé d'envoyer « une équipe pour aider dans l'enquête sur le double attentat contre l'ambassade d'Iran à Beyrouth ».

Tout le monde à pied d’œuvre sur la scène de l’attentat à Haret Hreik. Joseph Eid/AFP

Les tests d'ADN effectués sur « l'inconnu » arrêté le 26 décembre par les services de renseignements de l'armée ont confirmé ce qui était déjà attendu : l'homme en question est le Saoudien Maged al-Maged, l'émir des Brigades Abdallah Azzam, groupe islamiste lié à el-Qaëda qui avait revendiqué le double attentat contre l'ambassade d'Iran à Beyrouth survenu le 19 novembre dernier. Un échantillon de son sang avait été confié par les autorités libanaises aux autorités saoudiennes, qui l'ont comparé à des échantillons prélevés sur ses proches. Les résultats des tests ont été confirmés par l'armée, dans un communiqué qui dément en même temps « tous les récits véhiculés dans les médias, sur des scénarios d'arrestation de Maged al-Maged ». Cette arrestation a en tout cas été qualifiée de « prouesse » par les observateurs et l'enquête qui s'ensuit « se déroule dans le secret », a rappelé le communiqué.

L'interrogatoire devrait néanmoins attendre le rétablissement de Maged al-Maged, qui se trouve actuellement à l'hôpital militaire de Baabda, où d'importantes mesures de sécurité ont été prises. Son état de santé serait « grave », selon une source médicale citée par l'AFP. Cette source, qui aurait suivi le patient de près avant même son arrestation, a affirmé qu'il « souffre d'une déficience rénale, lui imposant des dialyses régulières ».

Un autre élément, de nature politique et diplomatique, s'annonce déterminant pour la suite de l'enquête : celui des convoitises régionales sur le dossier.

La demande iranienne
D'abord, le ministre iranien des Affaires étrangères, Mohammad Jawad Zarif, a annoncé hier dans un entretien avec l'agence UPI que l'Iran a décidé d'envoyer « une équipe pour aider dans l'enquête sur le double attentat contre l'ambassade d'Iran à Beyrouth ». Selon UPI, l'équipe doit également participer à l'interrogatoire de Maged al-Maged. M. Zarif avait par ailleurs transmis, lors d'un appel à son homologue libanais Adnane Mansour, les remerciements du président iranien Hassan Rohani aux autorités libanaises pour leurs efforts et l'arrestation du principal suspect dans l'attentat contre l'ambassade d'Iran, selon l'agence iranienne IRNA.

Néanmoins, une participation iranienne à l'enquête n'est pas tranchée. Elle reste contestée par l'Arabie saoudite, comme l'a rapporté hier le quotidien al-Joumhouriya. Le principal argument invoqué serait la nationalité saoudienne de Maged al-Maged. Autrement dit, Téhéran n'est pas en mesure d'enquêter sur un ressortissant saoudien, au risque de renforcer le clivage avec Riyad, sans manquer d'embarrasser le Liban. Ce dernier vient d'accepter une donation saoudienne de trois milliards de dollars US pour le renforcement de son armée.

En contrepartie, Maged al-Maged fait partie de la liste des 80 personnes les plus dangereuses recherchées par l'Arabie saoudite. Il occupe la 69e place sur cette liste, qui comprend par ailleurs 35 autres Saoudiens. Ces considérations sous-tendent la volonté déclarée de l'Arabie de prendre part à l'enquête, « mais seulement à la demande des autorités libanaises », selon les milieux diplomatiques saoudiens.

« Maged planifiait le meurtre de Assiri »
D'ailleurs, le quotidien saoudien al-Watan a fait état de « nouvelles informations sur un attentat que planifiait Maged al-Maged contre l'ambassadeur saoudien au Liban, Ali Awad Assiri, en personne ». Le quotidien rapporte ainsi les propos de l'ambassadeur Assiri, dont la teneur serait que « Maged a attaqué le royaume d'Arabie avant de viser l'ambassade d'Iran à Beyrouth ». Le même quotidien va jusqu'à affirmer enfin que l'émir des Brigades Abdallah Azzam « a suivi des entraînements intensifs au Pakistan, et plus tard en Iran, qui avait d'ailleurs abrité des chefs d'el-Qaëda fuyant l'Afghanistan après l'intervention américaine ».
Face à ces éléments extérieurs qui s'entremêlent, les autorités libanaises tendraient vers la prise en charge exclusive du dossier de l'enquête. L'Orient-Le Jour a appris de sources ministérielles que l'annonce de la venue d'une délégation iranienne pour prendre part à l'enquête ne scellerait pas sa participation à l'investigation. La coopération policière et judiciaire entre les États est définie par des accords préalables, à défaut desquels c'est le parquet qui juge de la compétence respective des États concernés, comme l'expliquent les mêmes sources ministérielles, rappelant que le double attentat a eu lieu en territoire libanais. « Renoncer à l'enquête équivaudrait à une défaite. »

Mansour et le refus de l'extradition
D'ailleurs, le ministre sortant des Affaires étrangères Adnane Mansour n'avait-il pas lui-même déclaré que « les autorités libanaises sont en droit d'enquêter sur Maged al-Maged, de le juger et de refuser de le remettre à un autre État » ? Certes, le ministre Mansour s'opposait à une possible extradition du prévenu en Arabie saoudite (sachant que celle-ci n'a toujours pas adressé de demande officielle en ce sens), mais les propos du ministre portent les mêmes arguments à même de justifier le refus, par les autorités libanaises, de toute participation étrangère à l'enquête.
En tout cas, c'est le retour aujourd'hui du président de la République au pays qui devrait trancher la question, selon les mêmes sources ministérielles. De quoi apaiser peut-être les familles des victimes du double attentat contre l'ambassade d'Iran, qui ont annoncé hier, lors d'une conférence de presse, « le début de leur mobilisation » pour empêcher l'extradition « du criminel saoudien qui doit être jugé au Liban, là où il a commis ses crimes abominables ». Rien n'a été dit sur la demande iranienne de participer à l'enquête.


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commentaires (5)

Et va t on accepter de l'extrader en bensaoudie comme le demande bandar ?

FRIK-A-FRAK

18 h 09, le 04 janvier 2014

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Commentaires (5)

  • Et va t on accepter de l'extrader en bensaoudie comme le demande bandar ?

    FRIK-A-FRAK

    18 h 09, le 04 janvier 2014

  • De véritables Pucelles d'Orient, ces "réticentes autorités libanaiiises" !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    13 h 34, le 04 janvier 2014

  • Il vient de mourir suite à ses blessures,sur son lit à l'hôpital de Baabda. L'enquête est close...

    Charles Fayad

    12 h 15, le 04 janvier 2014

  • Pourquoi ne pas autoriser la participation d'une aide d'enquêteurs étrangers...? par exemple sous contrôle de l'ONU ,suite à un accord international garantissant un droit de réciprocité automatique ...car certaines enquêtes criminels n'aboutissent que très rarement en A.S et Iran...!

    M.V.

    10 h 19, le 04 janvier 2014

  • Donc Son Excellence l'émir des Brigades Abdallah Azzam, Maged al-Maged, "a été entraîné en Iran, ainsi que d'autres chefs d'al-Qaeda", hôtes à l'époque de wilayet el-faqih ! Donc son Excellence est bien connue de ses anciens maîtres et amis, les services de renseignement iraniens ! Donc ceux-ci décident tout de suite, par-dessus (ce qu'on appelle encore) les autorités libanaises, et sans même consulter un de leurs sbires tout spéciaux, de "participer à l'enquête" ! C'est toujours ainsi avec les pays les plus "frères" (la Perse au premier rang, bien sûr) : ils préparent leurs ordures, les envoient au Liban et finalement veulent les jeter eux-mêmes dans la poubelle libanaise !

    Halim Abou Chacra

    06 h 17, le 04 janvier 2014

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