Convergence de vues entre Paris et Riyad sur les dossiers libanais, syrien et iranien

Le roi Abdallah d'Arabie saoudite et le président français François Hollande ont souligné hier leur convergence de vues sur les crises qui secouent le Moyen-Orient, du Liban à la Syrie en passant par l'Iran, affichant une même fermeté sur ces dossiers respectifs. M. Hollande a estimé notamment que Paris partageait « exactement » les positions du royaume sur le dossier syrien. Au cours de leur entretien, le roi Abdallah « a manifesté son inquiétude, voire son anxiété à propos des crises régionales – l'Iran, la Syrie, le Liban et l'Égypte – et a salué la position courageuse de la France sur ces principaux dossiers », a-t-on indiqué dans l'entourage de François Hollande.

Le Liban
Après l'attentat à la voiture piégée qui a coûté la vie vendredi à Mohammad Chatah, le Liban était au cœur des entretiens de M. Hollande avec les dirigeants saoudiens, qui se trouve en Arabie pour deux jours. Le président français a ainsi exprimé au cours de sa conférence de presse à Riyad sa solidarité avec les Libanais, surtout dans leur tristesse et leur douleur à l'heure des funérailles de Mohammad Chatah, évoquant également la crise des réfugiés syriens.
François Hollande s'est par ailleurs engagé à « satisfaire » les demandes d'armement de l'armée libanaise pour soutenir le président Michel Sleiman.
« J'ai des relations avec le président Sleiman (...) et s'il y a des demandes qui nous sont adressées, nous les satisferons », a-t-il déclaré. Interrogé sur les déclarations du président libanais, François Hollande a dit : « Je n'ai pas ici à donner d'informations. Ce que je sais, c'est que la France, depuis déjà longtemps mais encore récemment, équipe l'armée libanaise et entendra répondre à toutes les sollicitations qui lui sont adressées parce que le Liban doit rester uni, son intégrité doit être respectée, sa sécurité doit être assurée. » Il a également promis que Paris et Riyad combineraient leurs efforts pour assurer l'intégrité et la stabilité du pays, évoquant la précarité de la situation au Liban, notamment du fait du nombre des réfugiés syriens. Il a affirmé vouloir rassurer les Libanais sur le fait que leur pays restera uni, surtout durant cette période, précisant qu'une réunion internationale serait bientôt organisée à cet effet.

La Syrie et l'Iran
Dans le cadre de sa conférence de presse, le président Hollande a assuré les Saoudiens que Paris resterait sur la même ligne de fermeté à l'égard du président syrien pour soutenir l'opposition « modérée » et aboutir à une transition politique à Damas.
« La France et l'Arabie saoudite (...) partagent exactement la même position sur la Syrie, s'est félicité François Hollande qui a loué la » sagesse précieuse « du roi Abdallah, à savoir » chercher une solution politique, soutenir l'opposition modérée et favoriser la transition « qui » ne doit pas aboutir à une prolongation du régime de Bachar el-Assad. « Le roi a salué le rôle pionnier de la France sur la Syrie », a-t-on rapporté au sein de la délégation française où l'on espère beaucoup du partenariat avec « le premier client de la France au Moyen-Orient ».
Riyad a aussi noté la fermeté de la diplomatie française sur le dossier du nucléaire iranien, et le » vive la France « lancé par le sénateur républicain John McCain durant les négociations qui ont abouti à un accord temporaire à Genève a trouvé un écho dans la péninsule arabique.
« Nous avons sur l'Iran la même volonté, faire en sorte que nous puissions trouver une solution définitive à la question nucléaire », a dit le président français.
Seul bémol : l'Égypte. Alors que Riyad apporte un soutien inconditionnel au nouveau pouvoir, François Hollande a appelé une nouvelle fois Le Caire, dans une interview au quotidien al-Hayat parue hier, à permettre « à l'ensemble des courants politiques rejetant la violence "de" participer au processus de transition » politique.

Saad Hariri
En soirée, le président français s'est entretenu durant une quarantaine de minutes avec le chef du courant du Futur, l'ancien Premier ministre Saad Hariri, en présence du chef de la diplomatie Laurent Fabius. L'entretien a porté sur la situation au Liban et dans la région, notamment en Syrie. M. Hollande a présenté ses condoléances à M. Hariri après l'assassinat de Mohammad Chatah. François Hollande, selon son entourage, « a insisté pour que la spécificité du Liban et son caractère démocratique soient préservés ».
L'ouverture du procès des responsables présumés de l'assassinat de Rafic Hariri, prévue le 16 janvier 2014 devant le TSL, « sera un élément important dans la lutte contre le terrorisme », ont estimé MM. Hollande et Hariri, a précisé l'entourage du président français.
M. Hariri a d'ailleurs exprimé au président français son appréciation du soutien continu de la France au Tribunal spécial pour le Liban. Il a également souligné l'importance de l'appui français à l'État libanais et ses institutions, « en particulier l'armée libanaise, qui représente l'épine dorsale de la stabilité interne », selon le communiqué issu de son bureau de presse. Il a enfin salué la décision française de concrétiser rapidement le soutien annoncé par l'Arabie saoudite visant à équiper l'armée libanaise.
Par ailleurs, dans une interview au quotidien al-Hayat parue hier, M. Hollande a déclaré vouloir délivrer au roi Abdallah d'Arabie saoudite comme « à l'ensemble des responsables » de la région un même message à propos du Liban, appelant au « respect des échéances constitutionnelles », à commencer par la tenue « de l'élection présidentielle prévue en mai 2014 ». Il a également condamné avec la plus grande fermeté l'attentat qui a coûté la vie à Mohammad Chatah, « l'homme de dialogue et de paix ». « Il faut mettre fin à cette escalade de la violence qui met en péril l'unité du Liban », a-t-il ajouté, exprimant l'attachement de la France à la souveraineté du Liban et sa volonté d'aider le pays du Cèdre à dépasser les difficultés politiques et sécuritaires qu'il rencontre dans le cadre de la crise syrienne. Aussi a-t-il appelé les différentes parties à « faire preuve de responsabilité et à œuvrer ensemble pour trouver un consensus nécessaire afin de régler la situation actuelle ».

Ahmad Jarba
Le président français a ensuite rencontré en soirée le chef de la Coalition nationale syrienne (CNS), Ahmad Jarba. Une rencontre durant laquelle il a appelé l'opposition syrienne à participer à la conférence de Genève 2 prévue en janvier, toujours selon l'entourage de M. Hollande.
« François Hollande a appelé l'opposition à participer à cette conférence sur les bases de celle de Genève 1 (en juin 2012), c'est-à-dire en vue de former un gouvernement de transition doté de tous les pouvoirs exécutifs », a-t-on précisé de même source.
Évoquant la situation sur le terrain, Ahmad Jarba a pour sa part affirmé que les bombardements du régime de Bachar el-Assad « faisaient 100 morts par jour, essentiellement dans la population civile, dont beaucoup de femmes et d'enfants ». Il a qualifié cela d'« intolérable », a-t-on ajouté, toujours de source française.
Mais la visite est également dominée par la perspective d'enjeux commerciaux alléchants. Accompagné d'une délégation de patrons, François Hollande participera aujourd'hui, lundi, à un forum économique où il doit évoquer les ambitions françaises. Outre ses gigantesques besoins en infrastructures qui font rêver les géants du BTP comme Vinci ou Bouygues, le pays procède à la modernisation de son appareil militaire, ce qui pourrait déboucher sur d'importants contrats. La France a déjà obtenu de participer à la modernisation de frégates saoudiennes et s'intéresse de près aux besoins de la marine du royaume ou à ses systèmes de défense antiaériens. Paris aimerait aussi participer au programme nucléaire saoudien et livrer ses Airbus à la compagnie Saoudia, mais aussi attirer davantage d'investissements « productifs » saoudiens en France, comme ceux qui ont permis le sauvetage du volailler Doux.

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