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Liban

Bernardino Léon : « À chaque fois que le Liban a importé un modèle de confrontation, il a perdu »

Dans un entretien accordé à L'Orient-Le Jour en marge de la conférence de l'UL, le représentant spécial de l'Union européenne pour la Méditerranée du Sud, Bernardino Léon, a défini la feuille de route qui pourrait aider le Liban à sortir de l'ornière et à échapper à la contagion de la crise syrienne.
« En tant qu'UE, ce qui nous intéresse, c'est de trouver une solution pour habiliter le Liban à faire face aux défis posés par cette crise », a-t-il dit. La priorité, a estimé le responsable européen, est la redynamisation du fonctionnement des institutions constitutionnelles.
« La mise en place d'un nouvel exécutif est le plus urgent pour l'instant, un passage obligé pour pouvoir anticiper l'échéance électorale, redynamiser la vie parlementaire et anticiper en même temps l'élection du chef de l'État. Cela implique également la mise en place d'une loi électorale sur laquelle il n'y a actuellement pas de consensus », a affirmé M. Léon qui a insisté sur la stabilité pour œuvrer à la réhabilitation du rôle des institutions.
« Cette stabilité est en relation étroite avec ce qui se passe en Syrie. Nous ne souhaitons pas voir des Libanais participer à la guerre syrienne et la contagion se propager au Liban et exacerber les fractures au sein de la société libanaise », a-t-il indiqué. Pour le représentant européen, « le principe de non-ingérence vaut pour toutes les parties libanaises sans exception. L'implication dans le conflit syrien est dangereuse car elle contribue à prolonger le conflit en Syrie et renforce le risque de contagion au Liban ».
L'UE a-t-elle eu récemment des discussions avec le Hezbollah sur la question de son implication en Syrie ? « Nous poursuivons certes le dialogue avec le Hezbollah. La déclaration des États membres de l'UE a reconnu que le Hezbollah est un parti politique avec lequel nous continuons d'avoir des échanges et des discussions comme avec les autres parties », a-t-il dit, faisant remarquer qu'il n'aura toutefois pas la chance cette fois-ci de rencontrer des responsables du parti chiite car sa visite au Liban « est très courte ».
Selon lui, le Hezbollah doit absolument faire partie de la solution et s'impliquer dans un dialogue avec les autres forces politiques, notamment pour trouver une issue à la formation du gouvernement « dont le pays a grandement besoin ».
M. Léon reste persuadé, malgré tout, que le Liban demeure, pour la région, un modèle à suivre. « Le Liban a son mot à dire sur la scène régionale, à cause des atouts qu'il possède, notamment la vitalité de sa vie politique, le rôle de la femme et le pluralisme politique qui fait défaut dans d'autres pays. Beaucoup de pays de la région portent un regard envieux sur le Liban », a-t-il assuré, rappelant que le pays du Cèdre a toujours été un modèle pour « surmonter les différences religieuses et trouver un consensus ».
La formule de réussite est simple, dit-il : « À chaque fois que le Liban a importé un modèle de confrontation, il a perdu. À chaque fois qu'il a réussi à consolider son système et à l'exporter, il en est sorti renforcé. » Pour le faire, il faut optimiser le rôle des modérés qui sont nombreux et qui font passer l'intérêt national en priorité, préconise le responsable européen.
Autre ingrédient de succès que le pays devrait mettre à profit, « c'est le rôle de la femme qui doit être renforcé par le biais de la société civile appelée à être encore plus active. Le Liban aura beaucoup à gagner sur ce plan », a-t-il dit.
Toutefois, ajoute Bernardino Léon, l'aspect politique doit être abordé en parallèle avec l'économique, qui préoccupe l'UE au plus haut point.
« Nous sommes en contact avec le secteur privé libanais. Nous avons constaté qu'il y a actuellement des problèmes majeurs : la dette publique a augmenté, le chômage également, la croissance est devenue problématique et le déficit important », constate le responsable. En tant que partenaire économique important du Liban, l'UE veut contribuer également à une stabilisation économique.
« Nous sommes en contact avec le gouvernement et avec différents représentants du secteur privé. L'idée est de relancer la coopération économique avec le Liban, notamment par le biais du soutien aux PME et au secteur financier, et en prenant en compte la question énergétique et d'autres questions microéconomiques. L'objectif étant de contribuer à trouver un équilibre économique dans le pays. »
Comment une Europe en crise peut-elle aider un pays également en crise ? « On devra le faire de façon plus créative et différente en recourant à certains instruments comme la Banque européenne d'investissement et la Banque européenne de développement, appelées à devenir très actives dans la région. Une des idées évoquées dans ce cadre est la création d'un parc industriel. »
Autre problème qui commence à peser lourd dans la balance, la question des réfugiés syriens, un fardeau que le Liban n'arrive plus à supporter à lui seul. Un problème que le responsable européen a qualifié de « structurel » dans la mesure où il peut avoir des « répercussions importantes sur le système libanais ainsi que des implications régionales ».
« L'Europe fait le maximum du point de vue économique. Sur le plan politique, il est absolument nécessaire d'intégrer d'autres partenaires et acteurs de la région et de la communauté internationale pour trouver une solution », a-t-il dit. À défaut, les solutions momentanées ne seront que du « racolage ». « L'UE ne fait qu'affirmer clairement le principe de la stabilité du Liban qui est une priorité. Elle ne désire pas voir des acteurs régionaux mettre en jeu la stabilité du pays », a-t-il dit en allusion aux États-Unis, à la Russie, aux pays du Golfe et aux autres pays de la région, autant de protagonistes qui « doivent être inclus dans la recherche d'une solution, dans le cadre d'un effort collectif ».
Craint-il la contagion jihadiste au pays du Cèdre ?
« Bien sûr. Les jihadistes sont une menace commune dans tous les processus de transformation et de transition de la région, en Tunisie, en Libye, en Égypte et au Liban également. C'est l'ennemi commun de tous les acteurs régionaux et de l'Europe », conclut M. Léon.

Je. J.

Dans un entretien accordé à L'Orient-Le Jour en marge de la conférence de l'UL, le représentant spécial de l'Union européenne pour la Méditerranée du Sud, Bernardino Léon, a défini la feuille de route qui pourrait aider le Liban à sortir de l'ornière et à échapper à la contagion de la crise syrienne.« En tant qu'UE, ce qui nous intéresse, c'est de trouver une solution pour...
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