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À La Une - Afrique du Sud

Nelson Mandela aurait-il pu refuser le prix Nobel de la paix?

"Pour nous, Mandela n'avait pas besoin du prix partagé avec une autre personne, de plus avec celui qui l'a mis en prison".

Neslon Mandela recevant le prix Nobel de la paix en 1993, un prix qu'il avait partagé avec son oppresseur, dernier président de l'apartheid FW de Klerk. AFP PHOTO / GERARD JULIEN

Nelson Mandela aurait-il pu refuser le prix Nobel de la paix, qui lui fut remis le 10 décembre 1993, il y a tout juste vingt ans? La question fut très sérieusement posée par ses camarades de lutte fâchés qu'il ait à partager cet honneur avec le dernier président de l'apartheid FW de Klerk.


Honoré tout comme son adversaire pour avoir mené l'Afrique du Sud vers la démocratie, l'ancien président sud-africain, emprisonné pendant vingt-sept ans sous le régime raciste blanc, est décédé jeudi à l'âge de 95 ans.
Tokyo Sexwale, chef de file de son parti à l'époque, le Congrès national africain (ANC), se rappelle que "certains étaient très inquiets et ne voulaient pas voir Nelson Mandela, une telle icône, recevoir ce prix avec son oppresseur".


Quand le téléphone a sonné le 15 octobre 1993 pour annoncer la décision du comité Nobel, "les réactions étaient mitigées et certains hésitaient à soutenir ce truc conjoint avec De Klerk", raconte-t-il.
"Il faut se rappeler qu'il y avait énormément de violences", reprend M. Sexwale, en référence au climat de guerre civile qui régnait dans de nombreuses townships noires durant cette période.


Les négociations avec le pouvoir blanc étaient déjà très avancées: les premières élections multiraciales avaient été fixées au 27 avril de l'année suivante et une ébauche de nouvelle Constitution démocratique entérinée.
Mais les partisans de l'ANC et du parti zoulou de l'Inkatha s'entretuaient, et le dernier carré de partisans de l'apartheid était soupçonné d'attiser la haine. On estime que les violences politiques firent entre 40.000 et 50.000 morts de 1990 à 1994.

 

(Lire aussi: L'Afrique du Sud se prépare à être le centre du monde pour les funérailles de Mandela)

"Il ne faut pas oublier qu'avant Mandela, Albert Luthuli ou Desmond Tutu et bien d'autres personnalités dans le monde avaient reçu le prix Nobel individuellement" sans le partager avec quiconque, reprend M. Sexwale. "Il aurait pu le refuser, il y avait beaucoup de tensions".
"Pour nous, Nelson Mandela n'avait pas besoin du prix partagé avec une autre personne, de plus avec celui qui l'a mis en prison. Mais c'est lui-même qui nous a convaincus de la justesse de ce qui se passait."
"Il nous a convaincus après une vive discussion que, quoi qu'il en soit, c'était important pour nos compatriotes à cause de la réconciliation - on se réconcilie seulement avec un ennemi - et pour montrer au monde que nous, les Sud-Africains, nous avons transcendé nos différences+", enchaîne-t-il.


Le "mal terrible" de l'Apartheid
"Pour nous, il fallait franchir le Rubicon. Nous avions souffert, nous avions eu des membres de notre famille tués, des amis assassinés, et même notre ambassadeur à Paris Dulcie September (en 1988, ndlr). Comment se réconcilier avec des gens comme ça? Ce n'était pas facile. Il fallait qu'on montre qu'un De Klerk pouvait être étreint et même être fait vice-président."


A la présidence sud-africaine, la réaction fut inverse. C'est Dave Steward, alors directeur de cabinet de M. de Klerk, qui décrocha puis appela M. de Klerk pour lui communiquer "la bonne nouvelle d'Oslo".
"Il était enchanté", se souvient-il, se remémorant lui-même "un moment très heureux dans une période pas facile", et à peine terni par les huées de certains Norvégiens quand M. de Klerk vint saluer au balcon du Grand Hôtel d'Oslo avec Nelson Mandela le 10 décembre 1993.


Proche de l'ANC, la prix Nobel de littérature Nadine Gordimer, 90 ans, était du voyage à Oslo, comme George Bizos, l'ami et avocat de toujours de Mandela.
"Mandela étant le merveilleux personnage qu'il est, il décida d'accepter ce que des gens comme moi auraient considéré comme un déshonneur", dit-elle à l'AFP.
"Pour nous, c'était une sorte de trahison de voir qu'il devait partager, que le président de l'apartheid avait quelque chose à partager avec Mandela et de voir Mandela se tenir là à Oslo à côté de De Klerk, placé au même niveau", ajoute-t-elle.


Ni M. de Klerk, ni M. Mandela, qui se rendaient alors coup pour coup durant cette période délicate, sous la pression des extrémistes des deux bords, n'eurent accès au discours de l'autre avant de prononcer le leur.
Dans son discours, M. de Klerk souligna "le changement fondamental de positions des deux parties".
Mandela loua "l'humanité commune qui lie Noirs et Blancs". Et il salua son "compatriote et lauréat conjoint" pour avoir eu "le courage d'admettre qu'un mal terrible avait été fait à notre pays et à notre peuple" avec l'apartheid. 

 

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Nelson Mandela aurait-il pu refuser le prix Nobel de la paix, qui lui fut remis le 10 décembre 1993, il y a tout juste vingt ans? La question fut très sérieusement posée par ses camarades de lutte fâchés qu'il ait à partager cet honneur avec le dernier président de l'apartheid FW de Klerk.
Honoré tout comme son adversaire pour avoir mené l'Afrique du Sud vers la démocratie, l'ancien...

commentaires (3)

Ceux qui ont écrit cet article sont des imbéciles dogmatiques.Du genre de ceux qui se battent jusqu’au dernier homme...avec le sang des autres!Il ne devraient même pas avoir le droit de prononcer le nom de Mandela..;tout le contraire de ce qu'ils sont!

GEDEON Christian

12 h 50, le 09 décembre 2013

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Commentaires (3)

  • Ceux qui ont écrit cet article sont des imbéciles dogmatiques.Du genre de ceux qui se battent jusqu’au dernier homme...avec le sang des autres!Il ne devraient même pas avoir le droit de prononcer le nom de Mandela..;tout le contraire de ce qu'ils sont!

    GEDEON Christian

    12 h 50, le 09 décembre 2013

  • DE KLERK NE FUT PAS UN OPPRESSEUR DE MANDELA. C'EST BAFOUER L'HISTOIRE ET LA VÉRITÉ QUE DE CERTIFIER UN TEL MENSONGE. DE KLERK VINT POUR LE CHANGEMENT ET IL A CHANGÉ TOUT MALGRÉ LES MENACES DE MORT DE L'EXTRÊMES DROITE CONTRE LUI ET CONTRAIREMENT AU VOULOIR DE LA MAJORITÉ BLANCHE DE CE TEMPS. DONC LE CHANGEMENT A ÉTÉ FAIT PAR CES DEUX HOMMES : MANDELA ET DE KLERK, ET TOUS LES DEUX SONT DES HOMMES DE PAIX !

    ARABOS-SIONISTES, L,ARTICLE DISPARAIT DES ECRANS

    11 h 11, le 08 décembre 2013

  • L'acceptation de Mandela de partager le prix Nobel de la paix avec le dernier président de l'apartheid et son succès à en convaincre ses camarades, "car on se réconcilie seulement avec un ennemi", sont justement signes et preuves de la grandeur, de la noblesse d'âme, de la capacité de pardon évangélique de cet homme extraordinaire. C'est par ce geste de pardon évangélique que Mandela évite pour son pays un gigantesque bain de revanche et de sang entre noirs et blancs. Un exemple pour l'humanité entière, tout spécialement pour les dictatures assoiffées du sang de leur peuple, et pour les exécrables semeurs de haine dans un petit pays qui s'appelle Liban, afin qu'ils reviennent à leur humanité. Car qui dit humanité dit fraternité entre les hommes de n'importe quelle éthnie, de n'importe quelle couleur, de n'importe quelle religion, de n'importe quelle secte. Le "takfirisme", de n'importe quel bord, est justement la négation de toutes ces valeurs, sans lesquelles on n'appartient plus au domaine humain.

    Halim Abou Chacra

    05 h 17, le 08 décembre 2013

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