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À La Une - Justice

Expulsion d'une collégienne rom : la France choquée, son gouvernement fragilisé

"S'il y a eu faute, l'arrêté de reconduite à la frontière sera annulé", assure Ayrault.

Face à la polémique, le Premier ministre Jean-Marc Ayrault s'est retrouvé contraint d'envisager le retour en France de la collégienne rom et sa famille.REUTERS/Charles Platiau

L'expulsion au Kosovo d'une collégienne rom en pleine sortie scolaire choquait mercredi les Français et fragilisait le gouvernement, contraignant le Premier ministre Jean-Marc Ayrault d'envisager le retour en France de la fille et sa famille. Cette polémique intervient au moment où le président François Hollande atteint un record historique d'impopularité dans les sondages avec moins d'un quart d'opinions favorables.


"S'il y a eu faute, l'arrêté de reconduite à la frontière sera annulé", a assuré mercredi devant l'Assemblée nationale M. Ayrault. "Cette famille reviendra pour que sa situation soit réexaminée en fonction de notre droit, de nos pratiques et de nos valeurs", a-t-il ajouté.
Le Premier ministre a précisé que les résultats de l'enquête administrative sur cet éloignement seraient connus "dans 48 heures", alors que le ministre de l'Intérieur Manuel Valls essuyait un feu nourri de critiques, son propre camp l'accusant de souiller les "valeurs" de la gauche.

 

Hollande garde le silence
Tenant d'un "blairisme" à la française qui passe mal dans les rangs du Parti socialiste, Manuel Valls, 51 ans, responsable politique préféré des Français, avait déjà choqué en septembre une partie de la gauche en mettant en cause la capacité et la volonté de s'intégrer des 20.000 Roms vivant en France. Il avait alors été accusé de brader l'idée, chère à la gauche française, que chacun peut devenir français quelle que soit son origine ou sa religion.
François Hollande, soucieux de répondre aux attentes d'une société française de plus en plus sensible aux thèses de l'extrême droite, a toujours soutenu son ministre et son discours de fermeté. Il ne s'est pas encore prononcé sur la nouvelle affaire qui met en cause le "premier flic de France".


La polémique a éclaté avec la révélation cette semaine par une association militant contre les expulsions d'enfants scolarisés de l'arrestation le 9 octobre de Leonarda, une Rom kosovare de 15 ans, en pleine sortie scolaire.
Selon l'association, la collégienne, qui faisait l'objet avec ses parents et ses cinq frères et sœurs d'une obligation de quitter le territoire, a été interpellée dans l'est de la France par la police alors qu'elle se trouvait avec ses camarades dans un car scolaire.
L'autocar s'est finalement arrêté sur un parking, où des policiers sont venus chercher la jeune fille. Les professeurs se sont déclarés "profondément choqués par les méthodes utilisées pour renvoyer des enfants issus de la minorité rom vers des pays qu'ils ne connaissent pas et dont ils ne parlent pas la langue".


Sanctuariser l'école

La polémique a pris d'autant plus rapidement qu'elle illustre les tiraillements de la gauche dont les "valeurs" d'accueil et d'humanisme à l'égard des étrangers sont mises à mal par l'exercice du pouvoir et la difficulté à accepter réfugiés, sans-papiers et autres étrangers en temps de crise et de chômage élevé.


Manuel Valls s'est défendu en assurant appliquer "avec fermeté les décisions d'éloignement tout en veillant scrupuleusement au respect des droits des étrangers qui font l'objet d'une mesure d'éloignement".
Mais mercredi, tandis que les critiques se multipliaient dans son camp, il a finalement ouvert une "enquête administrative" sur les "conditions" d'expulsion de la collégienne.

 

Le patron des députés socialistes, Bruno Le Roux, a toutefois estimé qu'il ne fallait "pas aller chercher les enfants à l'école" et mis en cause le préfet. Là, "c'était le temps scolaire. On peut attendre, on peut différer" l'interpellation, a-t-il estimé.

 

La veille, le Parti de gauche (PG) de Jean-Luc Mélenchon avait fustigé la "politique inhumaine" du ministre de l'Intérieur. "Manuel Valls a beau jeu de décréter que les Roms ne veulent pas s'intégrer, alors même qu'il les pourchasse jusque dans les écoles", s'est insurgé le PG dans un communiqué.

 

 

 

Le tweet de Stéphane Delpeyrat, le secrétaire national du PS à la Recherche.

 

Le tweet de Frédéric Hocquard, secrétaire national du PS à la Culture.


 

Le président de l'Assemblée nationale, Claude Bartolone, s'est indigné, martelant que la gauche "ne saurait transiger avec les valeurs, sous peine de perdre son âme".

 


Premier des ministres à réagir, celui de l’Éducation, Vincent Peillon, a exigé que l'on "sanctuarise l'école" et que "cette situation ne se renouvelle pas". Le patron du Parti socialiste, Harlem Désir, et les écologistes, membres de la coalition gouvernementale, ont demandé le retour de la collégienne dans sa classe.

 

A droite, Jean-François Copé, président de l'UMP, a jugé que le ministre de l'Intérieur fonde sa popularité sur sa propension à dire "ce qu'il faudrait faire", mais "sans jamais le faire".

 

A l'extrême-droite, Marion Maréchal Le Pen (FN) a accusé Manuel Valls, d'avoir "voulu et orchestré" un "show" autour de l'expulsion de la collégienne kosovare. "Il faut donner des cautions, le sentiment de l'autorité, de mesures prises contre l'immigration", selon elle. Or "la première chose qu'a faite" le ministre de l'intérieur c'est de "confirmer que les 200.000 entrées seraient maintenues, dépénaliser le séjour régulier, complexifier les procédures menées par les forces de l'ordre". "C'est une façade, une parade", mais "dérisoire par rapport aux flots d'immigration illégale qui continuent d'arriver", a accusé l'élue frontiste.

 

"Valls démission!"
Du Kosovo, Leonarda a déclaré vouloir rentrer en France pour reprendre l'école et "avoir un avenir". La collégienne a raconté les pleurs, le "mal au cœur d'abandonner ses amis, l'école, tout le monde". "J'avais honte aussi parce qu'il y avait la police qui est venue, il y a des camarades qui me demandent +qu'est-ce que t'as fait, t'as volé ?+", a-t-elle dit à la radio France inter.

 

Dans le cadre d'une affaire séparée, plusieurs centaines de lycéens parisiens se sont rassemblés mercredi devant le rectorat à Paris pour protester contre les expulsions d'élèves étrangers, après celle le weekend dernier d'un de leurs camarades, un Arménien scolarisé dans la capitale.
Les élèves ont scandé "Valls démission!" et "Libérez Khatchik!". Agé de 19 ans, Khatchik Kachatryan a été expulsé samedi vers l'Arménie.

 

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