Rechercher
Rechercher

Moyen Orient et Monde - Tragédie

« Journée de pleurs » à Lampedusa et dans toute l’Italie

Le naufrage, dernier d’une série, ne devrait pas pousser l’UE à changer sa politique de migration.

Le pape François a dénoncé hier l’« indifférence » à l’égard des migrants, en référence au drame de Lampedusa. Andreas Solaro/AFP

Toute l’Italie a vécu hier une « journée de pleurs » après le naufrage de Lampedusa qui a sans doute coûté la vie à 300 migrants, pour la plupart des Érythréens. Le navire, parti de Libye et qui a coulé tôt jeudi matin près de la petite île sicilienne, transportait 450 à 500 migrants, selon les autorités.

 

Seuls 155 environ ont été sauvés, ce qui laisse craindre un bilan d’environ 300 morts, dont un grand nombre de femmes et d’enfants. Cela fait de ce naufrage la pire tragédie de l’immigration des dernières années. Jusqu’à présent, 111 corps ont été ramenés à terre, mais la récupération des cadavres a été interrompue hier matin « car la mer est trop agitée et les conditions de sécurité ne sont pas réunies pour les sorties en mer », a indiqué Leonardo Ricci, un responsable de la police financière à Lampedusa. Les plongeurs « ont vu des corps sur le fond et à l’intérieur » de l’épave du navire, un bateau de pêche, qui gît retourné à 40 mètres de profondeur, à environ 550 mètres de la première côte, a également révélé ce responsable.


Selon le vice-Premier ministre Angelino Alfano, « les premiers secours ont été prodigués vers 5h00 GMT par des pêcheurs qui ont avisé les autorités ». Rafaele Colapinto, l’un d’entre eux, a raconté avoir vu « un océan de têtes ». « On a entendu des cris et on s’est précipités pour voir ce qui se passait, et là, nous avons trouvé une situation de cauchemar », a déclaré un commerçant de Lampedusa, Alessandro Marino, qui a dit en pleurant n’avoir réussi à en « sauver que 47 ».

 

Les corps des victimes du naufrage d'une embarcation de migrants, disposés dans le hangar de l'aéroport de Lampedusa le 3 octobre 2013. REUTERS/Antonio Parrinello

 


Une pétition pour décerner le prix Nobel de la paix à Lampedusa, lancée par l’hebdomadaire L’Espresso, a déjà recueilli plus de 20 000 signatures. Dans toute l’Italie, une minute de silence a été observée dans les écoles et les drapeaux sont en berne. Sur la petite île touristique, les magasins étaient fermés hier sur ordre du maire, Mme Giusy Nicolini. « Cela ne peut pas continuer comme ça, nous espérons que les politiques vont changer, l’avenir de Lampedusa est directement lié aux politiques d’asile et sur l’immigration », a souligné Mme Nicolini. De même, M. Alfano a appelé à changer les règles européennes qui « font trop peser sur les pays d’entrée la charge de l’immigration clandestine » et à surveiller davantage les côtes en Tunisie et en Libye d’où partent les bateaux de clandestins.

Chacun pour soi
Mais les pays du nord de l’UE, confrontés à une montée du populisme chez eux, ont toujours refusé de partager la charge migratoire des pays du Sud, comme l’Italie et la Grèce, et la tragédie de Lampedusa ne devrait donc pas changer la donne malgré les appels à davantage de solidarité. En première ligne, la Grèce met régulièrement en cause le « fardeau » qui pèse sur les pays du sud de l’Europe en raison de l’absence de mécanisme de répartition des demandeurs d’asile. Mais, alors que les partis extrémistes ont le vent en poupe dans de nombreux pays européens, les États ne sont pas prêts à accueillir plus d’immigrés sur leur sol.
Tout au plus, l’UE s’est dotée d’une série d’outils communs parmi lesquels l’Agence Frontex de surveillance des frontières européennes, et qui dispose d’un budget, souvent jugé dérisoire, de 85 millions d’euros. L’Union européenne s’apprête à lancer un nouveau système prévoyant notamment de mieux « pister, identifier et secourir » les navires chargés de migrants en danger. Ce nouvel outil, baptisé Eurosur, doit être discuté et voté par le Parlement européen la semaine prochaine à Strasbourg. Il entrera en vigueur le 2 décembre.

Le pape François dénonce l’« indifférence »
Par ailleurs, le pape François a plaidé hier à Assise, dans le centre de l’Italie, ville du saint dont il a choisi le nom, en faveur d’une Église solidaire avec les personnes marginalisées, et agissant pour la paix, au lendemain de la tragédie de Lampedusa. « Aujourd’hui est une journée de pleurs », a-t-il dit en allusion à la journée de deuil décrétée en Italie. Très ému, le pape a dénoncé « l’indifférence à l’égard de ceux qui fuient
l’esclavage, la faim, pour trouver la liberté, et trouvent la mort comme hier à Lampedusa ». François avait déjà tempêté en juillet sur cette île – sa première visite hors de Rome – contre la « mondialisation de l’indifférence ». Cette visite d’une journée à Assise a une forte valeur symbolique, car elle permet au premier pape originaire d’un pays du Sud d’expliquer son choix d’incarner une Église pauvre, près de sept mois après son élection. Dans « la salle du dépouillement » justement, le pape a laissé son discours de côté pour appeler les chrétiens à suivre le modèle de pauvreté promu par saint François en combattant « la mondanité, une lèpre, un cancer de la société, qui tue la personne, qui tue l’Église ». C’est dans cette salle que François Bernardone en 1207 s’était dépouillé de ses vêtements devant son père, un riche marchand, pour indiquer que les biens terrestres étaient destinés aux plus pauvres selon la volonté de Dieu.

 

Lire aussi

Les 18 rescapés des boat people d’Indonésie rentrent demain à Beyrouth

 

Australie : Libanais clandestins, « ne risquez pas votre vie, vous serez refoulés
Toute l’Italie a vécu hier une « journée de pleurs » après le naufrage de Lampedusa qui a sans doute coûté la vie à 300 migrants, pour la plupart des Érythréens. Le navire, parti de Libye et qui a coulé tôt jeudi matin près de la petite île sicilienne, transportait 450 à 500 migrants, selon les autorités.
 
Seuls 155 environ ont été sauvés, ce qui laisse craindre un bilan...
commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut