Il ne s’agit pas moins d’un tournant : après la forte augmentation des prélèvements l’an dernier et le débat de la fin de l’été sur le « ras-le-bol fiscal » dont souffriraient les Français, l’exécutif s’est résolu à accélérer le rythme des économies de dépenses.
Le projet de loi de finances pour 2014, attendu mercredi en Conseil des ministres, prévoit que 80 % de l’effort de réduction du déficit soit réalisé par des économies de dépenses. Et en 2015, ce sera 100 %, promet Bercy. « Un effort totalement inédit », souligne le ministre de l’Économie Pierre Moscovici.
En 2014, l’État, les opérateurs, les collectivités locales et la Sécurité sociale dépenseront donc 15 milliards d’euros de moins par rapport à ce qu’aurait été l’évolution « naturelle » des dépenses publiques, compte tenu notamment de l’inflation.
En clair, les dépenses publiques augmenteront quand même en valeur absolue, mais de 5 milliards d’euros seulement, à un peu plus de 1 100 milliards, soit une hausse de 0,5 %, contre 0,8 % en moyenne ces cinq dernières années.
Les dépenses de l’État diminueront même de 1,5 milliard d’euros nets en valeur absolue, hors intérêts de la dette et pensions des fonctionnaires, pour la première fois depuis... 1958, soulignait en juin le Premier ministre Jean-Marc Ayrault.
Si ces choix inquiètent l’aile gauche de la majorité, qui craint une politique d’austérité et un effet négatif sur l’activité et la consommation, ils vont en revanche dans le sens du FMI, qui recommandait dans son dernier rapport sur la France de « réduire les dépenses plutôt que d’augmenter les impôts ».
Une demande également récurrente du Medef, qui juge toutefois ces annonces insuffisantes. « Ce que nous proposons c’est de descendre de 20 milliards d’euros par an », soit 1,7 %, estime son président Pierre Gattaz. « Ce n’est rien », ajoute-t-il, comparant la gestion des finances de l’État à celle des entreprises et des ménages.
Et de suggérer des pistes drastiques, telles que la suppression pure et simple des départements. Une option également avancée par l’OCDE en mars dernier.
Mais réduire « intelligemment » les dépenses prend plus de temps que d’augmenter les impôts, rappelle-t-on à Bercy. Audits, concertation et pédagogie sont les maîtres mots de la méthode du gouvernement, qui ne veut pas léser les couches populaires.
« Il y aura des économies qui seront difficiles. Il faudra l’assumer et l’expliquer », explique ainsi Juliette Méadel, directrice générale de Terra Nova, groupe de réflexion proche du PS. « Ça ne sera pas des économies qui vont affecter la qualité des services publics », ajoute-t-elle.
À ce jour, aucune mesure n’a été décidée qui pèse sur les allocations, hormis la revalorisation plus tardive des retraites (en octobre au lieu d’avril), remarque également Alain Trannoy.
Les prestations sociales représentent près de la moitié des dépenses publiques (46 % en 2009, contre 34 % pour les dépenses de fonctionnement, selon le ministère du Budget).
« Les fonctionnaires paient une partie importante de la diminution des dépenses », poursuit l’économiste, en référence au gel de leurs salaires et à la forte réduction des mesures d’avancement, qui constituent le gros de la baisse annoncée de 2 % des dépenses de fonctionnement des ministères.
Si les options radicales ne semblent pas être au menu de 2014, la poursuite de cette politique d’économies jusqu’à la fin du quinquennat impliquera d’aller au-delà des gains de productivité dans les ministères et des coups de rabots de-ci, de-là. Ce sera alors l’épreuve du feu pour la volonté de pédagogie affichée par l’exécutif.
(Source : AFP)