L’un des thèmes centraux de la conférence de dialogue à laquelle invite M. Berry est cette fameuse « distanciation » dont parle la « déclaration de Baabda », ou encore cette « neutralité » du Liban à l’égard des axes et des conflits régionaux. On sait que le Hezbollah en lie l’acceptation à celle du triptyque « armée-peuple-résistance », rejeté par le 14 Mars.
La politique de distanciation figure au troisième point de la proposition de M. Berry. Comment va-t-il s’y prendre pour désengager le Liban de la Syrie ? L’initiative, sur ce plan, a une double portée, puisqu’elle critique, indirectement, l’engagement armé du Hezbollah en Syrie, tout en condamnant l’engagement financier du 14 Mars aux côtés de la révolution syrienne et son pourvoi en armement.
Le quatrième point de l’initiative prévoit l’enrôlement de 5 000 nouveaux soldats au sein de l’armée et une carte blanche pour la pacification de Tripoli, ainsi que le nettoyage de la Békaa et de la frontière nord du Liban, limitrophe de la Syrie, de toute présence armée autre que libanaise.
Enfin, le dernier point de cette initiative porte sur la stratégie de défense. Il prévoit que tous les groupes armés privés ne sauraient prendre d’initiative militaire, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur du Liban, sans l’autorisation des autorités libanaises. Dans le cadre de la conférence de dialogue, ils devront répondre aux trois questions que leur pose le président Sleiman : où sera utilisé l’armement en question ? Quand sera-t-il utilisé ? Comment le sera-t-il ?
Pour l’heure, la clé de voûte du plan de M. Nabih Berry est le désengagement de la crise syrienne. Le succès de ce plan serait tributaire d’une espèce de troc entre le 14 et le 8 Mars, l’un acceptant la résistance comme fait accompli, l’autre acceptant de se distancier du conflit armé en Syrie. Le succès de cette opération ouvrirait large, ensuite, la voie à la formation d’un nouveau gouvernement.
L’initiative Berry aboutira-t-elle ? Il est trop tôt pour le dire, bien sûr. Mais il n’est pas interdit de rêver qu’après l’accord du Caire, l’accord de Taëf et l’accord de Doha, les Libanais parviennent à un accord du Liban dont ils seraient les artisans et maîtres par un retour à la conférence de dialogue. Sachant par ailleurs que la politique de distanciation qui sera au cœur de cette conférence jouit déjà de l’approbation de toute la communauté arabe et internationale, et que l’accord auquel les Libanais parviendront leur ouvrira donc la porte à une nouvelle ère de stabilité, en dépit des convulsions régionales qui se poursuivront.
Ce qui résoudrait tous les problèmes serait un plan de désengagement de la milice illégale du Liban. Accepter cette complicité aux crimes du régime syrien et vouloir se distancier de ce dernier, c'est se tirer une balle dans le pied.
12 h 41, le 20 septembre 2013