« Nous sommes en train de nous développer sur ces marchés », déclare à l’AFP Piotr Bielski, économiste à la banque BZ WBK.
« C’est très important parce que la diversification géographique des exportations polonaises signifie un renforcement de notre capacité à résister aux difficultés de la zone euro », ajoute-t-il.
Ainsi, l’entreprise polonaise S&A, spécialisée dans les bijoux en ambre, a subi depuis le début de la crise financière mondiale, en 2008, une baisse régulière de ses marchés traditionnels en Europe et aux États-Unis.
« Nous avons eu le temps de nous préparer à une diversification, de chercher de nouveaux marchés », explique son patron Adam Pstragowski.
L’entreprise s’est lancée à la conquête du marché russe en 2009 puis des Émirats arabes unis en 2010. Cette même année, ses ventes en Chine ont explosé après l’exposition universelle de Shanghai. Et maintenant elle regarde vers la Turquie.
La Pologne a longtemps été dépendante de la demande intérieure avec ses 38 millions d’habitants, mais depuis son entrée dans l’Union européenne en 2004, ses exportations ont bondi, passant de moins de 20 % du PIB en 1999 à 40 % actuellement.
L’Europe a toujours été un marché important pour toutes sortes de produits polonais – machines outils, viande, etc –, l’Allemagne voisine absorbant à elle seule un quart des exportations polonaises.
Tant que la zone euro, dont la Pologne ne fait pas partie, était en croissance, tout allait bien. Mais avec la crise de la dette, les choses bougent.
« Il y a eu une tendance continue à une croissance plus rapide des exportations vers les marchés des pays en développement ou moins développés que vers ceux des pays développés », selon un récent rapport du ministère de l’Économie.
Le début d’une nouvelle tendance ? Globalement, les exportations polonaises ont augmenté de 6 % au premier semestre par rapport à la même période de 2012, à 74,2 milliards d’euros, selon les chiffres provisoires de l’Office central des statistiques.
Mais les variations sont considérables d’une région à une autre.
Ainsi, la hausse des exportations vers l’UE n’a été que de 1,9 %, à 55,1 milliards d’euros au cours de cette période (+1,1 % vers la zone euro), avec même un recul des exportations vers certains pays comme la France et l’Italie.
Simultanément, les exportations vers les pays ex-soviétiques de la Communauté des États indépendants (CEI) ont augmenté de 12,7 %, à 7,2 milliards d’euros, et celles vers la Chine ont bondi de 22,5 %.
Certes, ces chiffres concernant de nouveaux marchés partent « de très bas et ne correspondent pas à des montants importants », reconnaît Krzysztof Marczewski de l’Institut de recherche sur le marché, la consommation et les conjonctures (IBRKK).
Mais « jusqu’alors, il était difficile de faire quoi que ce soit dans ces régions parce que les entreprises avaient peur des nouveaux marchés. Donc, c’est plutôt une surprise cette activité soudaine », ajoute-t-il.
Plusieurs raisons peuvent expliquer cette tendance depuis deux ans, selon lui : « Faible demande intérieure, faible demande de la zone euro, capacité de produire plus, coût de production relativement bas. »
Le ministère de l’Économie encourage cette évolution avec des campagnes sur le thème « Go China » ou « Go Africa ».
Les marchés traditionnels constituent toujours la part du lion dans les exportations polonaises, dont plus de 60 % sont destinées à l’Europe du Nord et du Sud, selon la banque BZ WBK.
« Nous sommes toujours très dépendants de la situation dans la zone euro étant donné l’importance de nos exportations vers cette région », a souligné récemment le Premier ministre Donald Tusk.
Mais avec la fin de la récession dans la zone euro, la question est de savoir si cette diversification va continuer. « S’agit-il d’un mouvement de courte durée ou du début d’une nouvelle tendance ? » s’interroge M. Marczewski.
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