Les guerres sont souvent perdues par des généraux rééditant leurs expériences antérieures d’une nouvelle équation militaire. Le monde libre a l’habitude de calquer des scénarios précédemment fonctionnels sur de nouvelles situations. Au Liban, des années ont été perdues en pourparlers stériles avec le Hezbollah, comparant naïvement cette entité à (par exemple) l’IRA, bien que l’agenda de cette dernière fût strictement national. Concernant la Syrie, le précédent du Kosovo est souvent cité. L’exemple repose sur les critères politico-légaux, sans plus. L’ordre de bataille des troupes du régime, leur proximité de concentrations civiles (les combats sont essentiellement urbains) ainsi que la résilience du régime qui n’a rien à perdre font que le bombardement stratégique (les « effect based operations ») devrait constituer une partie d’une plus large opération militaire.
Alors, que faire ?
Se décider à agir militairement. Le « jus ad bellum » (cause morale pour aller en guerre) est évident. Il s’agit d’assistance à peuple en danger, de l’arrêt d’un génocide en cours. Point. Aucune loi, aucun artifice politique ne peuvent surpasser cet impératif d’ordre humain.
Les États-Unis décideront eux-mêmes du processus politico-légal de leur action, de la participation internationale requise, de l’étendue de leur action militaire (campagne militaire d’envergure ou ciblage de précision par drones). Mais certaines actions auraient dû être entreprises depuis longtemps. Le monde libre a peut-être voulu maintenir une lueur d’espoir au régime, garder un certain équilibre (contrôlable à volonté) afin d’empêtrer le Hezbollah dans un bourbier d’attrition, neutralisant ainsi deux adversaires (en fait, les deux « bras » d’un unique adversaire, l’Iran) d’un coup. Possible. En attendant, lesdites actions consisteraient à fournir (moyennant un financement des pays du Golfe, évitant ainsi toute polémique administrative interne) un entraînement et un équipement appropriés à l’Armée syrienne libre. Le premier consisterait à perfectionner les manœuvres du niveau de peloton jusqu’au niveau de la compagnie et même de la brigade, particulièrement en milieu urbain. Le second consisterait en équipement individuel, d’équipe et de groupement. Les outils de communication et de reconnaissance, ainsi que les armes antichars et antiaériennes à elles seules feraient une différence dramatique sur le terrain. Un avantage critique serait le « contrôle » (relatif) de l’Armée syrienne libre, donc de l’entité sécuritaire de base de la Syrie libre émergente, qui découlerait de cet encadrement-équipement. Bien sûr, le vide militaire actuel serait nul, ne laissant pas de place aux extrémistes religieux étrangers à la Syrie, que les Syriens rejettent eux-mêmes. Une Syrie libre, unie et démocratique passe nécessairement par une armée syrienne bien fondée, bien parrainée.
En définitive, une situation « win-win » pour les États-Unis, le monde libre et les millions de Syriens encore en vie. Sous cet angle, il suffirait d’un peu de courage. Monsieur le Président Barack Obama, les paris gagnés, vous les aimez... Émile Chartier disait : « Le courage nourrit les guerres, mais c’est la peur qui les fait naître. » La procrastination et le vide décisionnel aussi, M. le Président. Votre émissaire en Iran perd son temps. Gagner du temps, les Iraniens, comme les Syriens, sont passés maîtres dans cet art. Le temps, en Syrie, c’est des vies humaines, par centaines chaque jour. Et ça ne fait que commencer. À vous, donc.
Georges MELHEM
UNE ANALYSE QUE JE TROUVE ASSEZ OBJECTIVE. MALHEUREUSEMENT LES TERGIVERSATIONS MÈNENT TOUJOURS À CE QU'ON PRÉTEND VOULOIR ÉVITER ! QUAND AU " WIN - WIN " POURQUOI PAS : TIZ... TIZ...
08 h 32, le 31 août 2013