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À La Une - L’éditorial de Issa GORAIEB

Sur un air de folie

Comme partout dans le monde, était célébrée, hier soir au Liban, la fête de la Musique. La musique, dit-on, adoucit les mœurs. Le problème cependant est que dans notre beau pays, elle n’opère son charme que sur les citoyens aux mœurs déjà acceptablement douces, malgré leur exécrable comportement au volant.

 

Suprême inconscience ou admirable démonstration de résistance culturelle, qui donc le dira ? C’est en vivant pleinement chaque instant que nombre d’entre nous clament leur attachement à la normalité dans la plus dangereusement anormale des situations, qu’ils s’ingénient à occulter les risques évidents d’explosion, qu’ils croient conjurer de la sorte un coquin de sort.


C’est néanmoins sur des notes rien moins que douces que danse en ce moment le pays où se multiplient en effet, comme feux follets, les foyers de tension. La fièvre tripolitaine a gagné Saïda, les heurts sectaires du Akkar ont gagné la Békaa où les localités se livrent une petite guerre des barrages sur les routes, et voici maintenant que les roquettes lâchement lancées à partir de rampes anonymes s’acharnent à jeter de la poudre sur la braise.


Avant même qu’ait sérieusement menacé de voler en éclats la paix civile, c’est sur les ruines du simple bon sens que dansent quant à eux, depuis des années, les sapeurs de démocratie et autres fossoyeurs de l’État. La place manque ici pour rappeler les innombrables atteintes à la sécurité, à l’unité, au système politique du Liban, commises au nom de la résistance armée à l’ennemi israélien. Doublement condamnables étaient celles s’accompagnant d’insulte faite à l’intelligence des gens, telle l’affirmation faite par le Hezbollah que s’il guerroie en Syrie, c’est seulement pour épargner au Liban la guerre civile !


Non moins ahurissante est la campagne de dénigrement visant le président de la République. Le crime de celui-ci est d’avoir porté à la connaissance de l’ONU et de la Ligue arabe les agressions répétées contre le territoire et la population civile du Liban perpétrées tant par les forces régulières de Syrie que par les rebelles de ce pays. Pour ce faire, Michel Sleiman aura dû faire l’impasse sur un ministre des Affaires étrangères dévoué à la cause de Damas et donc sourd aux directives pourtant très claires des chefs de l’État et du gouvernement. Pour l’avoir fait, voilà que le gardien de la Constitution se voit accuser d’abus de pouvoir et même de trahison par des Libanais plus syriens que les Syriens eux-mêmes. Et qui mériteraient bien qu’on leur retourne le compliment. Idéalement assorti, celui-là, de poursuites pour outrage au chef de l’État. Si seulement la justice libanaise n’était pas victime à son tour du venin sectaire, comme le montre l’impensable, l’inqualifiable défection du Conseil constitutionnel...

P-S- Arrivé à ce stade de dégoût indigné et de rage impuissante face à tant de folie destructrice, j’abrège sans regrets. Pour me ruer, moi aussi, à la fête de la Musique.

Issa GORAIEB
igor@lorient-lejour.com.lb

Comme partout dans le monde, était célébrée, hier soir au Liban, la fête de la Musique. La musique, dit-on, adoucit les mœurs. Le problème cependant est que dans notre beau pays, elle n’opère son charme que sur les citoyens aux mœurs déjà acceptablement douces, malgré leur exécrable comportement au volant.
 
Suprême inconscience ou admirable démonstration de résistance...
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