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À La Une - L’éditorial de Issa GORAIEB

Le double schisme

Brunes pour Hitler, noires pour Mussolini, il est des chemises qui trônent à la place de déshonneur dans la sombre légende du crime politique. Comme dans l’Italie fasciste, ce sont les noires qui ont jeté leur dévolu sur notre infortuné pays. Elles se sont illustrées une première fois quand on a vu se retourner contre des Libanais les armes amassées au fil des ans sous prétexte de résistance à Israël. La deuxième fois, il a suffi aux cagoulards de faire une sibylline apparition dans les rues de Beyrouth pour que se trouvent soudain renversés, par simple effet d’intimidation, la majorité parlementaire et le gouvernement.

 

La troisième, cependant, était une fois de trop, comme pourraient bien le constater eux-mêmes un jour les tristes théoriciens de la manière forte qui viennent de montrer leur mépris des libertés publiques. Car ce n’est plus aux autres Libanais (amplement instruits déjà !) qu’était adressé le criminel accès de violence auquel s’est livrée, dimanche dernier, la milice, aux abords de l’ambassade d’Iran. C’est bien à des refuzniks chiites, perçus comme les brebis galeuses d’une communauté qu’elle prétend représenter sans partage, que s’adressait la meurtrière leçon de ce jour-là.


À plus d’un titre, l’événement, marqué par le lynchage d’un jeune étudiant assommé à coups de gourdin avant d’être achevé par balles, constitue un véritable tournant. Pour la première fois en effet, la contestation au sein de cette communauté, tenue à tort pour subjuguée dans son intégralité, a franchi le stade de la simple et prudente grogne pour prendre la forme d’une manifestation à ciel ouvert visant tant le Hezbollah que son patron iranienp, en raison de leurs ingérences militaires dans le conflit de Syrie. La démonstration, à laquelle ont pris part de jeunes élites, était due à l’initiative d’une formation aux effectifs relativement modestes peut-être, mais qui a, du moins, le courage de se réclamer non point du Créateur, mais de ses racines et attaches résolument libanaises.


Non moins révélatrice cependant est la férocité de la répression menée par les tontons macoutes locaux armés. Tout se passe en effet comme si, avec ce double schisme commis contre le parti et la république des mollahs, la cote d’alerte était atteinte, commandant une reprise en main musclée de la communauté. Et cela d’autant que les motifs de grogne ne manquent guère, ces derniers temps, dans les rangs de ladite communauté.


À la triste ronde des cercueils de combattants ramenés de Syrie, aux tirs de représailles des rebelles syriens sur les localités frontalières, vient de s’ajouter ainsi la menace des monarchies pétrolières du Golfe de sévir financièrement et administrativement contre les expatriés proches du Hezbollah. Or cette mesure est susceptible de s’étendre catastrophiquement à d’autres secteurs de la laborieuse diaspora libanaise, comme semblent le suggérer les fermes invites faites à l’État afin qu’il assume son engagement de distanciation par rapport à la guerre de Syrie. Dans la même ligne s’inscrit d’ailleurs le cri d’alarme, pour ne pas dire de détresse, que lançaient hier les organismes économiques. C’est un été pourri – un de plus – que nous offrent, avec une admirable constance, les ennemis de toute normalité.

 

Issa GORAIEB
igor@lorient-lejour.com.lb

Brunes pour Hitler, noires pour Mussolini, il est des chemises qui trônent à la place de déshonneur dans la sombre légende du crime politique. Comme dans l’Italie fasciste, ce sont les noires qui ont jeté leur dévolu sur notre infortuné pays. Elles se sont illustrées une première fois quand on a vu se retourner contre des Libanais les armes amassées au fil des ans sous...

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