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Egypte : vif conflit autour d'une nouvelle loi sur les ONG

Des organisations dénoncent "un degré élevé d'hostilité envers la liberté d'association ainsi qu'une tendance à imposer davantage de contrôle administratif et sécuritaire sur le travail de la société civile".

Le président égyptien Mohamed Morsi. AFP PHOTO / EGYPTIAN PRESIDENCY

Un projet de loi régissant les organisations de la société civile égyptienne, considéré comme un test pour l'engagement du président islamiste Mohamed Morsi envers les idéaux démocratiques du soulèvement de 2011, suscite de vives inquiétudes à domicile et à l'étranger.


M. Morsi a présenté cette semaine le document au Sénat -qui détient la totalité du pouvoir législatif et où les islamistes ont une majorité écrasante- à qui il reviendra de l'adopter, éventuellement amendé.
A peine déposé, le projet est au centre d'une furieuse bataille entre le pouvoir, qui assure vouloir rompre avec le strict contrôle qui prévalait du temps de Hosni Moubarak, et des organisations non-gouvernementales qui estiment qu'il reproduit, voire aggrave, le régime restrictif d'autrefois.


Ce nouveau conflit survient alors que M. Morsi, qui s'apprête à célébrer fin juin le premier anniversaire de son élection, fait déjà face à un clivage politique profond du pays et à une situation économique préoccupante.
"L'Etat ne domine pas (...), n'aspire pas à et ne doit pas dominer la société civile", a assuré le chef de l'Etat dans un discours mercredi. "La priorité à la présidence est d'appuyer le rôle que jouent ces organisations et de lever les obstacles administratifs" auxquels elles font face, a-t-il ajouté. 


Une conseillère du président, Pakinam Sharkawi, a assuré que le projet de loi reflétait un équilibre entre "l'objectif de défendre la sécurité nationale" et celui de "défendre les libertés des groupes de la société civile".
Mais le texte s'est immédiatement heurté à l'opposition de nombreuses organisations de la société civile, qui accusent les Frères musulmans, dont est issu M. Morsi, de poser les bases d'"un nouvel Etat policier".
Quarante organisations disent dans un communiqué commun publié vendredi que le projet de loi "montre un degré élevé d'hostilité envers la liberté d'association ainsi qu'une tendance à imposer davantage de contrôle administratif et sécuritaire sur le travail de la société civile".


Washington "préoccupé"
In fine, le projet soutenu par M. Morsi, soumettra les ONG "à une stricte supervision exécutive" et donne à l'appareil sécuritaire le droit "d'étouffer graduellement le travail des organisations des droits de l'Homme en bloquant leurs sources de financement".


Ce projet est suivi de près par les pays occidentaux et en particulier les Etats-Unis, gros pourvoyeurs d'assistance aux ONG égyptiennes, et qui avaient déjà envoyé des signaux d'avertissement lors des travaux préparatoires du projet.
Vendredi, Washington s'est déclaré "préoccupé" par la mouture du texte envoyée pour approbation aux sénateurs égyptiens. Le département d'Etat a, dans une déclaration, estimé que le projet "impose un contrôle gouvernemental significatif ainsi que des restrictions aux activités et au financement des groupes de la société civile".
Des perquisitions des locaux d'ONG égyptiennes et américaines au Caire l'an dernier, et le renvoi de leurs employés devant la justice sous des accusations de financements étrangers illicites, avaient provoqué de fortes tensions entre Washington et le pouvoir militaire de transition en place à l'époque en Egypte.


Le projet vise à créer une commission, dirigée par le ministre des Affaires sociales, qui devra notamment approuver tout projet de financement étranger. Cette commission comprendra des représentants de la société civile et, contrairement à des versions antérieures du texte, il n'y a plus de référence explicite aux services de sécurité.

"Je confirme que le projet retire le rôle de la sécurité", a assuré à la presse un des rédacteurs du texte, Waël Zoghby.
Mais le président de la commission ayant le droit de nommer des membres de son choix, les ONG redoutent que dans la pratique ces redoutables services ne reprennent leur place.


Cette commission pourra rejeter les demandes des ONG si elles sont jugées illégales -comme par exemple celles qui viseraient à financer une campagne politique-. L'entourage de M. Morsi souligne qu'en cas de conflit, les tribunaux seraient chargés d'arbitrer.


L'organisation Human Rights Watch, basée à New York, estime dans un communiqué que ce nouveau régime juridique, malgré les assurances du pouvoir, permet de maintenir la possibilité pour le gouvernement et son puissant appareil sécuritaire de "restreindre les financements et les activités" des ONG. 

 

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