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Liban - Souvenirs

« Badna Naaref », un documentaire sur la mémoire orale de la guerre du Liban

Des images de la guerre du Liban, des adultes qui se souviennent de leur propre expérience du conflit et des enfants qui parlent de combats qu’ils n’ont jamais vécus. « Badna Naaref » est un documentaire sur la mémoire orale de la guerre, signé par la réalisatrice Carol Mansour.

Les générations qui ont vécu la guerre ont toutes des images, des bruits ou des situations gravés dans leur mémoire, même si elles n’en parlent jamais. Et il y a d’autres générations, plus jeunes, qui ne savent pas ce qui s’est passé. Un projet intitulé «Badna Naaref», sur la mémoire de la guerre, soutenu notamment par Act for the Disappeared, le Cemam, le Centre international pour la justice transitionnelle ainsi que par Umam, a vu le jour. Parmi les activités incluses dans ce projet, travailler auprès de plusieurs écoles, fréquentées donc par des élèves appartenant aux diverses communautés du pays, sur la mémoire orale de la guerre. Dans ce cadre, les enfants, encouragés à entreprendre des recherches relatives à la guerre, se sont mis à poser des questions à leurs proches, leurs parents et leurs voisins.


Le documentaire de Carol Mansour filme ces enfants, qui livrent leurs impressions sur leur expérience, mais aussi quatre adultes qui racontent leur mémoire de la guerre : Imane Arab, qui parle de sa maison brûlée en plein Beyrouth et de son quotidien dans une ville où des barricades ont été édifiées pour diviser les habitants, Wadad Halawani, qui évoque l’enlèvement de son mari et sa lutte durant des années pour protéger ses enfants, Nadim Ghostine obligé de quitter son Beyrouth-Ouest pour vivre de l’autre côté des barricades, et Mona Hallak qui se souvient surtout des francs-tireurs.


Quatre personnes parlent donc de leur quotidien, sur un fond de photos et de films tirés des archives qui replongent le spectateur, lequel veut oublier toutes les atrocités vécues, droit dans l’horrible guerre du Liban.
Il y a aussi des prises de vue de la maison Barakat, élégant bâtiment du début du siècle dernier, squatté par des snipers durant les longues années de la guerre. Cet immeuble jaune à Sodeco devrait abriter dans les années à venir un musée sur la mémoire de la guerre.


Dans un entretien avec L’Orient-Le Jour, Carol Mansour souligne que « les photos d’archives que j’ai choisies font partie de ma mémoire de la guerre, alors que je grandissais à Beyrouth ». « Je me suis sentie dans l’obligation de retrouver ces photos pour les partager avec les nouvelles générations. La sélection a pris beaucoup de temps, parce que j’ai travaillé sur les détails. Et je remercie dans ce cadre les photographes Ramzi Haïdar (ancien photographe à l’AFP) et Jamal Saïdi (photographe chez Reuters) qui ont mis à ma disposition leurs collections personnelles. Malheureusement, les archives des films sont très difficiles à trouver, surtout avec l’état des archives de Télé-Liban ; la chaîne qatarie al-Jazira nous a autorisés à utiliser les films qu’elle avait montrés dans son documentaire sur la guerre du Liban », a-t-elle raconté.


À la question de savoir qu’en est-il de sa propre mémoire de la guerre et quel est son souvenir le plus vif dans ce cadre, Carol répond : « Le fait d’écouter les histoires de personnes de ma génération m’a rappelé mes propres souvenirs, la peur et l’insécurité. Ma mémoire la plus vive demeure celle de l’enlèvement de l’ami de mon cousin. Sa mère lui a gardé durant des années sa place... elle dressait la table en lui réservant ses couverts et ses assiettes dans l’espoir qu’il reviendra. Ça m’avait tellement marquée que tous les soirs à dîner, je comptais les assiettes de ma propre famille pour m’assurer que nous étions encore tous présents ensemble. »
Carol Mansour, qui a traité notamment dans ses documentaires la situation des employées de maison au Liban, la loi sur la nationalité et l’injustice faite dans ce cadre aux femmes libanaises, les réfugiés politiques qui attendent de partir vers d’autres cieux, travaille ses films avec son sens du détail et sa sensibilité. Et dans ce documentaire sur la mémoire de la guerre, ces deux traits de sa personnalité ne sont qu’exacerbés. Probablement parce qu’elle a voulu, indirectement, partager sa propre expérience de la guerre avec les spectateurs et surtout les jeunes générations qui n’ont aucun souvenir du conflit.


Ce documentaire ne peut en aucun cas laisser indifférents ceux qui ont vécu la guerre du Liban et, selon leur état d’esprit, soit ils s’éloigneront de l’écran pour penser à d’autres idées plus joyeuses et moins pesantes, soit ils continueront le film jusqu’au bout pour se souvenir qu’il faut travailler pour la paix, se rappeler de la guerre, mais faire en sorte que les situations et les images présentées dans le film ne se répètent jamais, que ce soit au Liban ou ailleurs.
La première projection du film aura lieu le mercredi 27 mars, à 18 heures, au théâtre Beryte, au campus des sciences humaines de l’Université Saint-Joseph, à la rue de Damas.

Les générations qui ont vécu la guerre ont toutes des images, des bruits ou des situations gravés dans leur mémoire, même si elles n’en parlent jamais. Et il y a d’autres générations, plus jeunes, qui ne savent pas ce qui s’est passé. Un projet intitulé «Badna Naaref», sur la mémoire de la guerre, soutenu notamment par Act for the Disappeared, le Cemam, le Centre international...
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