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À La Une - La situation

Le Liban étouffe sous les crises et aucune solution en vue

Les grévistes devant le ministère des Finances : personne n’a rien compris hier aux propositions de Mohammad Safadi !    Photo Hassan Assal

Crise économique, crise sociale, crise sécuritaire, crise constitutionnelle. C’est à une cascade de crises que le gouvernement – et les Libanais – font face en ce moment, sans qu’une éclaircie ne soit en vue.


« La dernière chose dont le Liban a besoin, en ce moment, c’est d’une explosion sociale. » L’avertissement est venu hier du ministre des Affaires sociales, Waël Bou Faour. Il est aussi inquiétant que soudain. Avec près de 900 000 Syriens au Liban, travailleurs et main-d’œuvre compris, la capacité d’accueil du pays a été dépassée, a averti le ministre. Les pressions sur l’infrastructure (eau et électricité), la concurrence déloyale pour nombre de petits métiers d’artisanat (tôliers, tailleurs, etc.), la hausse de la criminalité et, dans une certaine mesure, le fossé culturel compliquent la situation.


Ces problèmes s’ajoutent, pour le Liban, à celui d’une nouvelle grille des salaires dans le secteur public accordée et refusée à la fois, par un Premier ministre dont l’amateurisme dans ce domaine semble définitif et qui fait traîner un secteur public frustré et exaspéré depuis 18 mois.


(Pourtant, quand il s’agit d’investissements, M. Mikati ne perd pas le Nord : peu après avoir, une fois de plus, répondu aux grévistes par un haussement d’épaules, on l’a vu assister hier à un forum économique centré sur les possibilités d’investissement... en Hongrie).


En tout état de cause, la grève commence à s’essouffler. Elle commence, aussi, à aigrir les rapports entre les enseignants et les comités de parents. Certains de ces derniers proposent, de façon irréfléchie et parfois scandaleuse, que les jours de grève soient déduits des salaires des enseignants, sans penser que les revendications de ces derniers sont légitimes ni prendre conscience que leur métier est l’un des plus difficiles au monde.
Le gouvernement parie, semble-t-il, sur cet essoufflement, pour continuer à faire la sourde oreille, en affirmant que l’économie nationale ne peut supporter cet accroissement de dépenses (1,5 milliard de dollars), sans que des recettes équivalentes ne leur soient trouvées.

 

(Lire aussi : Grille des salaires : cafouillage au sein de la commission ministérielle)


On n’emprunte pas pour augmenter les salaires, répète-t-on, à raison, dans les cercles du pouvoir, mais on refuse aussi de chercher l’argent nécessaire ailleurs que dans des pis-aller et des recettes indirectes.
Toutes les recettes difficiles à percevoir sont systématiquement évitées, que ce soit celles que l’on doit percevoir pour des biens-fonds maritimes impunément confisqués au domaine public, ou encore les taxes que l’on peut imposer aux profits réalisés dans le secteur bancaire... par ailleurs principal bailleur de fonds de l’État.


Comble d’ironie, aucun ministre présent ne semble avoir compris hier les idées avancées hier par leur collègue des Finances, Mohammad Safadi, pour assurer au Trésor, de nouvelles recettes. M. Safadi, qui préside une commission ministérielle chargée de réfléchir sur la question, propose semble-t-il d’échelonner les majorations dues au titre de la nouvelle grille des salaires, ainsi que celles des grades sur la base desquels ces majorations sont accordées. De quoi faire perdre la tête aux plus avertis, d’autant que les grévistes rejettent toute idée d’échelonnement des majorations attendues, ce qui est normal quand on songe à la modicité de leurs salaires (entre 1 et 1,3 million de LL par mois, dans le secteur de l’enseignement).


Selon une source informée, des avertissements discrets ont été adressés au gouvernement par des instances économiques internationales, qui affirment que des majorations ne doivent pas être accordées quand le taux de croissance de l’économie nationale est négatif. La commission présidée par M. Safadi pourrait donc se retrouver demain, ou lundi, pour continuer à chercher...

Crise constitutionnelle
À ce problème insoluble sur base des données actuelles, il faut ajouter celui de la véritable épreuve que représente l’épuisante recherche d’une nouvelle loi électorale. Le mécanisme de renouvellement des représentants de la nation et celui des élites qui lui est corollaire sont en panne. Le système politique est grippé, avec les risques d’explosion que cela représente. Le ministre de l’Intérieur y a fait allusion, hier, en annonçant que le collège électoral sera convoqué, avant le 11 mars, sur la base de la loi électorale de 1960, en vigueur tant qu’aucune autre ne l’a remplacée. Pour torpiller le processus, des attentats pourraient être montés, a affirmé, un peu candidement, M. Charbel, qui a ajouté qu’aucune initiative constitutionnelle prévoyant une extension du mandat de la Chambre ne doit être attendue du gouvernement. Sur ce plan-là, on continue donc de piétiner.

 

(Lire aussi : Le projet orthodoxe de nouveau en lice, l'éclairage de Scarlett Haddad)

Menaces à la sécurité
Ces impasses économiques, sociales et constitutionnelles sont aggravées par les menaces à la sécurité provenant du conflit sunnito-chiite, que le patriarche Raï a évoqué hier à Moscou. À Tripoli, à Ersal, dans des zones mitoyennes entre le Liban et la Syrie, mais surtout à Saïda, à proximité du plus large camp palestinien au Liban, le feu couve sous la cendre.

 

(Lire aussi : Siniora et Bahia Hariri dénoncent les « menaces dissimulées » dans le discours de Nasrallah)

 

Le Hezbollah a demandé hier à cheikh Maher Hammoud, un dignitaire sunnite qui lui est proche, de mettre en garde contre une explosion qui ouvrirait la voie à un afflux de groupes salafistes sunnites au Liban. Le dignitaire religieux l’a fait on ne peut plus clairement. Mais il a oublié de mentionner la responsabilité qu’assument, sur ce plan, le Hezbollah et l’Iran.

 

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