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À La Une - transition

Tunisie : l'instance chargée des médias se saborde

L'Inric accuse le pouvoir "de recourir à des moyens de censure et de désinformation".

Le Premier ministre tunisien Hamadi Jebali (g) lors d'une journée consacrée à la liberté de la presse, le 4 mai 2012 à Tunis. Photo d'archives. Fethi Belaid/

L'instance tunisienne chargée de réformer le secteur des médias pour garantir leur indépendance s'est sabordée mercredi, une décision qui vient alourdir encore le climat politique en Tunisie.


"L'Instance met en garde contre la gravité de la situation dans le domaine de l'information", a déclaré Kamel Labidi, annonçant la fin de l'activité de l'Instance indépendante chargée de réformer l'information et la communication (Inric) qu'il dirige.
Il a accusé "le gouvernement de recourir à des moyens de censure et de désinformation".
Il a relevé que "depuis que ce gouvernement a pris le pouvoir, nous avons remarqué l'absence de mesures concrètes pour réformer le secteur" des médias.


Ce journaliste, contraint à l'exil sous le régime du président déchu Ben Ali, a souligné que le gouvernement dominé par le parti islamiste Ennahda a "ignoré" le rapport de l'Inric de fin avril et qui notait déjà des "dérives" et appelait à "remédier à la destruction systématique des médias".
Le gouvernement tunisien n'avait pas réagi en milieu de journée.


Pour la journaliste indépendante Naziha Rjiba, il revient désormais à la société civile et aux citoyens de tout faire pour garantir la liberté d'expression.
"Il y a dans la société civile des composantes ainsi que des citoyens qui vont défendre la liberté de la presse, le citoyen n'est plus passif comme avant", a-t-elle dit à l'AFP.
"Je regrette que Ennahda n'a pas réagi favorablement à l'Inric qui a présenté une conception pour que les médias tunisiens soient libres, indépendants et professionnels", a-t-elle ajouté.


L'Inric a été créée après la révolution qui a renversé le régime de Ben Ali en 2011 afin de réformer le secteur des médias, notamment publics, pour garantir la liberté d'expression et de la presse dans le pays.
Cet organe et plusieurs organisations de défense des droits de l'Homme ont dénoncé ces derniers mois le manque d'empressement du gouvernement à garantir l'indépendance des médias.

Il s'agit notamment de l'application des décrets 115 et 116 destinés à garantir la protection des journalistes et jetant la base d'un cadre régulateur pour les nouveaux médias audiovisuels.


L'Union européenne avait de son côté conditionné en mai le versement de 100 millions d'euros de fonds à la Tunisie à la mise en œuvre de ces textes.


Le monde médiatique tunisien a été marqué ces derniers mois par une série de scandales. Le dernier en date concerne le limogeage controversé samedi de Sadok Bouaben, directeur de la chaîne al-Watanya, et la nomination récente de neuf directeurs de radios publiques sans consultations préalables.
M. Bouaben a été demis, selon les médias officiels, car sa chaîne a invité à l'antenne une ex-responsable du Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), le parti du président déchu.


Mardi, l'organisation de défense de la liberté de la presse Reporters sans frontières (RSF) avait ainsi accusé le gouvernement tunisien de chercher à contrôler les médias publics.


L'annonce de l'Inric intervient aussi dans un contexte de vives tensions politiques entre le gouvernement et le chef de l'Etat, Moncef Marzouki.
La présidence s'est offusquée de l'extradition controversée de l'ancien Premier ministre libyen Al-Baghdadi Al-Mahmoudi le 24 juin vers Tripoli sur décision du chef du gouvernement tunisien, l'islamiste Hamadi Jebali.


D'autres désaccords viennent alourdir le climat entre les partenaires de la coalition au pouvoir. Ainsi, la décision de M. Marzouki la semaine dernière de limoger le gouverneur de la Banque centrale, Mustapha Kamel Nabli, semble être restée sans effet.

 

 

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