Le médiateur international Kofi Annan, arrivé lundi en Syrie, s'est dit "horrifié" par le massacre de Houla (centre) qui a mis encore un peu plus en péril son plan de paix.
"Je suis personnellement choqué et horrifié par les événements tragiques d'il y a deux jours", a déclaré M. Annan à son arrivée à Damas, en référence au massacre perpétré dans cette ville où 108 personnes, dont une cinquantaine d'enfants, ont péri vendredi, selon l'ONU. "C'était un acte répugnant, aux conséquences profondes", a-t-il ajouté.
Selon son porte-parole, M. Annan doit rencontrer le président Bachar el-Assad, le général Robert Mood, chef des observateurs en Syrie, ainsi que des représentants de l'opposition et de la société civile.
Le ministre des Affaires étrangères Walid Mouallem a reçu Kofi Annan et le général Mood en fin d'après-midi, a constaté un photographe de l'AFP. Selon l'agence officielle Sana, le ministre syrien a expliqué à M. Annan "la vérité sur ce qui se passe en Syrie et les attaques contre l'ordre qui visent à semer le chaos" en dépit "des réformes que la Syrie adopte dans tous les domaines".
Cette visite en Syrie, la deuxième de M. Annan depuis sa désignation comme émissaire il y a trois mois, intervient alors que le cessez-le-feu instauré le 12 avril dans le cadre de son plan est plus que jamais ignoré.
Dimanche, 87 personnes ont été tuées, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), l'un des bilans les plus lourds depuis la trêve.
Lundi, 36 personnes ont encore péri, dont 15 soldats et deux rebelles dans de violents combats près de Damas. En soirée, l'OSDH a fait état de tirs et d'explosions entendus dans le village de Taldo, proche de Houla.
Des manifestations massives se sont par ailleurs déroulées pour le troisième jour consécutif pour dénoncer le massacre de Houla. A Habite, dans la province d'Idleb (nord-ouest), une banderole proclamait "L'ONU nous tue", témoignant de la colère grandissante des militants contre la communauté internationale accusée d'inaction.
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné les autorités pour l'attaque à Houla, dénonçant dans une déclaration adoptée à l'unanimité "des bombardements par les chars et l'artillerie gouvernementale contre un quartier résidentiel".
Le Conseil a exigé que Damas cesse immédiatement d'utiliser des armes lourdes et qu'il retire ses forces des villes, conformément au plan Annan.
Les 15 pays membres ont réaffirmé leur soutien aux efforts de l'émissaire et l'ont chargé de transmettre "dans les termes les plus clairs" leurs exigences au gouvernement syrien.
La Russie, alliée de Damas, s'est jointe à ses 14 partenaires, avant d'estimer que les "deux parties", régime et rebelles, étaient impliquées dans le massacre, arguant de la présence de blessures à bout portant en plus des tirs d'artillerie.
Moscou, sous une pression croissante pour lâcher Damas, a pris ses distances, tout en accusant certains pays d'alimenter les violences en visant avant tout un changement de régime à Damas.
"Nous ne soutenons pas le gouvernement syrien. Nous soutenons le plan de Kofi Annan", a déclaré le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov, soulignant qu'il était plus important de "mettre fin à la violence" que de "se préoccuper de qui est au pouvoir en Syrie".
Le président français François Hollande et le Premier ministre britannique David Cameron ont pour leur part convenu d'"accroître la pression" sur M. Assad et confirmé la prochaine tenue à Paris de la troisième conférence des "Amis du peuple syrien".
La présidence française a par ailleurs dénoncé lundi la "folie meurtrière" du régime de Damas après le massacre de Houla. "Le massacre de Houla et les événements de ces derniers jours en Syrie et au Liban illustrent, une fois de plus, le danger des agissements du régime de Bachar el-Assad pour le peuple syrien", écrit l'Elysée dans un communiqué. "La folie meurtrière du régime de Damas représente une menace pour la sécurité régionale et ses responsables devront répondre de leurs actes", ajoute la présidence française.
Le Conseil national syrien (CNS), principale coalition de l'opposition, a de son côté réclamé aux pays qui le soutiennent de lui fournir des "moyens efficaces d'autodéfense" pour faire face à la répression. Il a déploré que le Conseil de sécurité ait publié "une déclaration non contraignante au moment où des enfants étaient massacrés au vu et au su du monde entier", dénonçant "un acte de complaisance honteux".
Les Frères musulmans de Syrie ont également accusé le Conseil de sécurité d'envoyer un "mauvais message" au régime syrien, en se contentant de le condamner sans prendre de mesure à son encontre.
Après le massacre de Houla, le chef démissionnaire du CNS Burhan Ghalioun a appelé dimanche la population à prendre les armes si l'ONU n'intervenait pas par la force.
La veille, l'Armée syrienne libre (ASL), composée essentiellement de déserteurs, avait averti qu'elle ne serait plus liée par le plan Annan si l'ONU n'agissait pas rapidement.
Téhéran et Pékin, qui soutiennent Damas, ont condamné ce carnage, tout en estimant qu'il fallait identifier les responsables, tentant ainsi d'exonérer les autorités. L'Arabie saoudite a pour sa part "vivement dénoncé" le massacre, soulignant "l'importance pour la communauté internationale d'assumer ses responsabilités et d'arrêter l'effusion de sang".
Les autorités de Damas ont de leur côté nié "totalement toute responsabilité gouvernementale dans ce massacre terroriste qui a visé les habitants". Une commission conjointe armée-justice, chargée par Damas d'enquêter sur ces violences, les plus graves depuis l'entrée en vigueur du cessez-le-feu, doit publier ses conclusions mercredi.
Human Rights Watch a de son côté réclamé une enquête de l'ONU, estimant que "tant que les combattants peuvent opérer en toute impunité, les horreurs en Syrie vont continuer".
En 14 mois, les violences ont fait plus de 13.000 morts, dont plus de 1.800 depuis le début de la trêve, selon l'OSDH.
commentaires (7)
Je t'ai cité la déclaration du Conseil de Sécurité adoptée à l’Unanimité ! Tout est dans le Texte Précité !
Antoine-Serge KARAMAOUN
13 h 03, le 29 mai 2012