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Lifestyle - Objets et histoire

Princesse brouhaha...

Un brouhaha, c’est un tumulte, un tohu-bohu, un vacarme... Ça c’est pour la définition. Quant à l’étymologie, quelques linguistes arguent du fait que le mot est une onomatopée, imitant le bruit, d’autres présentent différentes théories sur son origine. Mais la plus plausible serait celle avancée par Walther von Wartburg, un linguiste allemand. Pour lui, il s’agirait de l’emprunt – déformé – d’une formule hébraïque tirée du psaume 113 et souvent répétée à la synagogue « Barouh abba » qui signifie : béni celui qui vient. Sans doute des non-juifs invités à la synagogue ont-ils entendu cette salutation, et comme tous les juifs le répétaient à leur passage, cela faisait beaucoup de bruit...
Et à propos de bruit, voici l’histoire de Marie-Studelmine-Letitia Wyse, qui préférait se faire appeler princesse Bonaparte, étant la petite-fille de Lucien, frère de Napoléon. Son père, l’honorable Thomas Wyse, avait représenté le roi d’Angleterre en Grèce... et sa mère, née Bonaparte. Marie venait de quitter l’Institution nationale de la Légion d’honneur à Saint-Denis. Elle y avait passé toute son enfance et sa jeunesse. La discipline rigoureuse de cet établissement l’avait irritée. Elle voulait vivre et se moquait bien du diplôme d’institutrice qu’on lui avait décerné. « Moi, institutrice ! rageait-elle en se mirant
dans une glace. Je suis trop belle pour passer ma vie à enseigner ! Et puis, ne suis-je pas une Bonaparte ? » Au cours d’un dîner, elle rencontra Frédéric de Solms. Ni jeune ni beau, mais riche. Généralement dédaigné des femmes, il n’en revenait pas du succès obtenu auprès de la ravissante Bonaparte. Il devint fou d’amour de la jeune fille, puis demanda sa main et lui reconnaît 800 000 francs de dot. Et voilà comment Marie-Studelmine-Letitia Wyse entra dans le monde. C’était en 1849.
Depuis une année, Louis-Napoléon présidait aux destinées de la France. Premier président de la République, il résidait à l’Élysée. Dans ses salons, ce cousin de Mme de Solms préparait le coup d’État. Sa réputation de beauté ne suffisait pas à cette remuante femme de 19 ans. Son esprit étincelant attirait foule à ses réceptions. Elle publiait des romans et des pièces de théâtre aux titres révélateurs : Le Dernier rêve d’une ambitieuse ou Si j’étais reine ; elle jouait la comédie, assistée de nombreux hommes célèbres devenus ses intimes et dont certains poussaient l’intimité jusqu’aux portes de sa chambre.
Sa conduite finit par faire jaser en haut lieu. « Ma jolie petite-nièce, déclara le prince président, est une perfection de vertu, elle les a toutes, les bonnes et les mauvaises, elle joue de l’éventail à ravir, par malheur elle joue aussi de la plume à tort et à travers, et fait trop de bruit à mon gré. » Cette phrase s’adressait à M. de Maupas, préfet de police, et se terminait sur un ordre : « Veuillez laver la tête de ma cousine. Je ne veux pas que ses écarts portent préjudice au nom que je porte. » Le préfet n’y alla guère par trente-six chemins. Il convoqua Mme de Solms dans son cabinet. Irritée qu’un Maupas eût osé donner un ordre à une petite-nièce de Napoléon Ier, et pour se venger, elle publia dans des journaux de l’opposition des critiques à l’égard du prince président. L’effet ne tarda pas, son cousin signa un ordre d’expulsion.
Expulsée de France et divorcée, Mme de Solms s’installa en Savoie, province appartenant alors à l’Italie, et prit le titre de « Princesse Bonaparte ». Devenu empereur, Napoléon III s’irritait encore à son sujet. Il lui déniait ce titre de Bonaparte qui ne lui appartenait pas, puisque le père de celle-ci s’appelait Wyse. Les journaux épiloguèrent autour du différend. En Italie, elle attira du monde par la réputation de sa beauté, de son talent littéraire et par le scandale attaché à son nom. Séduit, le ministre Urbain Ratazzi demanda sa main. Le mariage fut célébré en grande pompe. Mme de Solms devint, en 1863, Mme Ratazzi. Pendant dix années, Mme Ratazzi vécut dans l’ivresse !
Reconnaissant qu’il s’était fourvoyé en donnant son nom à Marie, Ratazzi demanda au Saint-Siège l’annulation de son mariage et l’obtint. Il faut le croire puisqu’elle épousa en troisièmes noces un riche et noble député espagnol, le señor Luis de Rute. La vie tapageuse n’en recommença pas moins. Chez elle, il y avait une porte ouverte ; quiconque voulait se faire admettre n’avait qu’à sonner. Quand M. de Rute mourut, en 1889, sa veuve ne voulut pas désarmer. Celle que les poètes avaient chantée ne sut pas vieillir. On se moquait d’elle à présent, on raillait ses toilettes restées tapageuses, le fard éclatant dont elle ornait sa peau plissée, son affectation à paraître à toutes les premières, toutes les mondanités. Elle y venait à peu près myope, appuyée sur deux cannes et ruminant l’histoire de sa vie, le succès de ses romans, la splendeur de sa jeunesse.
Que demeurait-il de tout
cela ? Une petite vieille dont les robes démodées faisaient rire les passants et qui s’éteignit en 1902, à l’âge de 72 ans. Le journaliste Alphonse Karr, avec qui elle s’était brouillée, se venge en la faisant apparaître dans sa revue satirique, Les Guêpes, sous le sobriquet de « Princesse Brouhaha ». Hahaha ! Drôle de vie !

Sources principales :
« L’Histoire comme un roman », Claude Ketel
Princessesetroyautes.com
Un brouhaha, c’est un tumulte, un tohu-bohu, un vacarme... Ça c’est pour la définition. Quant à l’étymologie, quelques linguistes arguent du fait que le mot est une onomatopée, imitant le bruit, d’autres présentent différentes théories sur son origine. Mais la plus plausible serait celle avancée par Walther von Wartburg, un linguiste allemand. Pour lui, il s’agirait de...
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