Vivement la révolution !...

Jusqu’à quand devrons-nous chercher notre futur loin de nos proches ? Pourrons-nous au moins espérer ou ne nous reste-t-il qu’à prier pour que nos enfants et petits-enfants aient la chance de vivre paisiblement dans leur pays ?
Je n’en suis pas sûre, mais le Liban pourrait être le pays qui a le plus généré de jeunes immigrants. Sinon, il est sûrement bien classé dans ce domaine. Si on rassemble toutes les rues, les maisons, tous les quartiers libanais du monde, nous pourrions créer un nouveau Liban dont la superficie serait beaucoup plus grande que celle d’aujourd’hui.
Ce pauvre Liban ! Il ne fait qu’attirer les touristes pour quelques jours et éloigner ses propres habitants pour
toujours.
Le problème, le plus grand, c’est que ni lui ni eux ne sont contents... Lui se sent dépeuplé, vieilli, moche. Et eux déracinés, sans famille, ni appartenance claire.
Je m’adresse aux politiciens et leur demande de remarquer – s’ils savent le faire – le nombre d’immigrants libanais. Le nombre de jeunes obligés de fuir.
Je les invite à calculer le pourcentage de chrétiens, de chiites, de sunnites, de druzes, d’Arméniens, d’essayer de réaliser, pour une seconde, que ces gens-là ne sont pas que des chiffres.
Ça pourrait sûrement vous choquer, mais oui, ces jeunes sont comme vous, chers politiciens, des personnes et non pas des chiffres. Ils pensent, ils respirent, ils bougent. Par contre, ils ne savent pas mentir, enfin, disons que ce ne sont pas des professionnels du parler faux.
Pourriez-vous quitter votre chaise, histoire de mieux voir ?
Vous êtes très importants bien sûr, très puissants évidemment, mais il faudra se promener de temps à autre dans les rues où vivent vos concitoyens pour mieux comprendre ce qu’ils veulent. N’êtes-vous pas là pour eux ? À tout le moins, ne le prétendez-vous pas ?
Il vous faudra peut-être des voitures un peu moins luxueuses, avec moins de vitres teintées, pour voir les vraies couleurs de ce quotidien libanais un peu pourri. Pour mieux remarquer le ciel pollué. Et afin de discerner les centaines de couleurs et de symboles que vous avez créés pour vous partager tranquillement les richesses de ce peuple.
Pensez un peu aux jeunes en tant qu’êtres humains et ne pensez pas à eux seulement pendant la seule saison des élections. Savez-vous que ces jeunes souffrent ? Savez-vous qu’ils rêvent de rentrer chez eux ? J’en connais, moi, une trentaine. Ils appartiennent à nulle part à présent. Ils sont citoyens de la nostalgie et non pas du monde. Ils vivent dans le passé, ils veulent rentrer chez eux, mais ils ne peuvent pas le faire. Ils ont du mal à voir le Liban tellement décalé du reste du monde.
Vous êtes puissants, oui, mais négativement, vous êtes doués pour les échecs. Vous confondez tout et dites n’importe quoi. La seule révolution qu’il y a à faire au Liban, c’est une révolution dans les consciences, quand le peuple réalisera combien il dépasse culturellement, socialement, académiquement ceux qui, malheureusement, le manipulent. Une révolution qui lui permettra de se rendre compte que sa vie sociopolitique n’obéit qu’à son seul instinct, à son appartenance religieuse, à ses habitudes omniprésentes dans son inconscient. Une révolution qui lui donnera l’occasion de réaliser qu’en fin de compte, il n’est plus permis de nos jours qu’un politicien se mêle de religion et qu’un homme de religion se mêle de politique. Cela est désormais inacceptable. Si un jour il nous arrivera de rêver d’un changement, cette révolution-là constituera notre seule échappatoire.