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Noyés dans « la prose », Sarkozy et Merkel face à « une ruse de l’histoire »

Domicile conjugal


Peu importe si c’est lui qui imprime le rythme en refusant d’aller aussi loin qu’elle le souhaite ou si c’est elle qui lui impose ces laundry lists qui se suivent et ne se ressemblent pas. Peu importe si lui se fait tacler en Napoléon le Petit et qu’elle se fasse bousculer par le nonagénaire patriarche Helmut (Schmidt). Peu importe si lui se fait railler au quotidien et qu’elle a généré, sciemment ou pas, un revival de germanophobie, rallumant ici des feux et là des flammèches par trop mal éteint(e)s. Le fait est que la doïka Sarkozy-Merkel représente à elle seule depuis plus de quatre ans cet Exécutif européen que ni José Manuel Durao Barroso, et encore moins ce brave Herman Van Rompuy, n’ont pu et ne peuvent incarner. Une doïka furieusement hybride, comme rarement la France et l’Allemagne en ont connue. Autant de Gaulle-Adenauer et ce classieux traité de l’Élysée étaient et restent profondément fondateurs ; autant Pompidou-Brandt était falot tellement les deux hommes étaient occupés ailleurs, l’un partagé entre les moyens de locomotion et une dégaullisation soft de la diplomatie française, l’autre immergé dans son Ostpolitik ; autant Giscard d’Estaing-Schmidt était dynamique et guilleret et Mitterrand-Kohl charismatique et cinématographique dans son romantisme effréné (c’est là sans doute, malgré la petite moue dubitative des puristes, que tout est devenu irréversible, que le Plus jamais chambre à part est devenu loi fondamentale...) ; autant, enfin, Chirac-Schröder et leur Blaesheim protokol étaient stakhanovistes et finalement, étrangement überorganisés, autant Sarkozy-Merkel est... improbable. Et pourtant. Sur le papier, la roideur et le cartésianisme rigide de la chancelière, le bagout et les mains adolescentes du président ne pouvaient produire que de mauvaises étincelles. En réalité, cette fausse Bette Davis et ce faux Jay-Z ont fait ce que chaque couple marié de raison/force devrait faire. Privilégier un pragmatisme absolu. Prendre sur soi. Envisager des concessions. Bien choisir ses amant(e)s. Apprendre à s’amuser : Silvio Berlusconi n’oubliera jamais. En un mot : tout (ré)inventer et beaucoup accepter pour ne pas vivre seul. Et ça marche. Surtout qu’elle comme lui ont oublié d’être sots, malgré d’immenses sottises. Surtout qu’elle et lui ont cette chance insolente des cocus magnifiques : l’histoire, cette gueuse, leur a offert un somptueux cadeau sur un plateau de platine : la crise de l’euro. Aiguillonnés sans cesse du dedans par leurs oppositions respectives et du dehors par des partenaires maillons faibles ou grands capricieux, Nicolas Sarkozy et Angela Merkel savent que le chapitre qui leur sera consacré dans l’encyclopédie France-Allemagne sera de taille. Elle et lui savent que l’un sans l’autre, de par leur géographie, leur histoire et leur à venir communs, la France comme l’Allemagne se nanisera vite. Et même si l’Hexagone continue encore de regarder son gargantuesque et immense voisin d’en haut : Paris parle plus fort sur l’échiquier planétaire et il y a un peu de françallemagne dans tout cela, peut-être pour continuer d’occulter les dommages collatéraux de la réunification allemande, la doïka Merkozy, n’en déplaise aux uns et aux autres, est un modèle, aussi fragile soit-il, d’équilibre. Que seule une troïka, avec tout ce qu’un ménage à trois implique comme jeux érotiques et autres émulations aphrodisiaques, peut éventuellement faire tanguer. David Cameron le sait.
Peu importe si c’est lui qui imprime le rythme en refusant d’aller aussi loin qu’elle le souhaite ou si c’est elle qui lui impose ces laundry lists qui se suivent et ne se ressemblent pas. Peu importe si lui se fait tacler en Napoléon le Petit et qu’elle se fasse bousculer par le nonagénaire patriarche Helmut (Schmidt). Peu importe si lui se fait railler au quotidien et qu’elle a...