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À La Une - Polémique

En France, la vie devient plus difficile pour les étudiants étrangers

Après le décret sur les ressources financières, la circulaire sur la possibilité de travailler...

Le ministre de l’Intérieur, Claude Guéant, est engagé dans une politique de réduction de l'immigration légale.

Une circulaire des ministres français de l'Intérieur, Claude Guéant, et du Travail, Xavier Bertrand, visant à réduire l'immigration professionnelle suscite l’indignation des étudiants étrangers et l’inquiétude des grandes écoles ainsi que d’une partie de la classe politique française. Cette circulaire restreint la possibilité de travailler en France pour les diplômés étrangers au terme de leurs études.

 

A la suite de cette circulaire, qui a été émise le 31 mai dernier, de nombreux diplômés étrangers de niveau master ayant eu des propositions d'embauche se sont vu refuser depuis cet été l'autorisation de travailler, n’ayant pas pu obtenir un changement de statut (d'étudiant à salarié).

 

"Pour les étudiants, cette circulaire s'ajoute au décret publié début septembre qui exigeait des ressources financières plus importantes (+1.500 euros) pour bénéficier d'un titre de séjour, créant une véritable sélection sociale dans l'accès au titre de séjour", a affirmé l'Unef, première organisation étudiante en France.

 

Le ministre de l'Intérieur, qui est engagé dans une politique de réduction de l'immigration légale, a quant à lui estimé que les étudiants étrangers "viennent en France pour étudier" et "pas pour détourner leur statut et arriver sur le marché du travail". "Que nous leur donnions une première expérience professionnelle afin qu'ils puissent développer leurs compétences dans leur pays d'origine c'est quelque chose qui est prévu par la loi et c'est quelque chose qui est très important", a-t-il observé. "Mais la vocation première des étudiants, c'est de retourner chez eux pour faire profiter leur pays de leurs compétences. La France n'a pas vocation à écrémer les compétences des autres pays", a fait valoir M. Guéant.

 

A l'issue d'une réunion mardi dernier avec les représentants des universités et grandes écoles, le ministre de l'Enseignement supérieur a réaffirmé sa volonté de rendre moins restrictive l'application du texte. "La circulaire a posé quelques difficultés d'application, le but est qu'elles soient corrigées", a déclaré Laurent Wauquiez, en précisant qu'il s'agissait de "sensibiliser les préfets" là où il y a eu "des problèmes".

 

Hier, le Commissaire à la Diversité, Yazid Sabeg a affirmé à l’AFP que la circulaire Guéant "ne sera pas retirée". M. Sabeg a toutefois souhaité qu'elle soit appliquée "avec discernement" et "au cas par cas", indiquant avoir rencontré le ministre de l'Intérieur à ce sujet après avoir reçu une délégation d'étudiants "venus exprimer leur inquiétude". "Il n'y a jamais eu d'automaticité de changement de statut. On ne peut obtenir un changement de statut que si on trouve un emploi correspondant aux capacités, avec un niveau de rémunération équivalent. Si on a une qualification X et qu'on cherche un boulot Y, ce n'est pas conforme à l'esprit de la loi", a justifié M. Sabeg.

 Pour le Commissaire à la Diversité, "l'intention (des autorités) n'est pas de donner un signal de refus de recevoir des étudiants étrangers en France" où le gouvernement veut désormais réduire l'immigration légale.

 

Les étudiants étrangers ne l'ont pas entendu de cette oreille. Jeudi, plusieurs centaines d'étudiants étrangers diplômés ont manifesté devant l'université de La Sorbonne à Paris pour réclamer le retrait du texte. Diplômés d'HEC, Centrale ou Polytechnique, ces jeunes ont manifesté habillés comme ils l'auraient été dans leur entreprise s’ils avaient obtenu un statut de salarié.

Ils ont brandi de faux diplômes qu'ils ont jetés dans une poubelle pour montrer qu'"obtenir un diplôme seul ne suffit pas et qu'une expérience professionnelle est nécessaire après l'avoir obtenu", selon Fatma Chouaieb, porte-parole du rassemblement. "Nombre d'étudiants ont eu des refus à leur changement de statut (d'étudiants à salariés) et se retrouvent dans des situations de précarité alors même que nous devrions être en train de travailler pour le rayonnement de la France", a-t-elle souligné.

 

Sarah, 25 ans, tunisienne diplômé de Master 2 Marketing à Paris Dauphine, avait "trouvé du travail dans un cabinet d'audit" mais son "changement de statut (lui) a été refusé". Elle a du coup engagé des démarches pour une thèse, acceptée par une université et une grande école, mais début octobre, elle a reçu une obligation de quitter le territoire français (OQTF). Comme une majorité d'étudiants, elle explique vouloir "tout naturellement travailler en France" après y avoir fait quasiment toute sa scolarité.

 

"Ils veulent étudier les dossiers au cas par cas alors que nous voulons le retrait total de la circulaire, notamment pour rassurer les entreprises car certaines s'inquiètent et, avant l'entretien d'embauche, appellent l'étudiant pour s'assurer qu'il est français", a expliqué Fatma Chouaieb.

Selon elle, la circulaire concerne potentiellement 6.000 étudiants diplômés étrangers, soit le nombre ayant obtenu un changement de statut en 2010.

 

La conférence des grandes écoles (CGE) et celle des présidents d'universités (CPU) ont elles aussi vivement critiqué cette circulaire, le président de la CPU, Louis Vogel, la jugeant "très grave". "Si nous ne trouvons pas de solution, nous n'attirerons plus ces étudiants" et "c'est fatal à long terme : les diplômés déçus d'aujourd'hui ne risquent pas d'être les avocats de notre économie quand ils occuperont demain des postes de responsabilité", a écrit lundi dans Le Figaro le directeur de HEC, Bernard Ramanantsoa.

 

Même la ministre du Budget, Valérie Pécresse, a écrit le 26 septembre à M. Guéant pour lui demander de l'"informer" des consignes transmises aux préfets. Elle a fait référence à "l'application qui semble faite de la circulaire du 31 mai" aux "étudiants étrangers non ressortissants de l'UE et diplômés de grandes écoles françaises qui souhaitent travailler dans notre pays", et qui se voient délivrer un refus d'autorisation. "Ce qui devrait être en droit l'exception, serait donc en train de devenir la règle", a-t-elle écrit.

Mme Pécresse est diplômée d'HEC et était jusqu'en juin dernier ministre de l'Enseignement supérieur. A ce titre, elle avait fixé l'objectif de deux tiers d'étudiants étrangers en master et en doctorat d'ici 2015.

 

Une circulaire des ministres français de l'Intérieur, Claude Guéant, et du Travail, Xavier Bertrand, visant à réduire l'immigration professionnelle suscite l’indignation des étudiants étrangers et l’inquiétude des grandes écoles ainsi que d’une partie de la classe politique française. Cette circulaire restreint la possibilité de travailler en France pour les diplômés étrangers...
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