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Couverture spéciale de la révolte en Tunisie - Transition

La justice post-Ben Ali contestée

Manifestation de femmes, place de la Kasbah, pour l’égalité dans l’héritage et contre les discriminations.
Sept mois après la chute du régime Ben Ali, une crise de confiance s’installe entre la société tunisienne et la justice après la libération d’anciens ministres et l’impunité accordée à d’autres ex-dignitaires, dénoncées jusque dans les rangs des magistrats.
Hier, des centaines de personnes ont manifesté dans le centre de Tunis pour réclamer une justice indépendance et une rupture avec l’ancien régime. Les manifestants ont dénoncé notamment le retour sur scène de membres du Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), le parti de Ben Ali dissous après la chute de son régime le 14 janvier. « Les éléments de l’ancien système sont toujours présents. Ils se sont intégrés dans de nouveaux partis, sous d’autres noms, mais ils agissent encore », affirme Najiba Bakhtri, enseignante syndicaliste. « Il n’est pas normal qu’en Égypte, un président dictateur puisse être jugé et qu’en Tunisie, d’anciens ministres de Ben Ali soient libérés », renchérit Khouloud Adouli, étudiante à Tunis.
Le 4 août, Abdelrahim Zouari, ancien ministre arrêté le 13 avril, a été blanchi dans une affaire de financement illicite du RCD qu’il a dirigé entre 1988 et 2000. Il reste toutefois en détention pour des affaires de corruption. La veille, Béchir Tekkari, ancien ministre de la Justice placé en garde à vue depuis le 11 juillet pour corruption présumée, avait été remis en liberté. « Le problème n’est pas la libération de M. Tekkari, c’est le message d’impunité envoyé aux petits corrompus avec cette libération », critique Me Abdenaceur Aouini, un avocat célèbre en Tunisie pour avoir bravé le couvre-feu en plein centre de Tunis pour manifester à l’annonce de la fuite de Ben Ali. De son côté, l’Association des magistrats tunisiens (AMT) compte déposer plainte auprès du tribunal administratif pour avoir plus d’éclaircissement sur ces décisions.
Des procès formels pour apaiser la tension et « amuser la galerie », selon le juge Mokhtar Yahiaoui, limogé sous l’ancien régime. Sur la Toile et les réseaux sociaux, des internautes dénoncent une justice qui « lave plus blanc que blanc ». Avec la suspension de la Constitution en mars, l’exécutif et le législatif ont été dissous. Seul le pouvoir judiciaire a été maintenu. Cette continuité fragilise sa légitimité, voire sa crédibilité.
Parallèlement, plusieurs dizaines de femmes tunisiennes ont manifesté hier place de la Kasbah à Tunis pour réclamer l’égalité totale et la levée de certaines discriminations, en particulier en matière d’héritage. La manifestation était à l’initiative de l’Association tunisienne des femmes démocrates (ATFD, féministe) alors que le gouvernement devait revoir la position de la Tunisie sur la Convention internationale pour l’élimination de toutes formes de discrimination à l’égard des femmes (Cedaw), à laquelle le régime de Ben Ali avait opposé des réserves. « Nous sommes là pour la levée totale des réserves émises par la Tunisie, notamment en matière d’égalité dans l’héritage », a indiqué Fayza Skandrani, présidente de l’association Égalité, parité. « Tant que les femmes ne jouissent pas de l’égalité successorale, on ne pourra jamais parler d’égalité et de démocratie, cette discrimination est à l’origine de toutes les inégalités dans notre société », a estimé Noura Chéfi. Dans un communiqué distribué sur place, le « Front des femmes pour l’égalité » a appelé le gouvernement provisoire « à s’inscrire clairement contre toutes les formes de discrimination fondées sur le genre ». « Dans le contexte unique que vit aujourd’hui la Tunisie, les femmes aspirent à participer à la construction de la démocratie ainsi qu’au développement de leur pays en tant que citoyennes à part entière », selon ce communiqué.
(Source : AFP)
Sept mois après la chute du régime Ben Ali, une crise de confiance s’installe entre la société tunisienne et la justice après la libération d’anciens ministres et l’impunité accordée à d’autres ex-dignitaires, dénoncées jusque dans les rangs des magistrats.Hier, des centaines de personnes ont manifesté dans le centre de Tunis pour réclamer une justice indépendance...