Dans un monde schtroumpfement bleu

Existe-t-il un monde où tout est bon, beau et gentil ? Depuis qu’Adam et Ève ont été chassés du jardin céleste, la terre n’a-t-elle pas connu toutes les foudres du ciel ? On pourrait croire que le monde bleu créé par Peyo dans les années cinquante, 1958 plus précisément, serait ce monde idéal. N’oublions pas que la planète venait de sortir du cercle infernal de la guerre mondiale et qu’elle aspirait à voir tout en rose. Pas le rose vichy de Brigitte Bardot, mais bien une nouvelle teinte. Pierre Culliford venait de créer ces personnages appelés Schtroumpfs en français et, plus tard, Smurfs en anglais et Sanafer en arabe, ainsi qu’un nouveau langage avec eux. Les origines de ces amusants lutins bleus remontent à Johan et Pirlouit, série médiévale que Peyo publiait dans les pages du Spirou des années cinquante. La popularité des Schtroumpfs a été telle qu’elle a donné lieu, entre autres, à un long-métrage d’animation, à une série télé produite par Hanna-Barbera, à un parc d’attractions et à une large gamme de produits dérivés.
Ce monde tout bleu serait-il un microcosme à cloner ? Où les querelles n’existent pas, où tout le monde a le même avis, le même goût et la même couleur. Bleu de surcroît. À bien y réfléchir, non. Dans un monde à couleur unique, les avis et les goûts divergent. En effet, il serait ennuyeux de n’avoir pas à mettre sous la dent quelques méchants, des querelles, ou peut-être une petite guerre. Les Schtroumpfs seraient insipides sans un personnage du nom de Gargamel. Que serait le bien sans le mal en face ? Christopher Nolan l’a bien démontré dans The Dark Knight. Dans cet univers monochrome, il y un jaloux, un grognon, un intellectuel...tous les archétypes du monde humain. Et si un jour on arriverait à cloner ces derniers, on reprendrait les mêmes défauts et les mêmes qualités. On ne pourrait en inventer d’autres.
Après les personnages de Disney et de Marvel, c’est au tour des créations de BD belges qui déboulent sur grand écran en 3D. Le message n’est pas très philosophique, mais il a le mérite de colorer l’imaginaire et d’ôter les bleus à l’âme.