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À La Une - Galeriste

Alice Mogabgab, chercheuse d’art !

« Chercheuse d’art », c’est ainsi qu’Alice Mogabgab aime à se définir. « À l’instar des chercheurs d’or de la conquête de l’Ouest, moi je vais à la recherche de l’art, partout où il se trouve, d’est en ouest », soutient cette galeriste qui, en vingt ans de métier, a réussi à se constituer un catalogue d’artistes de tous les coins du monde : Europe, Amérique du Sud, Japon, Chine...

Alice Mogabgab dans son espace. (Photo Michel Sayegh)

Historienne de l’art, Alice Mogabgab sait communiquer sa passion pour la peinture, la sculpture, la photo... Discours clair, références érudites, mais aussi vocabulaire chargé d’affect, où les mots émotion, sensibilité et audace reviennent souvent, elle sait accompagner subtilement le regard du visiteur, l’aider dans son appréciation d’une œuvre et l’orienter dans son choix. Même si elle reste convaincue que « l’essentiel reste ce dialogue qui s’établit spontanément entre une personne et une œuvre ».
Elle fait de même avec ses artistes. Un groupe de peintres, sculpteurs, photographes, plasticiens libanais, français, belges, italiens, argentins, japonais ou chinois... « devenus, au fil des années, comme une seconde famille », dit-elle. Car c’est en dénicheuse de talents, conseillère et accompagnatrice de l’artiste dans la construction de son œuvre qu’elle envisage ce métier. « La chose la plus extraordinaire, c’est d’aller à la rencontre des artistes. Parce que souvent, derrière la qualité et la beauté d’un travail, on découvre la noblesse de son auteur », assure-t-elle.
Un métier de galeriste auquel Alice Mogabgab, diplômée de la Sorbonne à la fin des années quatre-vingt, va s’initier, durant deux ans, auprès d’un vieux marchand d’art parisien. Il lui apprendra à monter des expositions, mais aussi « une chose fondamentale : c’est qu’il n’y a pas de profils d’acheteurs d’art. J’ai souvent pu constater, par la suite, que les personnes les plus inattendues s’avèrent être celles qui ont le regard le plus redoutablement juste. »
Le milieu parisien de l’art extrêmement compétitif, n’offrant pas de grandes perspectives d’avenir, Alice Mogabgab rentre au pays en 1991 en se donnant trois ans pour tâter le terrain avant de démarrer effectivement dans le domaine. Elle commence par donner des cours d’histoire de l’art, fait du courtage d’œuvres anciennes, organise quelques expositions et, après avoir dressé le bilan de ses activités en 1994, se lance véritablement dans le métier. « Une de mes toutes premières leçons au Liban, je ne l’oublierai jamais, a été celle des points rouges qui signalent une toile vendue. Tout le contraire de ce que l’on fait en France. Là-bas, lorsqu’on vend un tableau, on le décroche de l’exposition et on le remplace directement par un autre. On n’a pas de temps à perdre. Ici, par contre, il faut garder les toiles jusqu’à la fin de l’exposition en mettant des points rouges pour signaler le nombre d’œuvres vendues... »
Elle ouvre sa première galerie à son nom dans l’appartement de sa mère, à Sin-el-Fil. Avec, dès le départ, une orientation vers les artistes étrangers. « Étant donné que j’avais vécu de nombreuses années et étudié en France, j’y avais établi des contacts. J’ai toutefois essayé d’inviter des artistes libanais, mais la plupart étaient déjà attachés à d’autres galeries qui étaient alors bien plus établies – et dont la plupart ont fermé d’ailleurs. C’est ainsi que j’ai commencé à l’époque par beaucoup exposer les œuvres graphiques et sur papier de grands noms européens de l’art contemporain comme Miró, Tapiès, Adami, François Arnal, Claude Garrache.... Puis, réalisant que je ne pouvais rien apporter à ces maîtres, à part contribuer à placer leurs œuvres et le courtage n’étant pas ma vision du métier de galeriste, je m’en suis détachée pour me tourner vers des artistes que je pouvais contribuer à faire connaître », soutient-elle.

Mine d’art
C’est à partir de 1997, avec Charles Belle, qu’elle entreprend sa démarche de « chercheuse d’art ». Elle découvrira, entre autres, Pascal Courcelles, Émilio Trad, Malgorzata Pazco, Patrice Giorda, Takayoshi Sakabe... en sillonnant les foires d’art contemporain, les réseaux de galeries à l’étranger, mais aussi en sortant des sentiers battus et en partant, par exemple, à la rencontre d’un peintre ou d’un sculpteur, dont on lui a parlé, dans son atelier au fin fond d’une petite ville ou dans un coin perdu de montagne. Cela a justement été le cas dernièrement de Luciano Zanoni, magnifique sculpteur – qui a participé à l’expo thématique sur l’arbre –, déniché dans les Dolomites, en Italie, sur les conseils d’un ami poète. Et, côté libanais, elle constituera également, au fil des années, son propre réseau d’artistes avec, notamment, Fadia Haddad, Rima Amyuni, Lulu Baasiri, Roger Moukarzel...
Entre-temps, après deux années à Sin-el-Fil, la galerie Alice Mogabgab entame une série de déménagements. Première étape de 6 ans à Achrafieh, en face du Sofil, puis quelques années dans une belle maison ancienne à Gemmayzé, avant de s’établir définitivement, il y a trois ans, en plein cœur d’Achrafieh, au premier étage de l’immeuble Karam, face à l’ABC.
Là, nouveau bilan et idée nouvelle. Elle instaure, en rituel de début d’été, la grande expo à thème qui apporte, autant aux artistes qu’aux collectionneurs et amateurs, matière à débat. Ainsi, après « La passion » et « L’image reflétée », le sujet de l’arbre traité cette année sous l’intitulé « De l’arbre à la forêt » – et qui a été présenté en avant-première au Grand Palais à Paris – lui aura permis de constater qu’ « en quatre siècles d’écart, le dessin d’un arbre est resté toujours pareil », s’exclame-t-elle avec enthousiasme.
Ce même enthousiasme qu’elle manifeste en parlant de « ses » artistes, qui ont en commun le fait d’être « classiques, dans le sens où ils respectent la tradition multimillénaire de la peinture et de la sculpture – et presque bicentenaire de la photographie – tout en la renouvelant, en y apportant, chacun, son propre univers, sa propre identité, son monde révélé », soutient cette galeriste à l’évidence heureuse d’avoir trouvé sa mine... d’art.
Historienne de l’art, Alice Mogabgab sait communiquer sa passion pour la peinture, la sculpture, la photo... Discours clair, références érudites, mais aussi vocabulaire chargé d’affect, où les mots émotion, sensibilité et audace reviennent souvent, elle sait accompagner subtilement le regard du visiteur, l’aider dans son appréciation d’une œuvre et l’orienter dans...

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