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Liban - Un été à Beyrouth

Bassita !

Journée ordinaire dans le bocal.
Le thermomètre monte. La moiteur et la nervosité aussi. On sue notre indulgence à grosses gouttes et on peste contre notre incivisme collectif. Oui collectif à plus ou moins fortes doses. On regarde les automobilistes qui empruntent des sens interdits avec des yeux revolvers comme si... comme si nous étions des parangons de vertu.
On passe à l’orange, mûre, certes. On slalome sur l’autoroute parce que l’automobiliste qui nous précède est au téléphone. Jamais ça ne nous arrive.
On applique notre culture YBM, yalla w boukra w ma3leyche, avec impatience. On se moque de la systématisation des cellules de crise mises en place pour le moindre petit bobo qui advient aux Occidentaux. Mais qui s’est intéressé aux casseroles que nous traînons tous depuis 1975 ?
Des souvenirs de guerre, des scènes d’abris, des concerts d’artillerie, des blessures visibles ou narcissiques et intimes. Qui s’interroge sur les conséquences de ses blessures ouvertes de ces deuils impossibles de cette guerre infinie dans les têtes ? Qui calcule le risque de l’impunité ambiante ? Comment quantifier, au niveau d’une nation, le coût de la déperdition d’énergie vitale et productive ? Nous sommes tous des fuyants. Non pas dans le sens de prendre la fuite, la fuite en avant, mais dans le sens de passoires.
Les vendeurs vendent mal. Bassita ! Les caissiers arrondissent au chiffre supérieur. Bassita ! Les responsables du service clientèle vous regardent avec des yeux de merlan frit quand vous prenez la peine de vous plaindre du mauvais accueil. Bassita! Les plombiers, électriciens, réparateurs divers vous posent des lapins. Bassita ! Les serveurs interrompent votre conversation avec votre voisin de table. Bassita ! Surtout si la carte de leur restaurant contient germes, virus et autres bactéries. Les docteurs soignent mal. Mech bassita !
L’ami libanais de Paris, qui pour toutes ces raisons et sans doute d’autres fait la grève des vacances beyrouthines, ne fait pas la grève du téléphone. Trop de printemps arabes à commenter. Grâce à lui, je sais que le nom grec de Hama est : Épiphanie. C’est le jour de la visite des Rois mages, mais c’est aussi le jour de l’apparition, de la manifestation de Jésus comme sauveur... ce nom sonne comme une responsabilité pour les habitants de cette ville qui savent ce que subir veut dire, ce que souffrir veut dire, ce que mourir dans la quasi-indifférence occidentale veut dire ! Nos yeux blasés de tant d’images de Deraa, Taëz et Misrata n’empêchent pas nos cerveaux de résonner au rythme de : al-cha3b yourid. Notre « révolution » était si bon enfant comparée à la leur. Mais bon, on a vu comment la nôtre s’est terminée. Et si les autorités ne qualifient pas leurs citoyens de « chien », elles ne les traitent pas avec moins d’inhumanité. Étripons-nous pendant qu’Israël tire son gaz et le nôtre de la Méditerranée !
Au Liban, nous n’avons pas de pétrole, mais nous avons (pour trois cents ans? ) dawlé, cha3b w
moukawamé !
Journée ordinaire dans le bocal.Le thermomètre monte. La moiteur et la nervosité aussi. On sue notre indulgence à grosses gouttes et on peste contre notre incivisme collectif. Oui collectif à plus ou moins fortes doses. On regarde les automobilistes qui empruntent des sens interdits avec des yeux revolvers comme si... comme si nous étions des parangons de vertu.On passe à l’orange,...
commentaires (2)

Felicitations Mme.Carla Yared ceci s'appelle du vrai journalisme !!! Une plume en or qui me rappelle celle d'un grand homme , un journaliste par excellence , qui malheureusement n'est plus parmi nous. La vérité a été dite comme il fallait et elle nous est bien parvenue. Marie Jose Malha

Marie Jose Malha

01 h 26, le 29 juillet 2011

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Commentaires (2)

  • Felicitations Mme.Carla Yared ceci s'appelle du vrai journalisme !!! Une plume en or qui me rappelle celle d'un grand homme , un journaliste par excellence , qui malheureusement n'est plus parmi nous. La vérité a été dite comme il fallait et elle nous est bien parvenue. Marie Jose Malha

    Marie Jose Malha

    01 h 26, le 29 juillet 2011

  • gente dame, vous avez la Voix! et dans les parages, croix-mouah, c'est rare. votre titre en conte quelque chose, pensez-y, longuement, à cette marque... mabsouta? basta? cependant... on vous censure? ah! comment? vous en tiendrez-vous à la salade? accepterez-vous de tomber, souvent leurrée dans les hors-d'Oeuvre? si vous concentriez ce qui yared dans tout ça, sur un point ou deux, croyez-en mon flair de comète que peu d'abris y résisteraient... "good faith but no good concentration" comme disent les recruteurs d'ashrams indiens? c'est pas pour l'insulte... et n'est-ce pas vous qui dénoncez le slalom? alors ne serait-il pas l'heure d'y renoncer pour se consacrer à des dissections, certes plus atroces, mais nettement plus efficientes peut-être. bien avoue. un Passant bien trop allumé pour sa signature.

    Albireo

    19 h 32, le 28 juillet 2011

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