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Liban - Un été à Beyrouth

Sur mes murs...

Mar Mikael, c’est le quartier qui monte, qui monte : des loyers modérés réintègrent ce quartier, naguère périphérique, dans la géographie beyrouthine des loisirs, après Monnot, après Gemmayzé. Mêmes immeubles à dimension humaine, trois étages, patinés par la vie, l’histoire et le temps. Vieilles bâtisses qui n’ont pas honte d’afficher leurs rides et leurs cicatrices. Vieilles dames qu’on ne ravale pas à bout de bras. Les promoteurs n’ont pas encore sévi. Ça viendra.
Là une ferronnière, là une galerie d’art, là une trattoria décorée d’affiches de films italiens qui font ressurgir les « lancements » au Roxy : « il bastardo ! Sylvana Mangano ! Pedro Armandariss ! » La vita n’était pas dolce qu’en Italie.
C’était avant 1975. À l’époque, le risque que faisaient courir les Palestiniens au pays nous détournait de leur misère. Plusieurs générations n’ont connu que la vie dans les camps. Abdulrahman Katanani, né neuf mois après Sabra et Chatilla (?), sculpte aujourd’hui des vies d’enfants en tôle ondulée et fils de fer barbelés. Le chemin vers la galerie qui l’expose est entravé par un embouteillage aussi surréaliste par son volume que par les raisons qui le provoquent : une manifestation de soutien au régime syrien. Quoi ? Il en est à avoir besoin de ces pauvres hères ?
Et s’il faut presque bâillonner le conducteur qui leur rétorque : « Al cha3b yourid », on n’en a pas moins envie de leur faire lecture de La Boétie : Le discours de la servitude volontaire.
Hamra réapprend, elle aussi, à vivre, mieux que le centre-ville, « lalaland » où le nouvel éclairage des bâtisses renforce l’impression de carton-pâte. Aux rez-de chaussée, occupés par les bijoutiers et les bijoutières, on se demande si « la clientèle arabe » est de retour, et si les affaires reprennent ?
Survivance d’une préhistoire du tapis à Beyrouth, Monsieur Jawad, sur le seuil de sa boutique, se remémore, nostalgique, les parents des passants : « Eux, au moins, prenaient leur temps. Ce n’était pas du shopping zapping où, d’un hochement de tête, on annihile des décennies de choix amoureux et de labeur. »
En fin d’après-midi, à la Forêt des Pins, jalousement gardée depuis son réaménagement par une vestale fort sympathique, Fady Noun, Antoine Boulad et Sabah lisent leur poésie au son d’une clarinette enchanteresse...
Se poser. Prendre le temps d’écouter le souffle, l’inspiration des autres avant d’aller retricoter Beyrouth dans tous les sens.
À Abraj, les « films interdits » proposés par le Festival du cinéma de Beyrouth sont à nouveau interdits par la censure. Peut-on censurer l’esprit des gens. Qu’en pense Jafar Panai, interdit de filmer pendant vingt ans. Que fera-t-il des idées qui se bousculent dans sa tête ? On ne peut pas voir « Chou Sar » de De Gaulle Eid, alors...
Écouter le tarab de Soumaya Baalbacki dans un ex-abri, transformé en Democratic Republic of Music.
Ah si l’on prêtait davantage attention aux affiches collées treize à la douzaine sur les murs de la ville !
Mar Mikael, c’est le quartier qui monte, qui monte : des loyers modérés réintègrent ce quartier, naguère périphérique, dans la géographie beyrouthine des loisirs, après Monnot, après Gemmayzé. Mêmes immeubles à dimension humaine, trois étages, patinés par la vie, l’histoire et le temps. Vieilles bâtisses qui n’ont pas honte d’afficher leurs rides et leurs cicatrices....
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