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Moyen Orient et Monde - Interview

Le départ de Bachar el-Assad, un objectif « inaltérable » des opposants syriens à l’étranger

Déterminés à poursuivre leur combat jusqu’à la chute du régime, plusieurs opposants syriens basés à l’étranger se mobilisent depuis un certain temps pour renforcer leur action et convaincre la communauté internationale de la nécessité d’un changement de régime politique à Damas.
Réfugié depuis quelque temps en Turquie, Omar Mokdad, une des principales figures du mouvement de contestation en Syrie, poursuit son combat à l’étranger après avoir été à maintes reprises menacé de mort à Deraa – sa ville natale et fief de la contestation anti-Assad. Dans un café d’Istanbul, où bon nombre d’opposants ont fui depuis le déclenchement de la révolte du 15 mars, ce membre du « Conseil national » élu à l’issue du dernier congrès d’Antalia, parle d’un divorce total entre le peuple syrien et le régime actuel, qualifiant de poudre aux yeux le dernier appel à un dialogue national lancé par le président Bachar el-Assad. « Il ne peut y avoir de place au dialogue avec un régime criminel qui s’acharne contre son propre peuple (...) Chaque jour, des dizaines de manifestants tombent sous les balles des forces de l’obscurantisme (...) D’autres sont arrêtés, torturés puis jetés dans des fosses communes, tandis que des femmes sont harcelées et violées (...) », déplore ce jeune opposant. « Bachar el-Assad a très mal calculé en optant dès le début pour l’option militaire (...). Nous aurions pu dialoguer si les mitraillettes n’avaient pas pris le pas sur l’option politique et que près de 2 000 martyrs soient tombés à ce jour (...) Nous avons désormais atteint le point de non-retour », ajoute-t-il.
À ses côtés, un autre opposant, la cinquantaine, témoigne, vidéo à l’appui, de la « brutalité de la répression » menée par le régime. Sous le couvert de l’anonymat – de peur que sa famille en Syrie « ne subisse le même sort que celui d’autres familles d’opposants », dit-il –, il raconte notamment comment, lors d’obsèques de manifestants tués la veille, les forces de sécurité ont tiré à bout portant sur la foule, tuant près de 80 personnes, dont plusieurs enfants. « Le jour même, des camions ont transporté les corps des victimes tandis que la place a été nettoyée pour couvrir toute trace des exactions commises », raconte-t-il.
Pour ces deux opposants, le régime en place a perdu toute légitimité en réprimant dans le sang les aspirations « nobles du peuple syrien », et est désormais en voie d’effritement, malgré l’image rassurante qu’il tente de projeter. « Le siège du parti Baas n’existe plus à Deraa tandis qu’à Lattaquié, Hama et Homs aucune réunion n’a lieu dans les locaux du parti », soulignent-ils. « Ce régime est déjà tombé sur le plan politique (...) Ce qui en reste se résume à une poignée d’hommes au pouvoir soutenus par une structure sécuritaire, laquelle est également en voie de désintégration », ajoutent-ils, en allusion aux quelques défections observées récemment dans les rangs de l’armée.

Renforcer le front de l’opposition
Contrairement aux dénouements expéditifs observés en Égypte ou en Tunisie, le régime syrien a toutefois réussi jusque-là à résister à la vague et à maintenir un bras de fer de longue haleine avec les manifestants prodémocratie, voire, par moments, à éteindre la flamme. « D’où la nécessité de renforcer l’action de l’opposition », souligne Omar Mokdad. « Le fait que le régime ne soit pas rapidement tombé est dû à la brutalité de la répression et à la terreur qu’il sème parmi la population civile, mais aussi à l’absence d’un appui réel de la part de la communauté internationale pour mettre fin au règne des Assad », ajoute-t-il. « Certains pays occidentaux ont peur du vide ou de l’arrivée au pouvoir des islamistes (...) Cet argument fait d’ailleurs partie de la propagande médiatique orchestrée par le régime (...) », poursuit cet opposant indépendant et laïc.
« C’est pour toutes ces raisons que nous avons décidé de mener une contre-attaque en prouvant au monde entier qu’une alternative existe et que le peuple syrien peut avancer sur la voie de la démocratie sans tomber dans l’escarcelle des extrémistes. Le dernier congrès à Antalia constitue à cet égard un important pas en avant (...) Toutes les communautés religieuses – sunnite, alaouite, chrétienne, druze – mais aussi ethniques y étaient représentées (...) », rappelle-t-il, indiquant que l’opposition se penche actuellement sur l’organisation d’un nouveau congrès, similaire à celui – hautement symbolique – tenu au début du mois en Turquie.
De son côté, l’opposant Monzer Makhous, joint par téléphone à Paris, a assuré que les trois organisations syriennes les plus influentes dans la capitale française s’activaient depuis un moment pour convaincre les puissances occidentales à resserrer davantage l’étau autour du régime Assad. « Des réunions ont lieu régulièrement avec des représentants du Parlement européen mais aussi avec des responsables d’organisations et d’associations prodémocratie basées à Paris (...) Notre objectif est d’augmenter la pression sur la communauté internationale, et de soutenir par tous les moyens le mouvement à l’intérieur du pays », dit-il.

Prochaine intervention militaire turque ?
Quant à une éventuelle opération militaire étrangère, Omar Mokdad assure que l’objectif de l’opposition est de renverser le régime « sans recours à une intervention similaire à celle parrainée par l’OTAN en Libye ». « Le peuple syrien ne tolérerait pas une intervention qui impliquerait des soldats occidentaux, notamment américains (...) En revanche, une opération militaire turque de petite envergure appuyée par la communauté internationale serait acceptée », dit-il.
Rappelons à cet égard que la tension est montée d’un cran entre la Syrie et la Turquie la semaine dernière avec le déploiement de chars syriens à la frontière entre les deux pays. L’incident a été pointé par la responsable de la diplomatie américaine Hillary Clinton qui a dit s’inquiéter des risques de « provocation » à cette frontière.
Pour Omar Mokdad, comme pour de nombreux opposants, la question n’est toutefois pas liée à l’éventualité d’une intervention militaire. « Personne ne pourra arrêter la marche de l’histoire (...) Le régime actuel en Syrie ne pourra pas échapper à cette dynamique qui s’est déclenchée dans le monde arabe (...) Il s’agit d’une question de temps. » Selon lui, « la situation actuelle pourra durer un mois, plusieurs mois, voire un an, mais ce régime, qui a opprimé tout un peuple pendant 40 ans, finira par tomber ».
Réfugié depuis quelque temps en Turquie, Omar Mokdad, une des principales figures du mouvement de contestation en Syrie, poursuit son combat à l’étranger après avoir été à maintes reprises menacé de mort à Deraa – sa ville natale et fief de la contestation anti-Assad. Dans un café d’Istanbul, où bon nombre d’opposants ont fui depuis le déclenchement de la révolte du 15 mars,...

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