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Six mois après, le printemps arabe face à de lourdes menaces - Éclairage

L’histoire jugera

Faut-il soutenir les révoltes arabes ? La réponse n’est pas évidente pour la communauté internationale. L’embarras déroutant des pays occidentaux face aux contestations populaires qui ont secoué d’abord la Tunisie et l’Égypte montre à quel point le sujet est délicat. Et les réactions mitigées des pays européens et des États-Unis face à la répression en Syrie, en Libye, au Yémen et Bahreïn rendent le tableau encore plus complexe.
La première appréhension des Occidentaux est venue du désir de protéger Israël. En effet, certains régimes autoritaires, comme l’Égypte et la Syrie, ont été une garantie incontestable de stabilité pour la sécurité de l’État hébreu.
La deuxième crainte concernait la « menace islamiste ». Tous les régimes autoritaires, sans exception, prônaient la lutte contre le terrorisme, faisant de ce dernier l’épouvantail idéal pour justifier leur répression, avec l’approbation tacite de l’Occident. Toutefois, les événements qui se sont déroulés ont démontré que les révoltes ont été initiées principalement par une jeunesse désabusée, suivie par les chômeurs, les islamistes, et enfin d’autres opposants tolérés par les régimes en place.
La troisième inquiétude a porté sur le chaos éventuel engendré par la chute du pouvoir en place. L’invasion américaine de l’Irak et l’intervention de l’OTAN actuellement contre les forces du dirigeant libyen Mouammar Kadhafi ne facilitent pas la donne.
Cette « phobie étatique » porte notamment sur les enjeux géopolitiques et stratégiques qui diffèrent d’un pays à un autre. D’où les réponses au cas par cas face aux répressions sanglantes, en commençant par le silence ou de simples menaces de rétorsions comme avec les pays du Golfe, jusqu’à l’engagement armé en Libye, en passant par les sanctions contre les dirigeants syriens.
Parallèlement à l’action humanitaire, diplomatique et militaire, l’intervention des puissances européennes a entraîné un vif débat au sein de leur société. D’une part, la dichotomie, voire l’hypocrisie des politiques occidentales vis-à-vis des dictatures arabes ont été sévèrement critiquées. D’autre part, la crainte d’être taxé de néo-colonialistes ou d’impérialistes par les Arabes aurait largement freiné les Occidentaux. Mais les appels à l’aide, les millions de manifestants rêvant de la liberté, sans oublier les milliers de morts et de réfugiés ont eu finalement raison des réticences des pays démocratiques.
Dans le concert des nations, des pays émergents comme le Brésil ou l’Afrique du Sud d’une part, et des puissances comme la Russie et la Chine d’autre part, refusent toutefois de soutenir les mouvements de contestations populaires contre les régimes autoritaires au Moyen-Orient, estimant qu’il s’agit d’une ingérence dans les affaires intérieures d’un État libre et souverain. Certains pays critiquent vertement ces mouvements, les assimilant à des complots qui visent des régimes devenus encombrants. Il est également évident que certains pays, comme la Chine, craignent une éventuelle contagion pouvant atteindre leur propre population. D’autres jugent que le bénéfice du succès des révolutions démocratiques tombera forcément dans le camp occidental. Et comme en pleine guerre froide, toute victoire pour un camp est nécessairement une défaite pour l’autre.
Ces pays complices aujourd’hui par leur silence face aux massacres perpétués par des régimes aux abois ne semblent pas avoir compris les leçons de l’histoire. La véritable victoire du camp occidental, à cette époque, ne fut pas le résultat de guerres ou d’événements militaires. Il s’agissait surtout d’une victoire de certaines valeurs comme la démocratie et la liberté. Des valeurs auxquelles aspiraient ardemment les peuples de l’ex-Union soviétique, les mêmes valeurs que celles pour lesquelles des milliers de personnes sacrifient leur vie aujourd’hui au Moyen-Orient.
En refusant de soutenir les révoltes arabes et de sanctionner les répressions sanguinaires des régimes autoritaires, ces pays risquent de se trouver à l’écart d’un monde nouveau qui se construit.
Réagissant à une éventuelle menace de veto au Conseil de sécurité de l’ONU sur une résolution condamnant les violences en Syrie, le ministre français des Affaire étrangères, Alain Juppé, a lancé une mise en garde claire à ces pays : « S’ils mettent leur veto, ils prendront leurs responsabilités », a-t-il affirmé.
En attendant le jugement de l’histoire, il est très probable que les populations arabes se souviendront, dans un avenir proche, de ceux qui les ont soutenus, sur le plan humanitaire d’abord, mais aussi sur les plans politique, diplomatique, économique et même militaire. Leurs yeux seront, sans aucun doute, tournés vers les pays qui les ont appuyés, au risque de sanctionner, même symboliquement, ceux qui leur ont refusé le droit de devenir libres.
Faut-il soutenir les révoltes arabes ? La réponse n’est pas évidente pour la communauté internationale. L’embarras déroutant des pays occidentaux face aux contestations populaires qui ont secoué d’abord la Tunisie et l’Égypte montre à quel point le sujet est délicat. Et les réactions mitigées des pays européens et des États-Unis face à la répression en Syrie, en Libye, au...