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Liban

La marche annuelle de « Laïque Pride » placée sous le thème du statut civil facultatif

Près de 300 jeunes ont partcipé à la marche. Jmal Saïdi/Reuters

La « Marche des laïcs vers la citoyenneté » s'est lancée hier sous le soleil de l'après-midi de Aïn el-Mreissé en direction du rond-point de Riad el-Solh, pour la seconde année consécutive, parallèlement à des marches libanaises similaires dans plusieurs capitales du monde, dont Paris.
À Beyrouth, la petite Lilia en casquette rose, souriant dans sa poussette, « a un grand-père druze et un autre chiite, une grand-mère catholique et une seconde sunnite », explique Tarek, son père. Elle porte sur son tee-shirt les mêmes couleurs de l'arc-en-ciel qui rejaillissent sur nombre de banderoles réparties sur près de 300 personnes, tous âges confondus. Ces manifestants réclament le vote de la proposition de loi sur le statut civil facultatif, parrainé par l'ONG Chamel, ainsi que le vote du texte de loi protégeant la femme de la violence domestique, initié par l'ONG Kafa. Cette marche se veut « un message fort et un soutien symbolique aux ONG » qui œuvrent pour l'égalité entre les citoyens, explique Saïd Chaïtou, membre fondateur de la « Lebanese Laique Pride » (LLP), qu'il définit comme un « mouvement citoyen ». Pour lui, la citoyenneté veut dire l'égalité de tous, dans les droits et dans les devoirs, et la laïcité est le seul moyen d'atteindre cet objectif.
Évitant la comparaison avec les manifestations anticonfessionnelles organisées au Liban en février et mars derniers, et dont les partisans n'ont pas fait acte de présence hier, M. Chaïtou n'a pas manqué d'expliquer que les activistes présents hier ont des demandes spécifiques « et ne cherchent pas à abolir le système. D'ailleurs, les manifestants, animés à la fin de la marche par les rythmes saccadés d'une chanson rap créée pour l'occasion, ont crié "Révolution !" avant que l'une des organisatrices ne les calme en leur rappelant que "ceci est une marche, pas une révolution" ».
Ce que la Laique Pride voudrait plutôt abolir, mais à long terme, c'est le confessionnalisme « dans l'esprit des Libanais, que nous voulons combattre progressivement par l'éducation », explique M. Chaïtou. Et dans un élan d'utopie qu'il ne nie pas, il ajoute : « Les Libanais doivent comprendre que ce sont eux les garants de la laïcité. » En effet, ce n'est pas la répartition (confessionnelle) qui garantit la sécurité, estime N. Sayegh, jeune comédien. « Ce n'est pas en me séparant de l'autre que je suis mieux protégé. Au contraire, la peur de l'autre rapproche les gens par groupes et les rend facilement manipulables », affirme-t-il.

La laïcité ne s'importe pas
Le dialogue est nécessaire pour instaurer une laïcité proprement libanaise « parce que la laïcité ne s'importe pas, et c'est à nous de la mettre en place par les lois convenables d'abord, et en débattant ensuite entre nous des moyens d'en assurer une bonne application », ajoute M.Chaïto.
Mais ces moyens demeurent vagues, d'autant que la lutte contre le confessionnalisme implique d'abord une définition du confessionnalisme. Pour la « Laïque Pride », c'est « le confessionnalisme institutionnel qui est visé, et il inclut le confessionnalisme politique ».
Nizar Younès, auteur de plusieurs ouvrages en faveur de la laïcité, insiste sur la dimension politique du confessionnalisme qui a fourni à la caste politique « le moyen » de départager les parts du pouvoir, « et donc du pays, impliquant nécessairement une intervention des forces extérieures ». C'est ce mécanisme qui a sapé « la philosophie de vie en commun pour laquelle nous sommes réunis aujourd'hui », selon M. Younès. Et Raëd Rafeï, jeune journaliste, d'ajouter : « La laïcité ne contredit pas le pluralisme. »
Cette volonté de vivre en commun ne manque pas de rejaillir dans le cadre de la marche : des slogans ludiques mentionnent le terme anglais « laic » dans le sens de « like » (aimer, en anglais) ; des jeunes filles se promènent avec un voile blanc de mariée sur la tête et un tee-shirt appelant au mariage civil ; d'autres distribuent des roses, tandis que progressent à l'avant de la marche deux camionnettes fleuries, portant entre autres le slogan « Je suis laïc et je n'ai pas peur des leaders confessionnels »...
Mais dans cette ambiance de fraîcheur, comment expliquer l'agressivité d'une jeune femme qui refuse de s'adresser au journaliste de L'Orient-Le Jour parce qu'il décline sa demande de porter une affiche au cours de la marche ?
Un jeune d'une trentaine d'années, observateur serein et convaincu de l'intérêt de la marche, confie : « Je n'arrive pas à ressentir parmi ces personnes le sentiment d'urgence de descendre dans la rue », relevant un nombre de participants nettement moindre que celui de l'année dernière. « La Laïque Pride devrait soutenir sa marche par des campagnes de lobbying au cours de l'année », estime-t-il.
Les piliers concrets de cette marche auront été hier les campagnes pour les projets de lois que la Laïque Pride a choisi de soutenir. Mahi Habib, écrivain défendant la proposition de loi sur le statut personnel, a précisé que cette loi « assure un droit privé qui ne s'impose pas à la collectivité ». Et d'ajouter avec Élissar Zein, de l'ONG MMKN pour la citoyenneté ayant participé à la campagne de Chamel : « Que ceux qui demeurent attachés au système confessionnel nous considèrent comme la 19e confession ! »

La « Marche des laïcs vers la citoyenneté » s'est lancée hier sous le soleil de l'après-midi de Aïn el-Mreissé en direction du rond-point de Riad el-Solh, pour la seconde année consécutive, parallèlement à des marches libanaises similaires dans plusieurs capitales du monde, dont Paris. À Beyrouth, la petite Lilia en casquette rose, souriant dans sa poussette, « a un grand-père...
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