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Liban

La rue beyrouthine satisfaite de la liquidation de Ben Laden

Afin de cerner la réaction immédiate de la rue beyrouthine à l'annonce de la liquidation de Ben Laden par une unité d'élite américaine au Pakistan, L'Orient-Le Jour a effectué un microtrottoir à Achrafieh et à Hamra. Première réaction : un sentiment de satisfaction quasi général. « La nouvelle de sa mort est excellente, il fallait en finir », affirment Jessy et Claude, interrogées à Achrafieh. À quelques mètres d'elles, cinq étudiantes âgées de vingt ans, assises dans un café-trottoir, expriment un même sentiment de satisfaction : « Nous sommes contentes, enfin ! » et, parmi elles, Léa renchérit : « Qu'il serve de leçons à tous les autres extrémistes, ainsi qu'à ses semblables, à l'instar de Kadhafi. »
Sami, 60 ans, dégustant son café sur le même trottoir, espère lui aussi : « Inchallah, nous serons soulagés de sa présence, et bientôt Kadhafi et les autres le suivront. » Au-delà de la joie, c'est toute l'agressivité du « vainqueur » qui jaillit d'un vieil homme sur la table voisine : « C'est la fin des semblables de Ben Laden, pas même le début de la fin, mais la fin ! » Comme pour lui faire écho, le vieux Maroun jouant du oud au cœur de la place Sassine affirme avec un sourire serein : « Ben Laden était l'ennemi du peuple et du monde, c'était un terroriste. »
Dans son modeste commerce de parfums de la rue Hamra, Adnan, 50 ans, affirme pour sa part : « Sa mort aura soulagé les musulmans plus que les Américains, parce que Ben Laden était à cent pour cent contre les musulmans. » Dans le même sens, et traversant la rue précipitamment, un sexagénaire en costume lance : « Nous sommes enfin soulagés de lui, et nous espérons que les autres criminels suivront ! »
Houssam, jeune sunnite de 35 ans, qui se décrit comme « musulman pratiquant » explique : « La mort de Ben Laden est une chose positive parce qu'il représente l'islam extrémiste, non pas l'islam modéré. L'islam est la religion de l'indulgence et de tolérance. Nous ne pouvons en aucun cas accepter cette idéologie de l'extrémisme qui est pourtant ancrée chez plusieurs, qui sont autant de répliques de Ben Laden. » C'est dans ce contexte que le « bon débarras ! », lancé fermement par Mona, 60 ans, dans une rue d'Achrafieh, a rejoint le « nous sommes ravis ! » d'une Irakienne du même âge, longeant l'artère de Hamra en burka : « En plus de semer parmi les Irakiens un fanatisme confessionnel qui contredit la nature de notre société, Ben Laden a transmis à l'Occident une image bafouée de l'islam », déclare-t-elle. À quelques mètres, assis dans la tranquillité d'un restaurant de Hamra, deux sexagénaires égyptiens dénoncent tout le non-sens du terrorisme qu'incarnait Ben Laden, avant d'affirmer : « Il n'a rien fait pour la cause arabe, à savoir la cause palestinienne. Au contraire, il a été à son encontre. »
Pour sa part, Mohammad, étudiant chiite habitant la banlieue sud de Beyrouth et partisan du Hezbollah, estime que « Ben Laden a commis de grands crimes et a beaucoup de sang sur les mains ». Pour lui, « el-Qaëda est différente du Hezbollah : la première tue des innocents, alors que le Hezb attaque un ennemi reconnu comme tel ». Pour Hassan, ayant le même profil que Mohammad, « le Hezbollah est en partie terroriste », affirme-t-il après hésitation. Il ajoute en même temps : « Ben Laden méritait de mourir, mais pas aux mains des Américains. Je suis contre la violence quelle qu'elle soit. »
Un certain scepticisme quant à la mort de Ben Laden ne manque pas de ressurgir, à travers de fausses questions tintées d'humour : « Ben Laden est mort ? Vous êtes sûrs qu'il est mort ? » Pour Yasmina et Annibal, deux jeunes étudiants se prélassant au soleil d'Achrafieh, « Ben Laden n'est pas mort, il y a toujours un autre qui le remplacera à la tête de ce qu'il représente ». Romain, 21 ans, ajoute, alors qu'il revoit ses cours dans un café de Sassine : « Sa mort est une bonne chose, mais ce n'est pas la solution pour mettre fin au terrorisme. » Ainsi, certaines réponses assorties de réserves finissent par se muer en analyses politiques, parmi lesquelles une analyse récurrente : « Ce sont les Américains qui ont fabriqué Ben Laden, et ils en fabriqueront un autre. » Pour Mohammad, jeune sociologue sunnite, « le rôle de Ben Laden est maintenant achevé et les États-Unis recherchent un nouveau pilier à leur politique ». Pour Marc, 28 ans, « c'est un jeu américain, et la mort de Ben Laden est la fin du jeu avec lui ». Un professeur d'université irakien lance même à la dérobée : « La mort de Ben Laden n'a aucune importance dans la région, le seul but est de servir l'administration américaine aux prochaines élections. » Wim, un touriste hollandais à la retraite, signale la même hypothèse, mais ne manque pas de déclarer « sa grande joie à la nouvelle de la mort de Ben Laden ». Et un jeune étudiant syrien sunnite à l'Université libanaise d'initier un débat qui promet de se développer : « Est-ce que la mort de Ben Laden marque la fin du terrorisme ? Ou est-ce qu'elle attisera l'extrémisme qu'il incarne ? »
Afin de cerner la réaction immédiate de la rue beyrouthine à l'annonce de la liquidation de Ben Laden par une unité d'élite américaine au Pakistan, L'Orient-Le Jour a effectué un microtrottoir à Achrafieh et à Hamra. Première réaction : un sentiment de satisfaction quasi général. « La nouvelle de sa mort est excellente, il fallait en finir », affirment Jessy et Claude,...
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