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Lifestyle - Rencontre

Les projets de paix d’Alexandra Asseily

Ses longues « conversations avec Dieu » et avec les hommes lui ont enseigné la tolérance et le pardon. Alexandra Asseily plante les graines de cet apprentissage dans des projets où l'humain reste le principal sujet et la paix une notion essentielle.

Alexandra Asseily, une femme de dialogue.

Elle préfère le dire avec des mots justes. Avec des questions et des réponses, des fleurs et des arbres qu'elle sème partout. Comme autant de messages de paix et d'espoir face à des conflits et des guerres qui ont ponctué sa vie.
Née à Malte, « par hasard », d'un père anglais qui était dans la marine et d'une mère russe, Alexandra Asseily a vécu les affres de la Seconde Guerre mondiale. Tout comme son père a vécu celles de la guerre de 14-18, en y perdant son frère, et sa mère celles de la révolution russe qui l'a obligée à connaître très tôt l'exil. L'histoire se répète, pense-t-elle.
En 1966, lors d'un bref passage au Liban, elle rencontre George Asseily qu'elle épouse en 1969. « Je ne voulais pas être juste la femme de... ou une étrangère vivant au Liban. Je voulais connaître la réalité de cette ville. » C'est à travers le social qu'elle plante ses repères, crée des centres et des ateliers de travail à la Quarantaine et découvre le Liban « d'en bas ». Durant la guerre libanaise, une de plus dans sa vie, elle collabore avec des ONG internationales et devient coordinatrice de plusieurs associations. Deux ans plus tard, elle choisit d'« être mère à plein temps » et part s'installer à Londres. « C'était vraiment difficile d'être loin », avoue-t-elle. Mettant à profit l'éloignement pour tenter de comprendre les raisons de la violence de la guerre, Alexandra Asseily suit des cours de psychologie. « Nous avions également pris l'habitude, mon mari et moi, de réunir un groupe de personnes chez nous à la maison pour réfléchir ensemble et contribuer au rétablissement du Liban. » C'est ainsi que naquit en 1983 le Center of Lebanese Studies, encore très actif, affilié au St Antony's College à Oxford.
Partageant sa vie entre Londres, où elle est psychothérapeute, et Beyrouth, ou plutôt Bsous, d'où elle s'occupe de toutes ses activités, elle collabore également avec le Guerrand-Hermès Foundation for Peace dans cette même tentative de « briser les cycles de violence au Liban et au-delà ». « Ah quelle vie, s'écrie-t-elle, j'ai l'impression d'en avoir eu plusieurs ! »

Des îlots de paix
Son jardin de Bsous, longeant le musée de la Soie, lui ressemble. Serein, souriant, apaisant et discret. Un petit Éden silencieux peuplé de caroubiers, jujubiers, arbres fruitiers et de fleurs, à l'abri des conflits et des guerres qui n'en finissent pas d'en finir. « Je suis tombée amoureuse de cette parcelle de terre en 1966, c'était tellement familier que j'ai eu le sentiment d'y avoir vécu dans une vie antérieure ! » Avec son époux qui rachète la propriété en 1973, ils sèment à tout vent, rénovent les ruines et la magnanerie, avant que les événements de 1975 ne viennent tout brûler. De ce désastre, les Asseily referont un coin de paradis, sous la pulsion de Françoise le Noble Predine, ethnobotaniste, Thierry Huau, paysagiste, et sous la supervision de Guillaume Maurin. Le musée de la Soie est lancé en 2001 et fonctionne en collaboration avec l'association Mémoire et Développement.
Son Jardin du pardon, qui devait aussi être celui de tous les Libanais, ne verra pas le jour. Et pourtant... En ces temps amers où la rancune tenace, transmise de père en fils, devient un mal nécessaire pour justifier l'injustifiable, ce jardin, rêvé en 1998, aurait pu être une plate-forme de réconciliation. Il ressemble, particulièrement en ces moments délicats, à une triste illusion. « Ce projet, rappelle Alexandra Asseily, m'est venu comme une révélation. » En s'interrogeant tout haut sur le sens de sa vie et son rôle dans une paix possible, le projet du jardin du pardon, « Hadiqat el-Samah », « pilier des processus de reconstruction et de réhabilitation », s'impose à elle comme une évidence. De même que le choix des lieux, sans doute un murmure divin, au moment où elle s'y trouvait. Le site archéologique du Cardo romain, entre la place de l'Étoile et la place des Martyrs, délimité au nord par la mosquée de l'émir Assaf, à l'est par la place des Martyrs, au sud par la cathédrale Saint-Georges et la mosquée al-Amine, à l'ouest par les arcades de la rue Maarad, réunit en lui toutes les confessions. L'inauguration du jardin, approuvé par Solidere, était prévue pour juillet 2005. Un concours avait été lancé, et remporté par l'entreprise américo-britannique Gustafson Porter Ltd ; un budget de plusieurs millions de dollars lui avait été alloué. Chaque pierre avait été expertisée, les arbres achetés, « un travail de fou avait été accompli ». Mais Alexandra Asseily est rattrapée, une fois de plus, par les échos de la guerre. Celle de 2006, d'abord, et toutes ses conséquences : l'occupation du centre-ville, les problèmes sécuritaires de mai 2008 et la situation actuelle. Vingt-neuf ONG ont signé une pétition pour la poursuite des travaux, mais l'immobilisme est de mise. Le rêve du jardin est suspendu et le rêve du pardon comme seul langage possible semble éclipsé. Là où aurait dû se construire une oasis de paix, des gardes du Parlement sont aujourd'hui stationnés.
Alexandra Asseily n'a pourtant pas interrompu ses conversations avec Dieu. Elle continue, dans son combat, à espérer un monde meilleur. « Je n'appartiens à personne, je ne dois rien à personne, précise-t-elle. C'est bien d'être personne et quelqu'un en même temps. » On appelle cela la liberté.
Elle préfère le dire avec des mots justes. Avec des questions et des réponses, des fleurs et des arbres qu'elle sème partout. Comme autant de messages de paix et d'espoir face à des conflits et des guerres qui ont ponctué sa vie. Née à Malte, « par hasard », d'un père anglais qui était dans la marine et d'une mère russe, Alexandra Asseily a vécu les affres de la Seconde...

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