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Moyen Orient et Monde - Tunisie

Le nouveau gouvernement tunisien fragilisé par des démissions en série

Au lendemain de sa formation, le nouveau gouvernement d'union nationale en Tunisie a été fragilisé par la démission de trois ministres syndicalistes. Le cabinet est, en outre, déjà contesté par la rue. Le maintien au pouvoir de responsables ayant servi sous la présidence de Ben Ali a alimenté la colère de milliers de Tunisiens qui ont défilé dans le centre de Tunis et dans d'autres régions.

À Tunis, la police a violemment dispersé un millier de manifestants, parmi lesquels des islamistes. Zoubeir Souissi/Reuters

Les démissions dès hier de trois ministres syndicalistes fragilisent le gouvernement d'union nationale en Tunisie formé la veille et qui, dominé par les caciques de l'ancien régime, se retrouve déjà contesté. En signe d'apaisement, le président tunisien par intérim, Foued Mebazaa, et le Premier ministre, Mohammad Ghannouchi, ont démissionné du Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), le parti du président déchu Zine el-Abidine Ben Ali, a annoncé l'agence TAP. La démission du président par intérim et du Premier ministre de transition « concrétise une décision de séparation entre les organes de l'État et les partis politiques », décidée lundi par le nouveau gouvernement d'union nationale, selon la TAP. Le RCD a par ailleurs annoncé, dans un communiqué cité par la TAP, avoir radié de ses rangs Ben Ali et six de ses collaborateurs, « sur la base de l'enquête menée au niveau du parti, à la suite des graves événements qui ont secoué le pays » ces dernières semaines.
Les trois démissionnaires appartiennent à l'Union générale des travailleurs tunisiens (UGTT). « Nous nous retirons du gouvernement à l'appel de notre syndicat », a déclaré M. Houssine Dimassi, nommé lundi ministre de la Formation et de l'Emploi. Les deux autres sont Abdeljelil Bédoui (ministre auprès du Premier ministre) et Anouar Ben Gueddour (secrétaire d'État auprès du ministre du Transport et de l'Équipement). L'UGTT, puissante centrale syndicale, a joué un rôle crucial dans les manifestations qui ont provoqué la chute du président Ben Ali, qui a fui son pays le 14 janvier après 23 ans de pouvoir. L'UGTT a annoncé également qu'elle ne reconnaîtrait pas le nouveau gouvernement du Premier ministre Mohammad Ghannouchi.
Le Forum démocratique pour le travail et les libertés (FDLT) a par ailleurs annoncé hier la suspension de sa participation dans le gouvernement. Le chef du parti, Mustapha Ben Jaâfar, nommé lundi ministre de la Santé, « a décidé de suspendre sa participation dans le gouvernement », a déclaré Abdellatif Abid, membre du bureau politique du parti. « Il n'a pas prêté serment, en attendant la fin de consultations avec le Premier ministre (Mohammad Ghannouchi), concernant des demandes du FDLT qui concernent la composition du cabinet », a ajouté M. Abdellatif Abid. Il a ajouté que « ces consultations se tiennent en coordination avec l'UGTT ».
Dans le même temps, le mouvement islamiste Ennahda (renaissance), pourchassé par le régime de Ben Ali, a annoncé son intention de demander sa légalisation et de participer aux élections législatives prévues avant la mi-juillet. Ennahda, démantelé après les élections de 1991 où il avait obtenu 17 % des voix, se présente comme un parti réformateur prônant un islam modéré et se dit proche de l'AKP turc, le parti islamo-conservateur au pouvoir à Ankara. Dans le même temps, Moncef Marzouki, opposant historique au régime de Ben Ali, est rentré de Paris en Tunisie. Président du parti le Congrès pour la République (CPR), il a annoncé qu'il serait candidat à la présidence.
Ces annonces interviennent sur fond de forte contestation de la composition de ce gouvernement, où ont été reconduits des membres de l'équipe sortante de l'ex-dictateur, tous membres du RCD qui a régné sans partage pendant 23 ans sur la vie politique. M. Ghannouchi a formé un gouvernement d'union nationale de 24 membres, avec trois figures de l'opposition légale mais également - outre le président du conseil - sept ministres de l'ancien régime. Ces ministres ont conservé les portefeuilles-clés, comme l'Intérieur, la Défense, les Affaires étrangères et les Finances notamment.
Ce maintien de responsables ayant servi sous la présidence Ben Ali a alimenté la colère de milliers de Tunisiens qui ont défilé dans le centre de Tunis et dans d'autres régions, comme Sfax (centre-est), deuxième ville du pays. À Tunis, la police a violemment dispersé un millier de manifestants, parmi lesquels des islamistes. « RCD assassins », ont scandé les manifestants. « On peut vivre seulement avec du pain et de l'eau, mais pas avec le RCD », chantaient-ils. La police a tiré des gaz lacrymogènes pour disperser les protestataires, qui se sont par la suite regroupés pour affronter de nouveau les forces de l'ordre. D'autres manifestations ont eu lieu à Sidi Bouzid (centre-ouest), Regueb et Kasserine, trois bastions de la Révolution du jasmin.
Les démissions dès hier de trois ministres syndicalistes fragilisent le gouvernement d'union nationale en Tunisie formé la veille et qui, dominé par les caciques de l'ancien régime, se retrouve déjà contesté. En signe d'apaisement, le président tunisien par intérim, Foued Mebazaa, et le Premier ministre, Mohammad Ghannouchi, ont démissionné du Rassemblement constitutionnel...

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