Il y a longtemps, il est vrai, que les jeunes hommes de main des cartels ont donné la réponse dans une formule consacrée : « Plutôt vivre cinq ans comme un roi que cinquante comme un chien. » De fait, au Mexique, « l'homicide est sur le point de devenir la principale cause de décès des jeunes gens de 15 à 25 ans », expose à l'AFP l'ancien directeur de l'Institut mexicain d'assurance sociale, Mario Luis Fuentes, qui gère maintenant une ONG vouée au développement.
Recrutés parmi les plus de 7 millions de « nini » du pays, « nini » comme « ni études ni travail », ces jeunes deviennent la « chair à canon » de la guerre entre les cartels rivaux pour le contrôle du trafic. Le conflit a fait 28 000 morts dans le pays depuis l'arrivée au pouvoir en décembre 2006 du président Felipe Calderon, qui a fait déployer 50 000 militaires en renfort de la police contre les trafiquants. Sur les 5 500 meurtres comptabilisés depuis janvier 2010 à Ciudad Juarez, principal champ de bataille de cette « guerre des cartels », à la frontière américaine du Texas, 30 % ont été commis entre jeunes de moins de 20 ans, souligne le parquet régional.
L'opinion publique, qui pourrait pourtant être blasée, s'est horrifiée le 31 janvier dernier, quand une bande de tueurs a massacré à Ciudad Juarez 16 lycéens qui fêtaient un anniversaire et une victoire de leur équipe de football. Un gang pensait qu'un rival était dans l'assistance et a tiré dans le tas. Même scénario en juillet, à Torreon, dans l'État de Coahuila, lui aussi frontalier du Texas : des hommes « fortement armés » font irruption dans une fête en criant : « Tuez-les tous », selon des témoins, et abattent 17 jeunes gens.
Pendant l'année scolaire 2007-2008, 50,4 % seulement des jeunes Mexicains en âge de passer le baccalauréat suivaient des études, selon le rapporteur spécial de l'ONU sur le Droit à l'éducation, Vernor Munoz. « Quand le manque d'options se combine à un accès facile aux drogues et aux armes, et que la violence imprègne l'environnement, rejoindre le crime organisé est un choix tentant », conclut le Réseau pour les droits de l'enfance au Mexique.