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Municipales 2010 : la loi - Éclairage

Des élections municipales qui ne devraient pas modifier les rapports de force…

Après le flou savamment maintenu pendant plusieurs mois, les élections municipales se tiendront à la date prévue à partir du 2 mai sur la base de la loi en vigueur en 2004. Si les citoyens se sentent floués après toutes les promesses de réformes, alors que toutes les propositions de modernisation sont tombées l'une après l'autre, les responsables, eux, peuvent se frotter les mains : telles qu'elles se présentent, ces élections ne devraient pas modifier de façon importante les rapports de forces actuels. D'ailleurs, dans certains milieux politiques, on estime que les rumeurs sur un report quasi certain de la date du scrutin avaient été sciemment répandues pour permettre au « processus de neutralisation des élections » de se mettre en place. En d'autres termes, il fallait un peu de temps pour convaincre les différents protagonistes de renoncer à se lancer dans des batailles décisives qui perturberaient le climat général. Mais pour que cette idée puisse faire son chemin, il était nécessaire de jeter de la poudre aux yeux. Ce qui fut fait à travers les réunions et les débats sur les réformes destinées à moderniser la loi...
À un peu plus de deux semaines du début de l'opération électorale, le « paysage municipal » se présente ainsi : pas de bataille dans les régions à majorité chiite, pas de bataille non plus dans les régions à majorité sunnite et comme pour les élections législatives de 2009, seules les régions chrétiennes devraient être le théâtre de véritables duels électoraux.
Le Hezbollah et Amal ont commencé par donner le ton en finalisant un accord global dans toutes les localités à population majoritairement chiite, qui laisse toutefois une place aux notables et au système familial, pour ne pas créer une vague de mécontentement au sein de la population. Par le biais de cet accord, Amal et le Hezbollah ont réussi à surmonter les conflits qui auraient pu naître à la faveur de ces élections et qui auraient abouti à une certaine érosion de leur popularité.
Si un tel accord entre les deux grandes formations chiites était prévisible, l'appui des deux formations à un accord avec le Courant du futur l'était moins. Pourtant, dans le cadre de sa volonté de préserver ses relations avec le Premier ministre Saad Hariri, le Hezbollah a demandé à ses alliés à Saïda et à Tripoli de ne pas se lancer seuls dans la bataille électorale et de rechercher au contraire des accords avec le Courant du futur. C'est ainsi que le secrétaire général du Hezbollah a reçu la semaine dernière l'actuel président de la municipalité de Saïda Abdel Rahmane Bizri, rival local des « haririens » qui a annoncé son renoncement à mener la bataille électorale. À Tripoli, la tendance est aussi à l'accalmie. Pourtant, ces deux villes, dont la population est à majorité sunnite, auraient pu fournir un indice du rapport de force véritable sur la scène sunnite et pour Saad Hariri, l'enjeu était de taille. Mais le « souci d'éviter des batailles qui radicaliseraient les positions » l'a emporté. À Tripoli donc, les forces en présence se dirigent vers une liste de coalition qui regrouperait des représentants du Courant du futur, de l'ancien Premier ministre Négib Mikati, du ministre Mohammad Safadi et même de l'ancien Premier ministre Omar Karamé. Bien entendu, l'accord pourrait échouer à la dernière minute en raison du partage des parts, mais il sera de toute façon trop tard pour mener de véritables batailles électorales. Même à Beyrouth, le Hezbollah et Amal ont choisi de ne pas mener de bataille et de s'entendre avec le Premier ministre pour appuyer sa propre liste. Ont-ils ainsi vraiment lâché le chef du CPL le général Michel Aoun qui voulait obtenir un découpage de la capitale dans le genre de celui des élections législatives pour permettre aux quartiers chrétiens d'élire un conseil municipal autonome ? Si lâchage il y a, répondent des sources proches du CPL, il aurait eu lieu dans le renoncement aux réformes. Mais à partir du moment où les élections doivent se dérouler sur la base du découpage de 2004, le général Aoun sait qu'il ne peut pas gagner la bataille à Beyrouth contre le Courant du futur, en raison du grand nombre d'électeurs sunnites. « La bataille de Beyrouth » n'aura donc pas lieu, en tout cas pas avec la même férocité que les législatives.
Restent donc les régions à majorité chrétienne, où les élections devraient opposer le courant aouniste et ses alliés aux chrétiens du 14 Mars, aux partisans du patriarche maronite Mgr Sfeir et dans certaines localités, comme Jbeil, aux partisans du président de la République. Mais, comme pour les élections législatives de 2009, c'est sans doute à Zahlé que la bataille sera la plus déterminante. Élias Skaff, leader traditionnel de la ville, la voit comme une revanche aux élections législatives qu'il a perdues à cause de ce qu'il appelle une manipulation dans les votes sunnites du caza. Mais dans les municipales, les voix sont plus faciles à cerner, localité par localité. De plus, il compte profiter du départ de Nicolas Fattouche du bloc du 14 Mars et du changement dans les discours politiques d'une partie des leaders de ce mouvement, qui va dans le sens de sa propre ligne politique. Le camp adverse aussi serre les rangs pour mener une bataille qu'il espère victorieuse en misant sur des scissions dans le camp de Skaff et sur un regain de popularité des Kataëb et des FL considérés par certaines couches chrétiennes « comme les derniers résistants »... à l'influence syrienne. La Syrie, elle, ne compte pas intervenir, sachant que comme dans le cas des élections législatives de 2009, le camp victorieux ne pourra pas profiter de son succès pour se retourner contre elle, entente syro-saoudienne oblige.

Après le flou savamment maintenu pendant plusieurs mois, les élections municipales se tiendront à la date prévue à partir du 2 mai sur la base de la loi en vigueur en 2004. Si les citoyens se sentent floués après toutes les promesses de réformes, alors que toutes les propositions de modernisation sont tombées l'une après...