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Lifestyle - Hotte d’or

Repose, mon gracile

J'aime, mon Éric, et je me souviens. Je t'avais dit il y a quelques années, c'était en 2001, lorsque tu me racontais ton adaptation de L'Anglaise et le duc, que tu es mon lion superbe et généreux. Lion, moi ? avais-tu souri avec ta rétine qui palpitait d'ironie et de tendresse, mais je suis tout sauf un lion, ma Margotte... J'aime quand tu m'appelles Margotte. Je te répétais : Tu es mon lion gracile. Gracile. C'est toi. Tout toi. J'aime, mon Éric, comment ta modernité dynamitait tous les clichés, comment tu arrivais à rendre universelles ces comédies humaines abracadabrantes écrites il y a des siècles ; j'aime ton atemporalité. Tu es suspendu, mon Éric ; beau et effectivement gracile comme un jardin d'hiver. Ou d'été. Ou de printemps. Ou d'automne. Tu es un conte, mon Éric. Je me souviens : je râlais à l'idée de revoir cette cruche d'Arielle Dombasle dans ton L'Arbre, le maire et la médiathèque, tu souriais encore, doucement : Tais-toi Margotte, tu es jalouse, cette Barbie au QI de Curie aurait pu être ta petite sœur ! Tu te souviens, mon Éric, quand je suis sortie de la première projection des Amours d'Astrée et de Céladon, mon rimmel coulait de partout, je t'ai dit : Tu es un chasseur, un soldat, un mercenaire au service du bonheur. Tu m'a alors emmenée dîner chez Pierre Gagnaire avec l'ange Andy Gillet, tu m'avais annoncé que ce mignon est pour mon lit, tu t'occupais même de mes nuits, mon Éric, nous avons vidé ce soir-là, avec Andy, trois bouteilles de Veuve Clicquot rosé sur le lit du Ritz à ta santé. J'aime, mon Éric, comment tu me montrais le monde, brut de décoffrage, une rose dont les pétales vibraient au vent, une damoiselle qui avait peur des éclaboussures d'amour, la vérité aussi, surtout la vérité, mon Éric, comment tu la filmais, la vérité, sans jamais la figer, sans que jamais elle ne devienne despote, tu la filmais, la vérité, comme tu filmais la beauté. Je me souviens de mon amoureux platonique, JC, avant qu'il ne devienne Brialy, à croquer tout cru dans Le Genou de Claire, et je me souviens du diable blond, sublime, sublime sous ta lentille, mon Éric, sa Nuit chez Maud : Jean-Louis Trintignant. Ce n'est pas vrai que tu préférais les actrices, mon Éric, tu en raffolais, certes, tu savourais, tu salivais, gracile encore et toujours, mais tu savais aussi magnifier cette race d'êtres vivants que tu ne comprenais pas souvent, que tu n'avais sans doute pas envie de comprendre : les acteurs. Même Fabrice Luchini devenait presque beau. Je me souviens, mon Éric, de ton rictus quand te revenaient ces critiques pachydermiques et niaises sur les logorrhées de tes films, tu levais doucement les yeux au ciel, Ils disent que je suis le Marivaux du cinéma et ils m'en veulent de faire du Marivaux. Marivaux ? Mais quel Marivaux ? Ces critiques ne comprennent rien, mon Éric, mon von Stroheim, qu'est-ce que j'avais ri quand tu m'as expliqué pourquoi tu avais choisi Éric, ils ne savent rien de rien, ces critiques, ils ne se fient qu'aux apparences, et toi, toi mon Éric, tes transparences étaient les plus belles, les plus folles, les plus violentes, tu étais Lautréamont et Shakespeare, mon Éric, et je resterai toujours ta sorcière de Macbeth, je ne suis plus rousse, mon poète fol, mais tu m'aimeras aussi comme ça et tu continueras, gracieusement, mon lion gracile, et tellement tendrement, à te moquer de moi chaque fois que je dirai miam miam.

 

margueritek@live.com

J'aime, mon Éric, et je me souviens. Je t'avais dit il y a quelques années, c'était en 2001, lorsque tu me racontais ton adaptation de L'Anglaise et le duc, que tu es mon lion superbe et généreux. Lion, moi ? avais-tu souri avec ta rétine qui palpitait d'ironie et de tendresse, mais je suis tout sauf un lion, ma Margotte... J'aime quand tu...

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