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Culture - Exposition

Le journal intime d’une céramiste romantique et drôle

Ses sculptures sont ses mots et ses mains son langage. Il est donc tout à fait naturel qu'Amal Muraywed regroupe, à la galerie Aïda Cherfan*, ses céramiques sous l'intitulé « Clay Diaries ».

Sa majesté la pomme...

C'est en effet avec ses mains, longues et fines, qu'Amal Muraywed exprime ses sentiments les plus secrets. C'est aussi avec ses mains qu'elle aime pétrir, modeler, malaxer, élaborer des formes diverses en y imposant ses empreintes.
Boucles blondes, yeux bleus, bouche mutine, assise le dos droit comme un « i » et les mains (encore elles) sagement posées sur ses genoux, l'artiste s'anime lorsqu'elle évoque ses céramiques, ses inspirations, ses intentions. « Vous savez, mon père, ancien militaire, m'a dit un jour une chose qui m'a marquée à jamais, raconte-t-elle toute émue. Je rentrais de l'école maternelle en pleurs, me plaignant de cette enfant qui m'avait frappée. Il m'avait alors prise par les épaules et regardée dans les yeux en me confiant : "je pourrais aller prendre ta défense dans la cour de récré. Mais je ne serai pas près de toi toute la vie. Il faut que tu apprennes à te défendre toute seule". » Aujourd'hui, devenue artiste consacrée et après avoir courageusement affronté l'adversité, Muraywed donne la parole à ses sculptures. « Le travail d'un artiste devrait être son meilleur avocat », dit-elle.
Cicéron disait qu'un « poème est une peinture loquace et la peinture un poème muet ». Comme les métaphores des poèmes, ses œuvres stimulent l'imaginaire. Elles n'expliquent rien, ne parlent pas explicitement, mais elles suggèrent des interprétations, évoquent des images. Elles inspirent en fait. En perpétuelle quête d'identité, ses pièces (aux titres malicieux) se traduisent par une diversité et une recherche incessante de l'objet unique. Le dynamisme de la ligne, le brillant de l'émail et les couleurs somptueuses de ses sculptures organiques (blanc nacré, rose saumon, bleu pétrole) agrémentées de touches dorées sont vraiment beaux.
Professeur de céramique au Fine Arts Department de l'Université américaine de Beyrouth depuis l'an 2000, Muraywed possède à son actif une dizaine d'expositions solo. Elle a également participé à de nombreuses manifestations collectives à Paris, Vallauris, Damas, Le Caire et Dubaï. Muraywed est par ailleurs l'auteur de nombreux articles et études sur l'histoire de la céramique et ses manifestations contemporaines. « Les figures féminines modelées dans l'argile remontent aux époques préhistoriques. Vous ne trouverez nulle part un médium aussi expressif comme l'argile. Il représente vos sentiments en trois dimensions et avec l'empreinte de vos doigts. »
Mixant humain, animal et végétal, les sculptures charnelles de Muraywed jouissent de métamorphoses infinies. Tantôt femme-fleur, tantôt icône, entre innocence décorative et sensualité toute en douceur, elles nous laissent d'ailleurs deviner le tempérament romantique, à tendance art brut, de cette plasticienne. Elles traduisent également l'esprit un peu farceur de Muraywed qui pose une pomme sur un trône en intitulant l'œuvre Sa Majesté  (« pour redorer le blason de ce fruit trop vilipendé depuis Adam et Ève »). Ou qui représente Gilgamesh en figure féminine sur un plateau d'eau. Ou encore qui ajoute malicieusement un derrière parfaitement rebondi à une sculpture aux formes géométriques.
« Cette collection exprime la joie, la tristesse, l'espoir et l'ambition. Des sentiments exprimés en toute sincérité avec l'argile et rendus immortels par les flammes du feu. »
Et chaque feu qui s'éteint la pousse vers de nouvelles perspectives...

*Jusqu'au 25 décembre, à la galerie Aïda Cherfan, place de l'Étoile. Du lundi au samedi, de 10h30 à 19h30. Tél. : 01/983111- 222. http://www.aidacherfan.com
C'est en effet avec ses mains, longues et fines, qu'Amal Muraywed exprime ses sentiments les plus secrets. C'est aussi avec ses mains qu'elle aime pétrir, modeler, malaxer, élaborer des formes diverses en y imposant ses empreintes. Boucles blondes, yeux bleus, bouche mutine, assise le dos droit comme un « i » et les mains (encore elles) sagement posées...
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